Sous couvert de faire davantage participer les citoyens à la justice, vous en profitez, de surcroît, pour procéder à une réforme du droit pénal des mineurs. Faute de popularité, ce dernier thème, très important, a été en partie occulté par les prétendus jurés populaires. Pourtant, ce deuxième volet de votre projet de loi est essentiel et constitue la trente-cinquième réforme de l'ordonnance de 1945 sur les mineurs ! J'ai bien dit la trente-cinquième. Le Gouvernement répète à toute occasion que les mineurs d'aujourd'hui ne sont plus ceux de 1945, mais l'ordonnance ayant été révisée chaque année depuis 2007, je pose la question : en quoi un mineur de 2011 serait-il si différent d'un mineur de 2007, de 2008, de 2009 ou de 2010 ?
La société que vous imaginez et que vous organisez, bien loin d'offrir sa protection à tous les enfants, semble ne songer qu'à se protéger elle-même de nos enfants, et en priorité des moins favorisés d'entre eux, comme s'ils étaient des sujets dangereux, voire irrécupérables. En effet, ces dispositions consistent à aligner insidieusement le régime pénal des mineurs sur celui des majeurs, niant la spécialisation de la justice des mineurs, principe pourtant rappelé par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 10 mars 2011. Votre projet fait quasiment disparaître le tribunal pour enfants où siègent aujourd'hui, au côté du juge des enfants, deux assesseurs recrutés pour leur intérêt pour les questions de l'enfance : les voilà en effet congédiés au profit du tribunal correctionnel.
Le troisième volet de cette réforme, ou plutôt de cette contre-réforme, relatif à l'application des peines, est aussi scandaleux que les deux premiers. En matière d'application des peines, l'assesseur citoyen assistera désormais les magistrats et remplacera, à la chambre d'application des peines de la cour d'appel, le représentant de l'association d'aide aux victimes et le représentant de l'association de réinsertion. Dans une matière aussi complexe, quel est l'intérêt de remplacer un citoyen qualifié par quelqu'un qui n'aura ni son expérience, ni sa compétence, ni le même intérêt que lui pour le sujet ? Nous n'en voyons qu'un : rendre plus difficiles les libérations conditionnelles. On comprend bien la logique populiste d'un tel choix : il s'agit de laisser croire aux Français que la présence de simples citoyens auprès des magistrats professionnels constituera un frein aux libérations conditionnelles et au relèvement des périodes de sûreté.
À la lecture de ce projet de loi, on s'interroge vraiment sur sa cohérence et sur sa justification judiciaire. Il s'agit en réalité d'une opération purement politicienne. Pour toutes ces raisons, les députés écologistes ne voteront pas ce texte.