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Intervention de Jean Mallot

Réunion du 14 juin 2011 à 21h30
Projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2011 — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean Mallot :

Monsieur le président, monsieur le ministre du travail, de l'emploi et de la santé, monsieur le président de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le Gouvernement nous présente un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale à vocation unique. Il s'agit en effet de concrétiser la dernière en date des lubies du Président de la République – la fameuse prime de 1 000 euros – et de prévoir à cette fin des exonérations sociales qui viendront, une fois de plus, pénaliser les finances publiques. En réalité, nous le verrons ultérieurement, cette prime annoncée est un miroir aux alouettes.

Sur la forme, nous observons que le Gouvernement anticipe sur la révision constitutionnelle qu'il a lancée pour, dit-il, assurer l'équilibre des finances publiques. Il est en effet bien placé pour avoir un avis sur la question, lui qui creuse les déficits avec constance et méthode depuis 2007 au moins. Puisque, désormais, selon le Gouvernement et sa majorité, les lois de finances et les lois de financement de la sécurité sociale doivent avoir une sorte de monopole des mesures ayant une incidence budgétaire et financière, nous voilà donc saisis d'un véritable PLFSS, dans toute son ampleur et sa splendeur, mais dont la plupart des articles servent uniquement à préciser que les objectifs fixés et les équilibres annoncés à l'automne dernier, lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011, demeurent « inchangés ». Quant aux articles qui ont pour objet de procéder à des ajustements, chacun conviendra qu'ils auraient pu attendre l'automne prochain.

Mais l'anticipation sur la révision constitutionnelle ne va pas plus loin que la présentation formelle de votre projet de loi, monsieur le ministre. Pour la réduction des déficits, on verra plus tard. Il est vrai que cette révision constitutionnelle est encore en navette au Sénat – d'où il n'est pas évident qu'elle sorte en bon état, semble-t-il – et le Gouvernement, si prompt à afficher sa volonté de rétablir l'équilibre des comptes, utilise ce délai pour se complaire encore un peu dans les déficits, voire pour les creuser davantage.

Nous l'avons d'ailleurs constaté la semaine dernière, puisque la réduction de l'impôt de solidarité sur la fortune produira un manque à gagner de près de deux milliards d'euros par an pour le budget de l'État, que le bouclier fiscal, devenu inutile à défaut d'avoir été supprimé, ne compensera qu'à hauteur de 720 millions. Il restera donc 1,1 milliard à financer par quelques ressources incertaines et par une augmentation de la dette, c'est-à-dire par l'impôt de la plupart des contribuables, notamment la TVA, payée par tous. Merci, monsieur Sarkozy !

S'agissant des finances sociales, ce PLFRSS non seulement ne résout rien, mais renforce notre inquiétude. Comme vous le savez, un projet de loi de financement de la sécurité sociale se lit à l'envers, en commençant par les annexes. Or, que lit-on dans l'annexe de celui-ci ? Tout d'abord, on constate que les hypothèses économiques ont été ajustées par rapport à décembre dernier : la progression de la masse salariale est revue à la hausse pour 2011 – 3,2 % au lieu de 2,9 % –, mais à la baisse pour 2012 – 4,2 % au lieu de 4,5 % – ; la croissance du PIB pour 2012 se tasse – 2,25 % au lieu de 2,5 % –, ce qui est cohérent avec le programme de stabilité européen transmis récemment à Bruxelles, pour repartir à 2,5 % les années suivantes. La prévision d'augmentation de la masse salariale, dont on connaît l'importance pour les ressources de la sécurité sociale, reste très ambitieuse au-delà de 2012, puisqu'elle est maintenue à 4,5 %.

Surtout, cette annexe nous informe que vous laissez filer les déficits, sans perspective aucune de réduction notable, encore moins de retour à l'équilibre, d'ici à 2014. On se souvient que, s'agissant de la branche vieillesse, vous avez transféré les déficits à venir – une nouveauté – à la Caisse d'amortissement de la dette sociale et que vous avez décidé de dilapider par anticipation le Fonds de réserve des retraites. Les générations suivantes paieront donc plusieurs fois : les retraites et la dette. Pour ce qui est des autres branches – la maladie et la famille, pour l'essentiel –, votre tableau fait ressortir un déficit total cumulé de 45 milliards d'euros environ d'ici à 2014. Je pose donc à nouveau la question, monsieur le ministre, puisque je n'ai pas obtenu de réponse depuis l'automne dernier : comment comptez-vous les financer ? Vous contenterez-vous de léguer cette charge à celles et ceux, quels qu'ils soient, qui vous succéderont en 2012 ? Certainement.

Dans sa partie dépenses, votre PLFRSS maintient l'objectif national de dépenses d'assurance maladie, le fameux ONDAM, de l'ensemble des régimes obligatoires de base et souligne que ce dernier a été respecté en 2010. Certes, mais à quel prix pour les patients et leur santé ? Le système étant rongé par les dépassements d'honoraires, qui ont explosé – le taux de dépassement moyen étant passé de 37 % en 2000 à 54 % en 2010 –, par les franchises médicales et l'augmentation des forfaits de toutes sortes, le régime général de prise en charge ne couvrant plus qu'à 55 %, en dehors des affections de longue durée, les dépenses des patients, qui, pour le reste, sont renvoyés vers leur assurance complémentaire, nos concitoyens sont de plus en plus nombreux à reporter des soins, voire à y renoncer, notamment pour ce qui est des soins dentaires ou de l'optique.

L'état de santé de la population française se dégrade, et que faites-vous, monsieur le ministre ? Vous serrez encore la vis, en gelant 400 millions d'euros de crédits hospitaliers, poussant ainsi les établissements de santé à de nouvelles décisions douloureuses de suppression de postes. Jusqu'où irez-vous ?

J'en viens maintenant au dispositif principal de ce texte, qui fait l'objet de l'article 1er. Le Président de la République s'était autoproclamé, pendant la campagne de 2007, candidat de l'augmentation du pouvoir d'achat ; l'échec, sur ce plan comme sur d'autres, est patent. L'alibi de la crise ne tient pas pour expliquer les mauvaises performances de notre économie. À tout moment, la conjoncture économique internationale est une donnée, qui s'impose à nous. La clé de la réussite, pour un gouvernement, c'est de savoir mener une politique économique nationale et européenne qui nous permette de faire mieux que nos voisins.

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