Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de François de Rugy

Réunion du 17 juin 2008 à 15h00
Réforme portuaire — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois de Rugy :

…alors qu'il répond pleinement aux objectifs du Grenelle de l'environnement et qu'il bénéficie du soutien des professionnels du transport et de la logistique et de toutes les collectivités locales, contrairement à d'autres projets beaucoup plus contestés. Rappelons qu'il s'agit d'alléger le trafic routier sur l'axe, très chargé, entre Nantes et Bordeaux et, surtout entre Bordeaux et l'Espagne. On sait les congestions qui existent autour de Bordeaux et à la frontière franco-espagnole, congestions auxquelles contribue fortement le trafic de camions.

À l'heure où tout le monde parle de crise du transport routier, où tout le monde parle des économies nécessaires de carburant – et c'est une urgence –, je vous demande donc, monsieur le secrétaire d'État, j'insiste, de prendre un engagement clair et net sur ce projet d'autoroute de la mer qui, encore une fois, va dans le sens du développement durable.

Je reviens au rapport de 2006 de la Cour des comptes qui attirait notre attention sur un problème que nous avons déjà pu constater depuis longtemps en tant qu'élus : celui de la connexion des ports français avec les réseaux notamment ferroviaires et fluviaux. Certes, le présent projet donne aux grands ports maritimes la prérogative en matière de « promotion de l'offre de dessertes ferroviaires et fluviales en coopération avec les autres opérateurs concernés ». Vous admettrez néanmoins que cette phrase est tout de même assez générale et assez floue, et que ce n'est pas cette disposition qui suffira à rendre les infrastructures plus compétitives pour desservir les ports français. Or aujourd'hui certains transporteurs routiers, certaines organisations de transporteurs routiers le disent eux-mêmes : dans la crise que nous vivons actuellement, il faut préparer le transfert de la route vers le rail pour un certain nombre de transports de marchandises.

Il ne suffit pas pour cela de donner aux grands ports maritimes la possibilité de discuter de la question, même avec des opérateurs de transport ferroviaire. Il faut mettre à niveau les infrastructures, ce que seul l'État peut réaliser grâce à Réseau ferré de France. Jamais un grand port n'investira dans des infrastructures situées en dehors de son périmètre.

Si je prends l'exemple de la desserte du port de Nantes-Saint-Nazaire, que je connais bien, nous savons qu'il existe au moins trois points faibles : la traversée d'une raffinerie par des convois de marchandises et de passagers ; le passage d'un tunnel sous la ville de Nantes – le seul possible pour des convois de matières dangereuses – ; enfin, la saturation de l'axe Nantes-Angers. Là aussi, nous souhaitons obtenir des engagements clairs et concrets de l'État sur ces investissements dans les infrastructures. L'une des différences de nos ports avec les ports du Nord, c'est que ces derniers sont bien connectés au réseau ferroviaire.

Bien sûr, l'investissement public ne suffira pas et il est tout à fait souhaitable de recourir à des investissements privés. Reste qu'en la matière, on le sait, les investisseurs privés ne se mobiliseront que dès lors que l'État et les collectivités locales auront amorcé la pompe, si l'on peut dire, et s'ils font preuve d'un volontarisme et d'une ligne directrice claire pour l'avenir – ce sera vrai demain pour l'outillage. Je ne vois pas pourquoi des investisseurs privés iraient financer de nouveaux développements de l'outillage s'ils constatent qu'il n'existe pas de nouveaux débouchés importants pour les ports où ils seraient prêts à investir.

Je voudrais prononcer maintenant quelques mots sur la gouvernance de ces nouveaux grands ports maritimes. La composition du conseil de surveillance, telle que prévue par le texte, pose problème. Je ne comprends pas pourquoi la règle des « quatre quarts », initialement proposée, a été modifiée. Je présenterai un amendement dans ce sens car on devrait bien davantage mobiliser les salariés et les collectivités locales autour de leur port plutôt que d'assurer une hégémonie de l'État, hégémonie d'autant plus anachronique qu'il n'apporte plus aujourd'hui les financements nécessaires. Je trouve inacceptable qu'il n'y ait que trois représentants du personnel au sein de ce conseil, d'autant qu'il n'est fait nulle mention explicite des dockers.

De même, on ne comprend pas pourquoi les collectivités locales n'auraient que quatre représentants tandis que l'État en aurait cinq. Et cela alors que nous nous accordons tous pour considérer que les collectivités locales jouent un rôle crucial dans le développement des ports, d'autant plus qu'elles ont hérité d'un certain nombre de ports d'intérêt national et que nous gagnerions à oeuvrer à une future coopération entre les grands ports maritimes et les ports d'intérêt national.

La politique portuaire générale devrait viser un meilleur équilibre entre les ports en France. Nous sommes, je l'ai dit, très mobilisés en Loire-Atlantique autour du port de Nantes-Saint-Nazaire. Il constitue une richesse dont nous sommes pleinement conscients, non seulement en ce qui concerne l'activité propre, mais aussi et surtout pour ce qui est des effets induits, évalués à 2,7 milliards d'euros par an et à plus de 25 000 emplois dans la région.

En même temps, nous ne nous réjouissons pas de cette situation car nous voyons, comme d'autres, s'accroître le déséquilibre entre Le Havre et Marseille, d'une part, et les autres ports français, d'autre part. Cela n'a aucun sens pour nous de déshabiller Paul pour habiller Jacques.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion