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Intervention de Bernard Perrut

Réunion du 16 juin 2011 à 9h30
Alternance et sécurisation des parcours professionnels — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBernard Perrut :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, en 2008, dans notre pays, le taux de chômage était passé sous la barre des 7,5 %, le niveau le plus bas depuis 25 ans, et la France repartait vers le plein emploi ; mais la crise mondiale a brutalement changé la donne. La France a certes été moins touchée que les autres pays, mais elle n'a pas été épargnée par la plus importante crise financière, monétaire, économique et sociale des quatre-vingts dernières années.

La réaction immédiate du Président de la République, la stratégie économique retenue et les actions du Gouvernement, soutenu par notre majorité, ont, faut-il le rappeler, porté leurs fruits : les banques ont été sauvées pour protéger l'épargne des Français ; trois millions d'emplois ont été créés ou préservés, grâce la mesure « zéro charge » qui a entraîné 1,2 million d'embauches dans les TPE, au recours au chômage partiel, qui a protégé 530 000 salariés, à la montée en charge des contrats aidés ou encore grâce à la prime à la casse, qui a soutenu le secteur automobile et ses quelque 400 000 emplois directs.

On pourrait encore évoquer le sauvetage de 30 000 entreprises, grâce à la mobilisation de 18,5 milliards d'euros en faveur des entreprises en difficulté, ou la relance par l'investissement, avec les 39 milliards du plan de relance et les 35 milliards du grand emprunt, qui ont donné de l'activité à des milliers de salariés, tout en préparant la France du xxie siècle et les emplois de demain.

Aujourd'hui, les indicateurs passent au vert : la croissance revient, la reprise s'accélère et la France devrait tenir son objectif de 2 % – voire plus – de croissance pour 2011. Les dépenses d'investissement sont en hausse, les exportations s'accélèrent, la production manufacturière enregistre une hausse inédite depuis trente ans ; bref, ces chiffres ne sont ni le fruit du hasard ni un effet d'aubaine.

Cette reprise de l'activité s'est directement traduite par une baisse du chômage, puisque la France a enregistré pour le quatrième mois consécutif une baisse du nombre de demandeurs d'emploi : 53 400 chômeurs en moins sur les quatre premiers mois de 2011 et autant de familles qui ont repris espoir ! Certes, c'est insuffisant, me rétorquera-t-on sur certains bancs, mais c'est un premier pas et nous allons continuer.

Les jeunes bénéficient eux aussi de cette reprise, avec une baisse de l'ordre de 7 % sur un an du nombre de jeunes inscrits à Pôle emploi. Mais il y a encore beaucoup à faire, et c'est pourquoi cette proposition de loi dont Gérard Cherpion est le rapporteur est importante, car il est crucial de renforcer les mesures destinées à aider les jeunes. Oui, il faut les aider à assurer une transition réussie de l'école vers le monde du travail et à prendre un bon départ dans leur carrière professionnelle.

La question de l'insertion des jeunes sur le marché du travail est d'autant plus préoccupante que leur situation est comparativement moins bonne en France que dans de nombreux pays européens. Regardons ce qui se passe en Allemagne, où trois fois plus de jeunes sont en apprentissage. Autre culture, autres résultats, me direz-vous, mais pourquoi ne ferions-nous pas aussi bien que nos voisins ?

Notre système d'orientation n'est il pas à revoir ? Certains articles de ce texte vont dans le bon sens, lorsqu'ils parlent de découverte des métiers et des formation professionnelles, ou lorsque, avec pragmatisme, ils assouplissent les conditions d'âge pour l'entrée en apprentissage.

Voila pourquoi le Président de la République a annoncé un plan de mobilisation pour l'emploi, le 1er mars, avec pour objectif de développer l'alternance avec 800 000 contrats d'ici à 2015, et la mise en oeuvre de dispositions qui permettront cette évolution : la mise en place d'un soutien aux PME qui s'engagent dans l'alternance, l'augmentation de l'offre en CFA, la simplification des procédures, l'instauration d'un système de bonus-malus et le relèvement du quota d'alternants porté à 4 % au lieu de 3 %.

Plusieurs de ces mesures trouvent déjà une solution réglementaire, avec des décrets – déjà pris ou à venir – concernant les aides aux entreprises, la réduction de l'ancienneté pour les maîtres d'apprentissage ou la part de la taxe d'apprentissage affectée réellement à ce but.

Je ne saurais oublier les partenaires sociaux, qui ont engagé, le 8 février 2011, une négociation sur l'emploi des jeunes, laquelle a déjà abouti à trois accords, notamment celui du 7 avril 2011, qui concerne l'offre d'accompagnement individuelle, renforcée pour 90 000 jeunes, dont 20 000 décrocheurs.

Nous savons que l'alternance est surtout développée dans les petites structures, puisque 80 % des apprentis se forment dans des entreprises de moins de cinquante salariés. Il y a donc des marges de manoeuvre lorsqu'on connaît le très faible taux d'alternants dans les entreprises de plus de 250 salariés.

Un tel sujet suscite en tout cas de vraies questions de fond. Notre système de formation ne fait-il pas la part trop belle à la théorie ? Nos entreprises sont réticentes à recruter des jeunes sans expérience professionnelle et, de leur côté, les jeunes peinent à acquérir cette expérience faute de pouvoir accéder au monde de l'entreprise. Il faut donc agir et réagir.

Disons le clairement : l'alternance est une bonne réponse pour sortir de ce cercle vicieux. Pour le jeune, c'est l'assurance d'accéder à une formation débouchant sur un diplôme, d'acquérir une expérience et de bénéficier d'une rémunération ; pour l'entreprise, c'est la possibilité de former elle-même des salariés à ses métiers et aux compétences qui lui sont nécessaires ; pour la collectivité enfin, c'est un taux élevé d'insertion dans l'emploi à l'issue de la formation : plus de 70 % pour l'apprentissage, contre 50 % pour les formations classiques.

Cette proposition de loi a pour but de reconnaître et de valoriser l'apprenti, de lui donner un véritable statut en améliorant ses conditions de vie, pour qu'il accède aux mêmes avantages que les étudiants : juste reconnaissance. Il bénéficiera ainsi d'une carte portant la mention « étudiant des métiers ».

Nous voulons faciliter la prise de contact entre alternants et employeurs, et le service dématérialisé gratuit, véritable portail de l'alternance, va aussi permettre à l'employeur de développer les démarches de saisie en ligne, notamment pour la paie.

Pour favoriser l'apprentissage dans les domaines où l'activité est saisonnière, comme le tourisme, il est proposé que deux employeurs distincts puissent s'associer dans l'organisation d'un apprentissage – c'est une évolution nécessaire.

Mais de grâce, mes chers collègues, ne considérons jamais l'apprentissage comme une voie alternative en cas d'échec scolaire ; ce n'est pas un choix de formation par défaut, mais un véritable choix des compétences et des talents !

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