Madame la présidente, monsieur le ministre, chers collègues, je profite de ce débat pour prolonger les échanges que nous avons eus dans la nuit de vendredi à samedi sur les questions d'indemnisation de victimes des accidents médicaux, et pour présenter un amendement vous demandant un rapport, ce qui est une manière de lancer un débat concernant la prise en charge des dommages causés par l'administration de médicaments bénéficiant d'un bon rapport bénéfices-risques.
La loi du 4 mars 2002 sur les droits des malades a profondément modifié le sort des victimes des accidents médicaux de toute nature, en créant une procédure d'indemnisation afin de réparer le préjudice causé par un accident médical, qu'il soit lié à l'erreur d'un professionnel de santé ou aux risques imputables à tout acte médical, ce que l'on appelle l'aléa thérapeutique.
De fait, les commissions régionales de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux ont permis aux victimes d'accidents médicaux d'être, pour la plupart, indemnisées dans des délais et des conditions satisfaisantes.
Après examen du préjudice corporel par des experts et dans le respect du principe du contradictoire, une décision est prise sous l'autorité d'un magistrat tendant à reconnaître la réalité du préjudice et le lien de causalité entre ce préjudice et l'acte médical, puis à évaluer le montant financier propre à réparer le dommage. Les assureurs qui participent à la procédure acceptent, en règle générale, la proposition de dédommagement émise par l'ONIAM.
Toutefois, presque dix ans après l'adoption consensuelle de cette loi portée par la gauche, il est temps d'améliorer le dispositif en s'inspirant de celui du Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante.
Ce dispositif a permis d'indemniser le risque diffus, celui qui peut être statistiquement peu probable et pour lequel il est parfois difficile d'établir avec certitude l'existence d'un lien de causalité direct, donc exclusif, entre l'état de santé et un acte médical.
Il revient à l'État de prendre en compte, dans certains cas et sous certaines conditions, le doute scientifique pour permettre la prise en charge de l'ensemble des personnes qui se trouvent exposées à un risque accepté. Le doute, dès lors qu'il est fondé et qu'il apparaît impossible à lever, ne doit pas être un obstacle à la réparation d'un préjudice.
À titre d'exemple, les personnes qui ont développé une sclérose en plaques après une vaccination contre l'hépatite B ont pu être indemnisées par l'État, dès lors que la vaccination avait un caractère obligatoire, et sans que le défaut de fabrication du produit ait pu être établi scientifiquement. En revanche, les personnes qui ont présenté les mêmes symptômes après une vaccination analogue, mais hors du cadre de la vaccination obligatoire, n'ont pas pu être indemnisées car il leur revient d'établir une relation de causalité directe entre leur handicap corporel et la vaccination, ce qui, de fait, relève de l'ordre de l'impossible. Le doute scientifique favorise le fabricant, pas la victime, ce qui n'est guère éthique.
Le dispositif d'indemnisation des victimes d'accidents médicaux présente une faille : le risque diffus. Si un produit de santé bénéficie d'un rapport bénéfices-risques favorable à son maintien sur le marché, il importe que le risque, accepté au nom de l'intérêt général, soit pris en charge par un dispositif d'indemnisation financé par les fabricants.
Le dispositif d'indemnisation des victimes d'accidents médicaux présente donc une faille : le risque diffus. Si un produit de santé bénéficie d'un rapport bénéfices-risques favorable à son maintien sur le marché, il importe que le risque, accepté au nom de l'intérêt général, soit pris en charge par un dispositif d'indemnisation financé par les fabricants.
En vous demandant un rapport qui établisse les bases sur lesquelles l'indemnisation des accidents médicaux rares pourrait être améliorée, nous entendons prolonger l'effort de solidarité dont est porteur, pour les seules victimes du Mediator, l'article 22 du projet de loi de financement rectificative. Il serait juste que ceux qui, en petit nombre, subissent des aléas thérapeutiques pour un médicament qui, par ailleurs, profite à une majorité de patients bénéficient également de la solidarité nationale.
C'est la raison pour laquelle, monsieur le ministre, le groupe socialiste a déposé un amendement demandant un rapport qui prépare le débat par lequel cette action de solidarité pourra s'exercer envers les victimes du risque diffus de l'aléa thérapeutique. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)