Je ne ferai aucun commentaire sur la composante océanique. Je dirai simplement que l'objectif de stricte suffisance implique que la marge de manoeuvre par rapport à une situation où nous ne serions plus suffisants est aussi étroite que possible et que cette marge doit être gérée sur les plans technologique et stratégique. Cela suppose d'avoir des leviers différents, c'est-à-dire une double composante océanique et aéroportée, de manière à anticiper des menaces ou des réductions de crédibilité sur l'une ou l'autre des composantes à un horizon de vingt ou trente ans. À cet égard, la composante nucléaire aéroportée apporte une brique essentielle.
Les économies de 30 % conduiront à des réductions de budget et à une amélioration de l'efficacité de nos industries, donc du prix de nos produits. Si nous nous fixons pour objectif d'avoir plus de la moitié de notre activité à l'export, c'est bien parce que sur ces marchés très concurrentiels, nous avons confiance en notre capacité à améliorer notre compétitivité dans les prochaines années. Nos nombreux succès à l'exportation ont montré que la performance de nos équipements fait la différence et que les clients apprécient le produit de manière globale, considérant non seulement le prix d'acquisition mais le coût sur l'ensemble de sa durée de vie. Cette performance et cette compétitivité sont pour nous des objectifs essentiels tant vis-à-vis du client français que des clients étrangers.
Notre dépendance à l'égard des composants soumis aux règles ITAR (International Traffic in Arms Regulations) est un point critique. Dans le domaine spatial, l'Agence Spatiale Européenne a mené des actions de fond avec des investissements significatifs pour recréer des doubles sources en Europe sur des composants critiques de la liste ITAR ou de la liste EAR (Export Administration Regulations). En France, cette question est examinée par la DGA et correspond à l'une des actions lancées par l'AED. Si les composants sont moins visibles que les équipements, ils sont aussi essentiels pour l'autonomie stratégique.
Je ne sais pas si le Royaume-Uni utilise l'initiative franco-britannique pour affaiblir l'AED, mais je sais que l'Europe a été construite étape par étape et de façon pragmatique. Chaque fois que nous pouvons faire une avancée, faisons-là ! Nous progressons dans le cadre de la coopération franco-britannique, il faut s'en réjouir mais ne perdons pas de vue la vision européenne, notamment celle tendant à développer l'AED. Aujourd'hui, les budgets sont certes limités et les attentes, peut-être trop élevées, ont engendré une frustration au regard de l'action de l'agence, mais les principes directeurs restent tout à fait valides. Ils reposent sur une approche européenne des programmes de R&D, sur la définition de capacités militaires et sur une conception de consolidation industrielle ; trois éléments également essentiels dans la coopération franco-britannique.