Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, je suis intervenu à de nombreuses reprises, depuis des années, et j'ai multiplié les amendements pour modifier ou supprimer l'ISF et le bouclier fiscal. Aujourd'hui, nous y venons. Il n'est jamais trop tard pour bien faire et je tiens à souligner la qualité du projet qui nous est soumis, un projet d'envergure dont l'équilibre subtil me paraît techniquement et politiquement judicieux.
La suppression de la première tranche permettra d'exonérer de l'ISF plus de 300 000 contribuables qui n'y sont assujettis qu'en raison de l'augmentation des prix des biens immobiliers – des prix virtuels, faut-il le rappeler, quand l'impôt, lui, est bien réel, et sans rapport avec les revenus. Dans le pire des cas, cet impôt, ajouté aux autres, pouvait conduire à de véritables expropriations de fait.
La simplification des tranches et leur ajustement pour tenir compte de la baisse des taux d'intérêt réels constituent aussi une mesure de simple bon sens, avec un taux de 0,25 % entre 1,3 et 3 millions d'euros et de 0,5 % au-delà. Cette simplification a l'inévitable inconvénient de créer des effets de seuil que des dispositions particulières viennent à juste titre atténuer.
À recettes comparables, le principe de justice fiscale sort renforcé de cette réforme. Le durcissement des règles applicables aux grosses successions, la suppression du bouclier fiscal et du plafonnement de l'ISF sont des avancées majeures.
Pour autant, nous n'échapperons pas à la réforme de l'impôt sur le revenu que recommande le Conseil des prélèvements obligatoires. Si je n'ai pas cosigné l'amendement visant à créer une nouvelle tranche supérieure, c'est parce que l'accumulation des niches fiscales lui enlève beaucoup de son efficacité et qu'il faut une approche globale de cette question.
L'article 14 qui institue un plafonnement de la taxe foncière afférente à l'habitation principale en fonction du revenu vient heureusement compenser la suppression du bouclier fiscal pour les petits revenus. On peut toutefois s'interroger sur le taux de 50 %, qui risque d'être excessif pour certains contribuables. J'ai déposé un amendement pour remédier à ce qui me semble être un défaut.
La création d'une exit tax pose plusieurs questions, qui ont été développées par Charles de Courson et sur lesquelles je ne reviendrai pas. J'observerai simplement observer que nous sommes prêts à taxer les Français qui vont s'installer à l'étranger, mais comment se fait-il que d'autres, qui sont partis pour des raisons professionnelles, ne bénéficient pas des avantages sociaux pour lesquels ils ont cotisé ? Comment se fait-il, par exemple, qu'une salariée d'un grand groupe, accouchant à l'étranger où elle est partie travailler, ne puisse pas bénéficier de la sécurité sociale alors qu'elle a cotisé en France pendant de longues années ? Cette personne travaille dans le groupe Renault, il ne s'agit donc pas d'évasion fiscale.
L'amendement du rapporteur général relatif au financement des transports en Île-de-France est très important. Même si cela peut faire débat, je ne suis pas hostile par principe au relèvement de la redevance pour financer la modernisation des réseaux de transports en commun ; encore faut-il en corriger rapidement les défauts, qui sont dénoncés par les entreprises.
Premier défaut : la brutalité de l'augmentation, qui fait l'objet de l'un de mes deux sous-amendements.
Deuxième défaut : le zonage, parfois irrationnel. Comment peut-on mettre Pantin, Juziers et la petite commune rurale sans transports en commun de Saint-Rémy-l'Honoré dans la même zone ? Il est nécessaire de revoir le zonage en fonction de la qualité de la desserte, car la redevance est la contrepartie d'un service. C'est l'objet de mon second sous-amendement qui, je l'espère, sera approuvé par le Gouvernement.
Troisième défaut : les exonérations au titre de la dotation de solidarité urbaine et du Fonds de solidarité des communes de la région Île-de-France. Comme elles s'ajoutent à d'autres dispositifs et que leurs montants sont de facto très fortement accrus, ces exonérations transforment un outil de financement des transports en commun en un outil de déménagement du territoire – j'emploie l'expression à dessein – de l'Ouest vers l'Est parisien, alors que ce dernier bénéficie désormais d'une dynamique positive. J'y reviendrai plus en détail lors de la discussion de l'article.
L'une des autres mesures importantes que je soutiens est la modulation du taux de la contribution supplémentaire à l'apprentissage pour inciter les entreprises de plus de 250 salariés à développer les formations en alternance, dont chacun connaît les vertus. Une autre disposition incitative est fort heureusement prévue pour les PME, qui emploient le gros des salariés. J'espère que beaucoup de jeunes pourront ainsi découvrir le travail en entreprise.
Quant à l'évolution de la CSPE, prévue par l'article 21, elle soulève deux questions : l'apurement du manque à gagner d'EDF, qui représente d'ores et déjà une somme considérable, et l'incertitude sur des dispositions qui ne garantissent pas durablement l'équilibre économique du système.
Je voudrais aussi poser quelques jalons pour l'avenir car, en matière fiscale, il faut aller de l'avant et engager rapidement les réformes qui s'imposent pour dynamiser l'économie, améliorer le pouvoir d'achat des salariés et faire reculer le chômage. Nous devons créer une TVA sociale, ou un dispositif équivalent, pour renouer avec la croissance comme nous y invitent de nombreux experts, par exemple dans le rapport de l'OCDE du 11 avril dernier ou dans le comparatif France-Allemagne de la Cour des comptes.
En conclusion je voterai ce projet de loi qui va dans le bon sens et j'espère, monsieur le ministre, que vous continuerez d'avancer dans la voie des réformes. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)