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Intervention de Dominique Raimbourg

Réunion du 23 juin 2011 à 15h10
Participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et jugement des mineurs — Article 10, amendements 36 111

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDominique Raimbourg :

Nous étions deux députés à siéger au sein de la commission Varinard, M. Geoffroy et moi-même. Je parle sous le contrôle de notre collègue et si ma mémoire me fait défaut, il me corrigera. La préconisation de créer un tribunal correctionnel pour mineurs a été la plus controversée au sein de la commission et a fait l'objet d'un débat très vif, au point de n'avoir été votée, si mes souvenirs sont bons, que par une voix de majorité. (M. Geoffroy fait un signe de dénégation.) M. Geoffroy fait signe que non, il est possible que ma mémoire me fasse défaut ; en tout cas, j'y insiste, cette préconisation aura été la plus controversée.

Par ailleurs, la création de ce tribunal est contraire à la fois à la lettre et à l'esprit de l'ordonnance de 1945. Contraire à la lettre car la cour d'assises des mineurs, qui est l'instance qui se rapproche le plus de la cour d'assises des majeurs, est composée autant que possible – toujours, dans les faits – de deux juges pour enfants et d'un président de cour qui ne l'est pas. Ainsi, les juges pour enfants sont majoritaires parmi les magistrats professionnels.

Ensuite, l'instauration d'un tribunal correctionnel pour mineurs est contraire à l'esprit de l'ordonnance de 1945 dont l'économie est relativement simple, de nature un peu paternaliste – et ce terme n'est pas une critique dans ma bouche. Dans le cas d'une famille qui a éprouvé des difficultés à éduquer l'enfant en cause, on chargera un juge des enfants de se substituer à elle dans une certaine mesure. Il intervient du début à la fin de la procédure : il est juge de l'instruction, prononce le jugement et, depuis la loi Perben – heureuse innovation –, juge de l'application des peines.

À cause de la création du tribunal correctionnel pour mineurs, le mineur va être renvoyé devant le premier tribunal disponible. Il sera donc jugé par un juge des enfants qui, certes, en aura la qualité, mais ne sera pas celui qui le suit habituellement. Un mineur difficile, rôdé aux juridictions, pourra, devant un tribunal qui le connaît mal, jouer de ses astuces, promettre qu'il ne recommencera jamais et, ainsi, « rouler dans la farine », si vous me pardonnez l'expression, des juges qui, je le répète, le connaissent moins bien que le juge qui le suit habituellement.

Dernière observation : si nous sommes attachés au respect de l'ordonnance de 1945, ce n'est pas dans l'esprit de la révérer, voire de la sanctifier. Seulement, pour que le suivi d'un mineur soit efficace, il doit être réalisé continûment par le même juge qui, passez-moi de nouveau l'expression, le « marque à la culotte » et qui ne se laisse pas abuser par les arguments d'un jeune malin habitué des tribunaux.

Voilà pourquoi nous sommes opposés à la création de tribunaux correctionnels pour mineurs. Nous savons par expérience que ce type de procédures va s'étendre plus largement que nous ne pensons et nous pouvons craindre qu'il ne devienne le droit commun.

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