Certes, mais personne n'empêche les différents acteurs de la scène internationale de considérer que, par son comportement, Kadhafi s'est discrédité pour continuer de diriger la Libye. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP.)
Grâce au travail du groupe de contact, constitué à l'initiative de la France et qui s'est réuni à plusieurs reprises, un consensus s'est dégagé : Kadhafi doit partir. Le G8 partage cette volonté – G8 composé, je vous le rappelle, non seulement d'Européens mais aussi des Américains et des Russes. J'ai pu vérifier au cours de mon voyage à Moscou il y a quelques jours, lors de mes entretiens avec Sergueï Lavrov, que la Russie partage totalement cet objectif. C'est également la position du Conseil européen, de la Turquie, de la Ligue arabe et enfin, petit à petit, de l'Union africaine, divisée au début avant que les choses n'évoluent dans la bonne direction comme on a pu le constater à Malabo. J'ai pu le vérifier hier et avant-hier en rencontrant le premier ministre éthiopien, M. Meles Zenawi, qui joue un rôle très important dans le panel de l'Union africaine pour la Libye et qui m'a tenu un discours des plus explicites : Kadhafi doit partir. C'est également ce que m'a déclaré avant-hier à Nouakchott le président mauritanien Aziz, qui fait lui aussi partie du panel de l'Union africaine.
Nous sommes aujourd'hui en meilleure position pour faire émerger un consensus politique sur la solution diplomatique à apporter à la crise. Sans faire preuve d'un optimisme excessif, je crois pouvoir affirmer que les paramètres de cette solution sont aujourd'hui agréés par presque tout le monde, encore faut-il les faire accepter, bien sûr, par les protagonistes eux-mêmes.
Le premier de ces paramètres – qui ne prête plus à discussion – est la mise à l'écart de Kadhafi.
Ensuite, il faut aboutir à un cessez-le-feu qui ne se réduise pas au simple gel des positions sur le terrain, car le risque serait alors grand d'une partition de fait de la Libye, mais qui soit authentique, avec le retour des éléments militaires dans leurs casernes et sous le contrôle des Nations Unies ou de l'Union africaine.
Le troisième paramètre est la constitution d'un gouvernement de transition qui associe les différentes parties prenantes en Libye.
Il reviendra à ce gouvernement – quatrième paramètre –d'organiser un dialogue national inclusif – pour reprendre le vocabulaire diplomatique à la mode –, associant, sous les auspices du Conseil national de transition, les autorités traditionnelles du pays – selon les interlocuteurs, on accorde une plus ou moins grande importance aux chefs de tribu qu'il faudra de toute façon impliquer dans le processus – et surtout, tous ceux qui, à Tripoli, ont bien compris qu'il n'y avait pas d'avenir pour la Libye avec Kadhafi et qu'il fallait faire défection ou se rallier au processus de dialogue national.
Sur la base de ce dialogue national, sera mise en oeuvre la feuille de route – dernier paramètre – définie à la fois par le Conseil national de transition et par le groupe de contact, prévoyant l'élaboration d'une constitution, l'organisation d'élections, bref, la construction d'une Libye démocratique.
La question n'est par conséquent pas, aujourd'hui, de savoir si Kadhafi doit partir, mais quand et comment. C'est le pas qui nous reste à accomplir. Doit-il partir de Libye, doit-il y rester ? Il revient aux protagonistes d'en discuter. J'espère que vendredi, à Istanbul, nous pourrons à nouveau affirmer la cohésion du groupe de contact sur cette feuille de route et provoquer la rencontre des parties qui amorcera le processus politique qui constitue bien notre objectif. J'y insiste : des progrès importants ont été réalisés au cours des dernières semaines dans cette direction.
J'ajouterai que l'aide humanitaire est également l'une de nos préoccupations essentielles : l'Union européenne intervient massivement par le biais du programme ECHO – 70 millions d'euros ont déjà été débloqués à ce titre – ; la France, quant à elle, fournit une aide bilatérale importante, notamment en matière médicale. L'aide aux réfugiés a été très significative quand ils ont afflué massivement en Tunisie.
L'Union européenne s'est déclarée prête à soutenir militairement l'aide humanitaire dans le cadre de l'opération EUFOR. Il se trouve que les Nations Unies, qui ont la responsabilité de déclencher ce soutien militaire à l'aide l'humanitaire, n'ont pas, jusqu'à présent, éprouvé le besoin de le demander, ce qui démontre que l'aide est bien acheminée.
Nous préparons intensément le jour d'après.