Monsieur le Premier ministre, vous n'ignorez pas qu'une proposition de directive relative au traitement des ressortissants des pays tiers en séjour irrégulier sera soumise au vote du Parlement européen ce 18 juin.
Cette proposition, dite « directive retour », a déjà provoqué l'indignation générale de nombreuses organisations attachées au respect des droits de l'homme. (« C'est faux ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Elle a même été qualifiée de « directive de la honte », tellement elle risque de porter atteinte à la dignité humaine. Certaines de ses dispositions invalident, en effet, non seulement des principes fondamentaux du droit, mais aussi des valeurs essentielles sans lesquelles toute civilisation renoncerait à elle-même ! Et quand une civilisation commence à renoncer à elle-même, c'est une porte qui s'ouvre vers de redoutables régressions.
Quand on y découvre qu'une personne qui n'a en réalité commis aucun délit pourra éventuellement être détenue jusqu'à dix-huit mois, quand on lit que cette même personne pourra être bannie de l'espace européen durant cinq ans, sans véritable recours face à une telle « damnation », quand on lit qu'il sera possible d'expulser n'importe qui n'importe où, sans tenir compte du pays d'origine, et que des enfants mineurs pourront être soumis au même traitement, eh bien, monsieur le Premier ministre, on mesure à quel niveau notre phobie des migrants nous fait descendre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et sur quelques bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine. – Protestations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)