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Intervention de Nora Berra

Réunion du 22 juin 2011 à 15h00
Droits et protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques — Discussion générale

Nora Berra, secrétaire d'état chargée de la santé :

Madame la présidente, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les députés, le texte réformant la loi relative aux droits et à la protection des personnes hospitalisées en raison de troubles mentaux et à leurs conditions d'hospitalisation, en date du 27 juin 1990, revient aujourd'hui dans cet hémicycle, en troisième lecture.

Au cours de vos deux premières lectures, vous avez approuvé les dispositions essentielles de ce projet de loi, que vous avez également su compléter pour le bénéfice de nos concitoyens. Le Sénat a travaillé dans le même esprit, et le Gouvernement ne peut que saluer la convergence entre vos deux assemblées.

La psychiatrie a besoin de débat ; elle a aussi besoin de consensus. Les travaux parlementaires ont pleinement répondu à ces deux exigences.

Un nouveau passage devant l'Assemblée nationale est néanmoins nécessaire pour adapter le texte à la décision prise le 9 juin dernier par le Conseil constitutionnel, en réponse à une question prioritaire de constitutionnalité. Le Conseil a indiqué que l'hospitalisation d'office, prévue par la loi de 1990, ne pouvait être maintenue au-delà de quinze jours sans intervention d'une juridiction de l'ordre judiciaire.

Cette décision est similaire à celle qu'il a prise au mois de novembre dernier au sujet des personnes hospitalisées à la demande d'un tiers. Sur ce point, le texte que vous avez examiné jusqu'à présent est donc tout à fait conforme à notre Constitution. Toutefois, dans sa décision du 9 juin, le Conseil a relevé un point supplémentaire qui justifie un complément d'examen : la loi de 1990 présente un manque, puisque, contrairement à ce qui se passe lors l'hospitalisation à la demande d'un tiers, si le certificat médical établi dans les vingt-quatre heures qui suivent l'admission en hospitalisation d'office ne confirme pas que l'intéressé a besoin de cette prise en charge, il n'est pas prévu de réexaminer la situation de la personne.

Le Conseil constitutionnel a estimé qu'en l'absence de nouvel examen, susceptible de confirmer que l'hospitalisation n'est plus nécessaire, notre droit n'assure pas que l'hospitalisation d'office est réservée aux cas pour lesquels elle est strictement prévue. Je vous rappelle en effet qu'une telle mesure doit être « adaptée, nécessaire et proportionnée à l'état du malade ainsi qu'à la sûreté des personnes ou la préservation de l'ordre public. »

Le Conseil a donc déclaré contraires à la Constitution l'ensemble de l'article L. 3213-1 du code de la santé publique, et fixé au 1er août 2011 la prise d'effet de la déclaration d'inconstitutionnalité.

Le Gouvernement entend donc préciser ce point, et a donc défendu au Sénat un amendement sur ce sujet.

Il s'agit de l'article additionnel 3 bis, qui vous est présenté aujourd'hui. Le Gouvernement souhaite que le caractère central de l'examen médical ait une portée générale et qu'ainsi, à tout moment, au cours d'une hospitalisation complète d'office, le préfet mette fin à la mesure ou la transforme en forme alternative à l'hospitalisation complète, dès lors que le psychiatre de l'établissement lui en fait la demande, et que cette demande est confirmée par un deuxième avis.

Le Gouvernement souhaite également étendre ce principe aux personnes hospitalisées pour irresponsabilité pénale et aux personnes soignées en unité pour malades difficiles, dans le respect des procédures particulières de sortie prévues par le projet de loi.

De telles dispositions complètent le principe de saisine automatique du juge des liberté et de la détention, déjà prévu dans le texte, lorsque le psychiatre propose la levée de la mesure d'hospitalisation complète – ce que l'on appelle une « sortie sèche » – et que le préfet ne suit pas cet avis. Lorsque les deux avis médicaux s'accordent sur la sortie, celle-ci devra être ordonnée par le préfet. Lorsque les deux avis médicaux seront divergents, c'est-à-dire lorsque la proposition de sortie émise par le psychiatre ne sera pas confirmée par son confrère, si le préfet n'ordonne pas la sortie, l'avis du juge des liberté et de la détention sera requis.

Par ailleurs est soumis à votre nouvel examen l'article 6, relatif à l'organisation géographique de la prise en charge psychiatrique. Votre assemblée a veillé en première lecture, grâce au travail de son rapporteur, à rappeler la dimension territoriale de la mission de service public dévolue aux établissements, ainsi que le rôle des agences régionales de santé.

Le code de la santé publique prévoit, je vous le rappelle, que chaque établissement autorisé en psychiatrie et participant à la lutte contre les maladies mentales est responsable de celles-ci dans les secteurs psychiatriques qui lui sont rattachés. Le Sénat a donc tenu à confirmer que les projets des établissements chargés de la mission de service public intègrent les modalités de coordination avec cette sectorisation psychiatrique. Il s'agit d'une précision utile, qui rappelle une fois encore l'importance que nous attachons à l'organisation territoriale de notre système de santé. La psychiatrie a été la première à penser cette responsabilité territoriale, et cette conception de la santé publique que nous avons consacré dans la loi HPST lui fait honneur.

Le texte donne donc aujourd'hui la possibilité aux équipes de psychiatrie de soigner les patients dans la cité ; il comble le vide de l'absence de tiers, qui excluait du soin toute personne isolée ; il consacre le caractère sanitaire des mesures de soins et l'apport des équipes pluridisciplinaires ; il stimule la coordination des acteurs locaux et le soutien aux aidants, levier essentiel pour la qualité des soins ; il facilite enfin l'exercice des droits pour tous, y compris les personnes les plus fragiles.

Vous m'avez interrogée sur la mise en oeuvre de ces dispositions législatives. Les textes réglementaires qui permettront leur application sont en cours de préparation, de même que plusieurs outils pédagogiques servant à expliquer la complexité de loi et qui seront diffusés dès la semaine prochaine. Il s'agit de fiches techniques, de courriers type, de fiches de procédure qui faciliteront le travail des professionnels. Un site internet dédié sera également ouvert.

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