La dynamique sur les programmes n'est, il est vrai, pas seulement franco-britannique. Certaines opérations sont par exemple franco-italiennes, comme l'Aster. Nous discutons actuellement sur le successeur du missile Milan, sujet dont nous débattons depuis plusieurs années avec les états-majors et la DGA. Ce dernier, qui a été pendant des décennies un des points forts de l'industrie de défense française et européenne et un élément moteur de la coopération franco-allemande, ne doit pas conduire à une sortie de l'Europe de ce secteur du combat terrestre. C'est absolument essentiel pour notre position d'acteur global, l'enjeu devenant de plus en plus technique, avec des technologies génériques communes à l'ensemble de nos programmes et un potentiel d'exportations considérable.
Nous avons certes été en situation difficile en juillet 2009 quant la France a acheté sur étagère des missiles américains Javelin en nombre limité correspondant à 10 % des besoins de l'armée de terre. Cela nous a laissé le temps de nous rétablir et de revenir à une solution française entre MBDA et Sagem qui correspond, je pense, aux besoins de l'armée de terre et à un prix attractif. Nous prenons d'ailleurs à notre charge une partie importante des coûts de développement parce que nous croyons à ce produit et à son potentiel à l'export. Mais cela fait un an et demi que nous travaillons en autofinancement et nous avons besoin d'un contrat pour agir dans un cadre formel et pour que les besoins soient clairement définis. C'est à nos yeux la décision la plus urgente à prendre lors d'un prochain CMI.
Nous travaillons aussi sur le programme de l'antinavire léger (ANL) qui est mentionné dans la déclaration du sommet franco-britannique et sur des options d'évolution des programmes Exocet et Aster.
Pour autant, même si ces quatre programmes étaient aujourd'hui décidés, le flux financier qui alimenterait notre bureau d'études serait d'environ 20 % inférieur à l'actuel. Nous ne sommes pas dans une situation où les options sont ouvertes et où nous pouvons accepter des risques.
Je ne me hasarderai pas à répondre sur l'A400M, ne souhaitant pas empiéter sur un domaine qui n'est pas le mien. Je vous dirais juste, à titre personnel, que de même que le Boeing 747 a été peut-être au moment de son lancement un problème majeur pour son producteur puis pendant des décennies un programme clé et un succès, le concept de l'A400M est très solide. Cet avion devrait se révéler comme un succès industriel, commercial et opérationnel pour l'Europe. Nous avons toute la matière pour étendre des coopérations dans ce domaine.
MBDA aborde en effet avec optimisme cette nouvelle donne de la coopération franco-britannique parce qu'elle correspond à la façon dont cette société s'est développée et que nous pensons que les fondations de cette coopération sont solides.
Cela étant, il n'y a pas d'entreprise européenne de défense sans une composante allemande forte, en raison de la position et du poids politique et économique de ce pays. La volonté ne manque pas de notre côté, mais nous sommes confrontés à la difficulté de mettre en place un dialogue et de trouver des sujets sur lesquels ce partenariat pourrait se développer. Cela constitue pour nous une frustration, mais nous avons pour objectif d'identifier des programmes, des technologies et des initiatives sur lesquels nous pourrons travailler.
Nous concevons la mise en place des centres d'excellence franco-britanniques en trois temps : d'abord, MBDA dans son ensemble, c'est-à-dire avec ses équipes allemandes et italiennes, travaille sur leur identification en fonction de notre politique industrielle comme nous le faisons de façon régulière depuis des années. Ensuite cette politique générale est déclinée dans un périmètre franco-britannique puis débattue avec les ministères de la défense français et britannique. Enfin, les orientations qui en résultent sont validées par le comité directeur de MBDA.
J'ajoute que certains de ces centres incluent ou incluront une partie de production italienne ou allemande significative. L'Allemagne conserve par exemple, au travers de notre filiale TDW, une compétence mondiale dans le domaine des charges militaires : nous pouvons utiliser ses équipements pour des produits franco-britanniques comme l'ANL et prenons en compte, dans le centre d'excellence relatif aux charges militaires, les capacités essentielles que nous avons outre-Rhin. Il en est de même de l'Italie pour l'activité « systèmes » et « autodirecteurs », où les compétences sont fortes. Si nous pensons que la seule solution raisonnable pour l'évolution du programme Aster est de poursuivre la coopération franco-britannique sur l'auto-directeur et d'autres parties du missile, c'est parce que nous avons des compétences dans ce pays ; on ne va pas transformer un programme de coopération avec l'Italie en un programme de coopération franco-britannique !
Les principes que nous avons définis et appliquons tiennent donc compte des contraintes et objectifs que vous avez mentionnés.