Notre Assemblée est amenée cette semaine a examiner un texte fondamental quant au fonctionnement de notre système judiciaire. Il témoigne de la mobilisation de notre Gouvernement à adapter notre justice à une société en constante évolution qui nous invite, en tant que législateurs, à y travailler de manière continue.
Je tiens donc ici à saluer votre sereine détermination, monsieur le Garde des Sceaux, à mener cette réforme qui reprend, pour son volet sur la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale, un engagement que le Président de la République, soucieux de rapprocher les citoyens de l'oeuvre de justice, a pris lors de la campagne présidentielle.
Cette volonté devrait, à mon sens, être partagée par tous eu égard à la mobilisation récurrente de nos concitoyens pour une justice plus compréhensible, plus accessible et plus rapide.
Depuis septembre dernier, j'ai eu l'occasion, monsieur le ministre, de vous interroger à plusieurs reprises sur le fonctionnement de notre système pénal et de vous dire combien il était important de mener une réflexion pour faire évoluer certaines méthodes au bénéfice de tous.
Un récent sondage atteste de cette nécessité en montrant que plus de 72 % des Français ne sont pas satisfaits de leur justice.
Tout en saluant le travail considérable, difficile, et profondément humain effectué par les professionnels du monde judiciaire, chacun s'accorde à reconnaître que des dysfonctionnements existent et que la gestion de la justice est perfectible. Tout ce qui peut la rendre plus efficace, plus lisible, plus compréhensible doit être encouragé.
Il en est ainsi du dispositif visant à associer des citoyens aux magistrats professionnels au tribunal correctionnel et au niveau de l'application des peines. En choisissant, dans un premier temps, de le mettre en oeuvre de façon expérimentale, le Gouvernement fait preuve de pragmatisme, attendant le retour d'expérience avant d'étendre le dispositif à tout le territoire.
Avec mon collègue Éric Ciotti – auquel le Président de la République a confié une mission sur le sujet – nous avons mené de très nombreuses auditions sur l'exécution et l'aménagement des peines – pour ma part je travaillais sur la question pour le groupe UMP. À cette occasion, nous avons pu constater l'investissement des professionnels au service de la justice. Personne n'a jamais voulu le remettre en cause ni, encore moins, stigmatiser une corporation qui fait un travail extraordinaire dans notre société et qui est garante de la cohésion sociale.
Cependant, force est de constater que cet investissement, pourtant réel, ne trouve pas d'échos au sein de la population. C'est pourquoi l'association de nos concitoyens aux magistrats contribuera non à déprécier ou à concurrencer la fonction et le rôle des magistrats, mais bien à enrichir la procédure en même temps que la démocratie participative. Il convient donc de soutenir la création du tribunal correctionnel dans sa formation citoyenne.
Au stade de l'application des peines, la présence des citoyens est, à mon sens, également pleinement justifiée dans la mesure où les décisions prises sont susceptibles de remettre en cause une condamnation prononcée par un tribunal souverain au nom du peuple français, et de porter ainsi atteinte au droit de la victime d'être protégée. Si l'on prend le cas d'une condamnation prononcée par une cour d'assises, le parallélisme des formes suffit à lui seul à justifier la présence de citoyens assesseurs au stade de l'application des peines.
J'estime, en conséquence, que dans ce premier volet du projet de loi, le Gouvernement nous propose une réforme innovante que je soutiendrai pleinement.
Les travaux du Sénat et de la commission des lois de notre assemblée ont enrichi le texte initial en introduisant notamment des mesures visant à encadrer davantage la libération conditionnelle et à assurer une meilleure continuité de la chaîne pénale au niveau de l'exécution des peines entre le milieu ouvert et le milieu fermé. J'adhère avec conviction à ces nouvelles mesures que je défendais, pour certaines, dans une proposition de loi, cosignée par de nombreux députés de notre majorité, visant à lutter contre la récidive.
Ces avancées vont dans le bon sens, notamment en ce qui concerne le renforcement, introduit à l'initiative du rapporteur du Sénat, de l'évaluation de la dangerosité avant toute décision d'aménagement de peine. Il est proposé de renforcer les conditions du prononcé de la libération conditionnelle des personnes condamnées à de longues peines en développant les évaluations pluridisciplinaires de dangerosité. Cette mesure illustre une volonté de lutter efficacement contre la récidive en empêchant de placer à nouveau en milieu ouvert des personnes condamnées susceptibles de constituer une menace pour nos concitoyens. Pour ma part, j'ai été pleinement sensibilisé à ce mécanisme d'évaluation par de nombreux collègues, parmi lesquels Jean-Paul Garraud qui a beaucoup oeuvré pour que le critère de dangerosité soit davantage pris en compte, ainsi que par des psychiatres spécialisés que j'ai pu rencontrer au cours des auditions.
Dans ma proposition de loi, cette évaluation pluridisciplinaire devait être réalisée sur plusieurs semaines et étendue aux condamnées à une peine privative de liberté d'une durée égale ou supérieure à dix ans pour un crime ou un délit pour lequel le suivi socio-judiciaire était encouru. Dans un premier temps, le champ d'application initialement proposé au Sénat a été redéfini par le Gouvernement, puis il l'a été par notre rapporteur au motif que s'il convenait, bien entendu, de développer ces évaluations, les rendre obligatoires risquerait d'engorger les structures qui seront seulement au nombre de deux – l'une se trouve à Fresnes et une autre devrait bientôt ouvrir.
Monsieur le garde des sceaux, je vous sais très favorable au renforcement du suivi individualisé des personnes dangereuses et vous êtes également mobilisé en faveur du développement de centres d'évaluation. Aussi je plaide pour l'ouverture de centres régionaux. Ce serait donner un signe fort que de retenir le département du Nord pour l'installation d'une telle structure, véritable outil au service de la lutte contre la récidive.