Comme vous tous, j'ai écouté avec beaucoup d'attention les propos du président de la commission spéciale, du rapporteur et de ceux qui se sont exprimés ensuite sur le sujet. À chaque fois, j'ai trouvé qu'il existait dans leur présentation une force et une logique. Pourtant, comme parfois les propos pouvaient être contradictoires, cela signifie que ces logiques devaient contenir un biais.
Il me semble que le biais est au coeur même du débat que l'on essaie d'installer aujourd'hui, consistant à dire qu'il y a une différence fondamentale entre le médical et le sociétal. Je crois sincèrement que c'est le biais logique dans lequel nous nous trouvons aujourd'hui. En effet j'estime qu'il n'existe pas de différence, dans la réflexion que nous devons mener, entre le médical et le sociétal. D'ailleurs, le refus de cette différence a été affirmé à plusieurs reprises lorsque nous nous sommes efforcés de définir ce qu'était la parenté, en rappelant qu'elle devait toujours être fondée sur des critères affectif, et non pas sur des critères génétiques. Il est donc paradoxal de réintroduire le critère génétique ou le critère biologique au moment même où nous devons nous poser la question de savoir comment nous construisons et comment nous autorisons la parenté.
Nous avons admis, au-delà de la contradiction que je viens de noter, l'idée que la naissance de l'enfant répondait bien à une demande sociale. Il n'y a pas de droit à l'enfant et de droit de l'enfant. En introduisant le tiers donneur, nous avons admis que la société pouvait aider, par des moyens médicaux, un couple stérile à avoir un enfant sans que ni le père ni la mère qui exerceront l'autorité parentale n'y contribuent. Cela me semble un progrès que toute cette assemblée accepte, mais, puisque nous avons introduit un tiers, il est normal de se poser la question à l'égard de toute autre forme de couple constitué qui ne peut pas avoir d'enfant.
Si nous avions récusé le principe du tiers donneur, nous pourrions effectivement dire qu'il existe un dispositif médical et une situation naturelle qui s'y oppose. Mais nous avons introduit cette idée, parce que nous avons considéré, contrairement à ce qui nous a été dit par le rapporteur, qu'il s'agissait de répondre non pas à une pathologie, mais bien à un désir d'enfant que la société voulait aider à satisfaire. Nous considérions que ce désir d'enfant, cette pulsion de vie, méritait d'être respectée.
Cela doit donc nous conduire à accepter l'idée qu'un couple ou une personne seule puisse avoir un désir d'enfant (Murmures sur les bancs du groupe UMP).
J'essaie d'être cohérent ! Je veux bien que l'on puisse opposer une logique à une autre, mais vous ne pouvez pas passer d'une logique à l'autre dans le même raisonnement. Si vous admettez l'idée que l'on puisse apporter par l'aide de la société une réponse à une demande d'enfant pour un couple dont le père et la mère sont dans l'impossibilité biologique de concevoir cet enfant, vous devez alors admettre que, lorsque le couple constitué est homosexuel, la question se pose très exactement, au moins pour les femmes, dans les mêmes termes.
Si vous ne l'acceptez pas, c'est que vous établissez une différence de principe entre le couple homosexuel et le couple composé d'un homme et d'une femme. Or cela constitue bien une discrimination. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)