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Intervention de Frédéric Lefèbvre

Réunion du 28 juin 2011 à 17h00
Commission des affaires économiques

Frédéric Lefèbvre, secrétaire d'état chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation :

Vous avez été nombreux à reconnaître que le projet de loi comporte des avancées sur plusieurs sujets et, comme vous avez mentionné des sujets différents, il semble donc que le texte comporte des avancées dans toutes ses dispositions. Je prends cela comme un compliment de la part de votre Commission.

Ma seule ambition, je le répète, consiste à répondre aux attentes des consommateurs. Élaborer de grandes lois en reprenant les propositions formulées ici et là sur toutes sortes de thèmes ne me paraît pas le plus efficace. J'ai préféré aborder ce dossier avec humilité et regarder, à partir des 92 500 réclamations des consommateurs intégrées dans le baromètre de la DGCCRF, sur quels points on peut concrètement leur donner satisfaction.

Je suis prêt, sur bien des points, à faire évoluer le dispositif proposé. Les consommateurs, rencontrant des difficultés avec tel opérateur dans tel secteur, nous intéressent en tant que tels, qu'ils soient de droite ou de gauche. Si l'on veut résoudre, en urgence, certaines difficultés de nos compatriotes, il convient de rester concret. Je serai donc très attentif à vos réflexions et à vos suggestions, mais je n'entends pas, pour autant, rouvrir des débats qui ont déjà eu lieu.

M. Daniel Fasquelle, Mme Catherine Vautrin et plusieurs membres du groupe SRC m'ont interrogé sur l'article 1er. L'Autorité de la concurrence avait émis une recommandation dont nous avons tenu compte. Mais nous avons aussi consulté les acteurs économiques et les associations de consommateurs, qui ont fait valoir leurs points de vue respectifs. Aussi bien avons-nous voulu éviter tout risque de remise en cause du modèle économique de certains d'entre eux, notamment des opérateurs indépendants. S'il faut accroître la concurrence, il ne faut pas, pour autant, fragiliser les acteurs économiques. Je reste donc prêt à faire encore évoluer le texte : nous devons trouver un point d'équilibre et l'adapter en fonction de l'intérêt du consommateur.

S'agissant de l'optique, les professionnels de la vente à distance ne sont pas défavorables au projet, mais ils souhaitent s'assurer que les mesures d'encadrement ne les pénaliseront pas vis-à-vis du commerce traditionnel. Compte tenu des nouvelles pratiques de vente, qui suscitent d'importants projets d'entreprise, il convient de ne pas concurrencer de façon déloyale le commerce traditionnel. Nous menons donc des réflexions continues, en liaison avec le ministère de la santé, et sommes prêts, là encore, à améliorer notre texte.

Je ne viens pas devant le Parlement avec un texte achevé, mais avec la volonté de d'en compléter le dispositif, sans ouvrir cependant trop de débats à la fois, surtout lorsque d'autres textes ont été adoptés récemment sur des sujets analogues.

Les moyens de la DGCCRF ont été notamment évoqués par MM. Daniel Fasquelle, François Brottes et André Chassaigne, ainsi que par Mme Annick Le Loch. Les nouveaux pouvoirs qui seront conférés à cet organisme, notamment d'injonctions et de sanctions administratives, vont faciliter le travail de ses agents de contrôle. La direction compte aujourd'hui 3 200 collaborateurs, dont 440 travaillent à la surveillance de la qualité alimentaire. Elle a les moyens de remplir toutes ses missions. L'action administrative est souvent plus rapide et plus efficace que l'établissement d'un dossier pénal. Les amendes prévues à ce titre peuvent s'élever jusqu'à 15 000 euros et devraient donc s'avérer dissuasives.

M. Daniel Fasquelle s'est demandé si l'on n'allait pas, ainsi, transférer tout le contentieux de la consommation au juge administratif. Dans la réalité, les agents de la DGCCRF n'infligeront d'amende que dans les cas de délit caractérisé, et pour chaque client subissant le même préjudice. L'acteur économique sera ainsi rapidement incité à faire cesser sa mauvaise pratique et ne le sera guère à porter la question au contentieux.

La question des délais de paiement a été soulevée par Mme Catherine Vautrin. Je suis, bien sûr, favorable à une transposition rapide de la nouvelle directive européenne en cette matière. J'ai demandé à M. Jean-Hervé Lorenzi, président de l'Observatoire des délais de paiement, d'exercer une vigilance particulière envers les produits saisonniers. Nous en dresserons un bilan à la rentrée de septembre. Au vu de celui-ci, nous pourrons éventuellement ajuster les dispositions prévues.

Le libre choix des professionnels, dont ont parlé Mme Catherine Vautrin et plusieurs membres du groupe SRC, à propos notamment de celui des carrossiers et des fournisseurs de pièces détachées, doit être abordé en fonction de son impact sur les secteurs d'activités. La réflexion reste ouverte. Mais, ici aussi, veillons à dégager des solutions équilibrées.

La proposition de Mme Catherine Vautrin concernant les magasins d'usine me paraît très intéressante. Il faut l'étudier avec beaucoup d'attention. Le consommateur a, en effet, le droit de savoir ce qu'il trouve dans ce genre de commerce. La transparence est indispensable.

