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Intervention de Roland Muzeau

Réunion du 25 mai 2011 à 15h00
Bioéthique — Article 20

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRoland Muzeau :

Le premier amendement dont la discussion en séance publique a été empêchée portait sur une question qui nous semble vraiment importante et qui n'aurait pas dû donner lieu à des divergences, nous semble-t-il. Il consistait à donner la possibilité aux femmes seules –lesquelles ont le droit d'adopter, comme cela a été utilement rappelé il y a quelques instants – d'avoir recours à la procréation médicalement assistée lorsqu'elles sont infertiles.

Quels sont les arguments qui peuvent sérieusement être avancés pour s'opposer à une telle proposition ? Très franchement, je n'en vois pas. Si l'on peut être en désaccord sur d'autres sujets cela ne me semble pas possible sur celui-ci, sauf si l'on adopte des positions de principe qui nous éloigneraient - et je le regretterais - d'un débat où l'intelligence prévaut.

En revanche, je comprends qu'il puisse y avoir un débat plus difficile sur le second amendement car il s'agit d'un sujet sur lequel les positions sont parfois fortement arrêtées et qu'il est extrêmement compliqué de les faire bouger. En l'occurrence, pourtant, nos collègues du Sénat, et sur différents bancs, on accomplit du bon travail. Or, ici, on essaie d'empêcher la réflexion puisque nous n'avons pas le droit d'aborder cette question ! Elle est pourtant importante, incontournable même, et elle ne mérite pas d'être traitée à coup d'anathèmes, voire d'oukases adressés par certains aux parlementaires, leur interdisant de poursuivre l'oeuvre de nos collègues sénateurs.

Cet amendement, frappé d'irrecevabilité au titre de l'article 40, avait pour but de lever l'interdiction faite aux couples de femmes de recourir à l'assistance médicale à la procréation.

Le caractère médical de cette dernière est indéniable. Elle ne peut toutefois être réduite à cette seule dimension. Il s'agit d'une procédure longue et exigeante, que seuls des couples stables peuvent, dans les faits, entreprendre ; chacun d'entre vous le sait.

En outre, la mise en oeuvre de l'assistance à la procréation, quels que soient le sexe, le genre et l'orientation sexuelle des personnes souhaitant y recourir, a toujours pour objet de leur permettre de fonder ou d'étendre une famille et d'affirmer ainsi un projet parental. Nul ne peut sérieusement le contester.

Le fait d'interdire à des personnes d'y recourir au motif de leur sexe, de leur genre ou de leur orientation sexuelle, directement ou par le biais de leur statut matrimonial, constitue selon moi une discrimination qui, parce que contraire à notre tradition républicaine, doit être impérativement levée, comme le proposait notre amendement.

Il s'agit, plus largement, d'une véritable question de société : celle de la reconnaissance des familles homoparentales. Celles-ci doivent avoir, me semble-t-il, les mêmes droits, les mêmes devoirs et les mêmes possibilités que toutes les autres familles, et ce dans l'intérêt premier des enfants. Il faut, en conséquence, éliminer aussi les discriminations dans l'accès à l'adoption, aux congés parentaux ainsi qu'en matière de partage de l'autorité parentale et de représentativité des associations.

Pour rendre réelle l'égalité des possibilités et des droits, il aurait également été nécessaire de prendre toutes les mesures qui s'imposent pour que disparaissent dans la société toutes les discriminations et violences – dont l'actualité nous donne chaque jour des exemples dramatiques – fondées sur le sexe, le genre ou l'orientation sexuelle, ainsi que leurs schémas de reproduction.

Ces deux amendements ne pourront pas être examinés. Nous allons assister à un retour en arrière par rapport au travail effectué par nos collègues sénateurs. Ce n'est pas seulement un regret. C'est aussi le motif d'une colère que je ne souhaitais pas garder pour moi.

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