Je vois d'ailleurs vos réactions, qui manifestent votre conviction profonde.
Mais je m'étonne de constater que, finalement, ceux qui sont si prompts à stigmatiser les manipulations génétiques, à dénoncer les OGM, soient aussi facilement prêts à favoriser les recherches sur l'embryon. On nous parle chaque matin du principe de précaution, en veux-tu en voilà, mais sur un tel sujet, évidemment, le principe de précaution ne s'appliquerait pas.
Je trouve même, chez certains, une défense du marché, de l'entreprise, du capital, assez extraordinaire, pour tout dire. Je veux bien qu'on m'accuse de caricaturer, mais c'est quand même bien vous, chers collègues de l'opposition, qui mettez en avant le fait que l'on ne pourrait plus faire de recherches et que d'autres avanceraient plus vite que nous.
Il est aussi assez étonnant de voir que ceux qui dénoncent le dumping social seraient éventuellement prêts à accepter le dumping éthique. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Mais sans doute y a-t-il deux poids, deux mesures.
De notre côté, il n'y a pas de volonté de casser la recherche, mais simplement, oui, de limiter un certain type de recherche. Nous sommes tout à fait favorables à la recherche, mais on n'est pas obligé de faire de la recherche sur l'embryon dans ces conditions-là.
Bien sûr, la loi doit, de par son essence même, être normative. Mais je crois qu'elle a aussi une fonction symbolique. Il est donc important de rappeler avec force le symbole de l'interdiction. On sait très bien qu'il y a toujours, dans ce domaine, un effet de cliquet : ce qui a été fait une fois ne pourra jamais être défait. On peut modifier une loi fiscale, on peut modifier des normes économiques mais, dans ce domaine, on sait très bien qu'on ne revient jamais en arrière. C'est pourquoi la prudence est une vraie vertu, et il faut légiférer d'une main tremblante.
Alors oui, monsieur le président Claeys, il est vrai que je ne suis pas totalement satisfait par ce qui est proposé. Je l'ai déjà dit, mon éthique de conviction me porte à une interdiction totale, c'est clair, avec de vrais moyens en parallèle pour une recherche différente, pour une recherche éthique.
Mais je suis un homme politique. Je ne suis pas un philosophe, un penseur. J'ai aussi une éthique de responsabilité. Et il serait vain de vouloir opposer les deux, parce que l'homme public vit en société, vit en famille, tient obligatoirement compte de son environnement. Et s'il est facile de donner des conseils, d'avancer des arguments péremptoires lorsqu'on est loin de la réalité des choses –je ne vous fais évidemment pas ce procès, monsieur Claeys –, si c'est facile quand on est un penseur tranquillement installé dans son fauteuil ou derrière son écran, notre responsabilité est aussi de tenir compte de ces éléments de réalité.
Cette éthique de la responsabilité nous conduit à trouver un équilibre, et je crois que le rapporteur l'a trouvé, un équilibre précaire, bien sûr, un équilibre instable, un équilibre sans doute non satisfaisant, mais qui fait la jonction entre ce qui est souhaité et ce qui est réalisable, possible.
Je crois donc, sans enthousiasme particulier mais aussi par réalisme, que l'amendement n° 36 rectifié opère une synthèse, sans doute incomplète, mais qui permet de réunir, sans être en contradiction totale, ces principes, cette éthique de responsabilité et cette éthique de conviction. Encore une fois, la politique, c'est aussi l'art du souhaitable et l'art du possible. Et c'est l'art de savoir s'adapter. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)