La question de l'éco-emballage, évoquée ici sous l'angle du consommateur, mérite qu'on l'approfondisse afin de trouver un point d'équilibre entre les différents acteurs. Mais prenons garde de remettre en cause la liberté tarifaire, qui constitue un principe. Peut-être le sujet ne relève-t-il d'ailleurs pas du domaine de la loi.

Mme Annick Le Loch m'a interrogé sur le thème de l'urbanisme commercial, qui a déjà fait l'objet d'une proposition de loi visant à l'intégrer juridiquement dans le droit commun de l'urbanisme. Je suis favorable à cette orientation, qui relève de la compétence du ministre chargé du logement et de l'urbanisme, et qui me semble assez consensuelle. Dans cette même matière, d'autres sujets le sont moins mais n'entrent pas dans l'objet du projet de loi.

Il est vrai que, dans le passé, j'ai soutenu un amendement du groupe UMP sur l'action de groupe. Des amendements similaires avaient d'ailleurs été déposés par tous les groupes. Mais une crise économique sans précédent est survenue entre-temps. Elle a permis que constater que, dans les pays où elle existe, l'action de groupe a eu des incidences économiques douloureuses, néfastes pour la croissance et pour l'emploi. Des secteurs d'activités ont été mis en difficulté. Je ne souhaite pas que, ayant institué l'action de groupe, nous recevions ensuite des parlementaires déplorant les dégâts économiques causés à des entreprises impliquées dans des procédures injustes. Je pourrai, au cours du débat, vous en présenter des exemples concrets, particulièrement aux États-Unis, mais aussi ailleurs, avec parfois des conséquences dramatiques.

De surcroît, le consommateur ne bénéficie guère de ce système, et il en pâtit même parfois. J'avais déjà abordé la question dans un livre publié avant mon entrée au Gouvernement, et considéré que le consommateur attend, par-dessus tout, que le préjudice qu'il subit cesse le plus rapidement possible. Toutes les réclamations parvenant à la DGCCRF confirment cette analyse. Or les procédures judiciaires sont longues. Dans les pays concernés, en cas d'action de groupe, elles peuvent durer de deux à onze ans. Je ne crois donc pas que ce soit le meilleur moyen de répondre à l'attente des consommateurs : leurs intérêts sont souvent moins préservés que ceux des intermédiaires. La meilleure réparation consiste le plus souvent pour eux à limiter au maximum l'impact de leur préjudice. J'invite donc chacun, sur un sujet aussi complexe, à réfléchir encore.

J'ai été très sensible à l'ouverture d'esprit de M. André Chassaigne, que je remercie d'avoir salué ce qui a été fait dans le domaine de e-commerce. Les dispositions du projet de loi ne vont pas à l'encontre de son développement : elles visent au contraire à renforcer la confiance des consommateurs en lui. Ses principaux opérateurs souhaitent promouvoir les bonnes pratiques, conscients qu'ils sont que les mauvaises pénalisent tout le secteur.

Vous avez également reconnu la qualité du travail effectué par l'Observatoire des prix et des marges, créé par l'actuel gouvernement, alors qu'il en était question depuis au moins vingt ans. Il a déjà permis de fournir quelques éclairages sur les produits alimentaires : nous connaissons les marges brutes ; nous devons maintenant cerner aussi les marges nettes.

M. François Brottes a parlé de l'échec de la loi LME dans la mesure où l'Observatoire montrerait que les prix ont augmenté. Or, selon l'INSEE, les prix de détail, en France, des denrées alimentaires, en glissement entre mai 2010 et mai 2011, ont progressé de 1,3% alors que, selon Eurostat, ils se sont accrus de 2,7 % en moyenne en Europe : quand on se compare, on se rassure… La LME a ainsi parfaitement atteint son objectif de mieux maîtriser l'évolution des prix alimentaires.

Pourquoi, comme l'a demandé M. André Chassaigne, ne pas faire la même chose pour le carburant ? C'est exactement ce que j'ai mis en place il y a deux mois et qui a permis de réagir quand nous avons constaté que la baisse du prix du pétrole tardait à se répercuter sur celui de l'essence à la pompe. Les entreprises pétrolières ont, à la suite, pris certains des engagements.

MM. François Brottes et Franck Reynier sont intervenus à propos des indications géographiques protégées (IGP). La question des labels est fondamentale pour notre pays. Car la chance de la France dans la mondialisation réside dans la qualité de ses productions, agricoles et alimentaires, pour lesquelles les normes sont plus exigeantes que dans la plupart des autres pays du monde, y compris européens. Continuons donc de les valoriser en développant les labels !

Je vous invite à visiter, à Rungis, le nouveau pavillon de la volaille qui, pour un investissement de 18 millions d'euros, est passé de 1 000 à 4 000 mètres carrés. Partout les IGP sont présents. À un moment où l'accent est mis sur la sécurité alimentaire, à laquelle la DGCCRF veille très efficacement, il faut poursuivre dans cette voie.

Mais les IGP ne concernaient jusqu'à présent que les produits alimentaires. Nous proposons d'en faire également bénéficier les produits artisanaux. C'est essentiel pour des industries comme le couteau de Laguiole ou celui de Thiers. Cependant, une partie de la fabrication ayant été délocalisée, une inquiétude s'est fait jour quant à la pérennité des accords correspondants. Je ne souhaite pas qu'ils soient remis en cause. Du moment qu'il n'y a pas pillage de savoir-faire, le Gouvernement ne saurait s'opposer à un tel type d'organisation de la production. Nous pouvons rassurer les acteurs économiques à cet égard.

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