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Intervention de Guy Malherbe

Réunion du 18 mai 2011 à 21h30
Modification de la loi portant réforme de l'hôpital — Article 6

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGuy Malherbe :

L'article 6, qui a soulevé jusqu'à présent beaucoup de passion, concerne en filigrane l'importation des prothèses dentaires.

Il faut rappeler que les dentistes sont, avec les médecins et les sages-femmes, les seules professions médicales de notre pays. La profession dentaire ne doit donc pas être exercée comme un commerce. Le code de la santé publique s'applique de manière rigoureuse à leur exercice.

Les dentistes doivent être garants de la conformité des prothèses qu'ils posent selon les directives européennes qui ont été transposées en droit français.

Or si les contrôles réalisés par l'AFFSAPS engagent formellement les prothésistes français à respecter la traçabilité et la conformité, dont principalement le marquage « Communauté européenne » des produits utilisés, il faut savoir que, hors de l'Union européenne, il n'existe aucune garantie de conformité des prothèses car les contrôles sont évidemment impossibles. La garantie repose uniquement sur la conscience professionnelle du fabricant puisque la conformité des dispositifs médicaux sur mesure est déclarative, à l'inverse des dispositifs de série, qui eux peuvent faire l'objet de prélèvements ou de tests.

C'est donc pour éviter des dispositifs médicaux de provenance douteuse qu'en 2009, la loi HPST a exigé une mesure de transparence du prix d'achat qui seule permet aux patients d'identifier avec certitude la provenance de leur prothèse, le prix étant un indicateur extrêmement fort.

Il faut rappeler que les prothèses dentaires importées d'Asie ou du Maghreb représentent environ 30 % du volume des prothèses posées en France. La différence de coût est de plus de 50 % et leur conformité sanitaire n'est ni vérifiable ni garantie. D'ailleurs, la Cour des comptes dénonce ces importations et souligne que le manque à gagner pour la profession des prothésistes est d'environ 600 millions d'euros par an, soit 10 000 emplois environ. En 2009, Mme Bachelot qualifiait ce comportement de « circuit condamnable ». C'est pourquoi l'article 57 de la loi HPST a prévu que, lorsque l'acte ou la prestation du dentiste inclut la fourniture d'un dispositif médical, les professionnels de santé doivent délivrer une information écrite qui comprend de manière dissociée le prix de chaque élément de l'appareillage proposé, le prix de toutes les prestations et une copie de la déclaration du dispositif médical.

Or ces obligations prévues par la loi HPST sembleraient poser aujourd'hui plusieurs problèmes.

On nous dit que ces obligations ne tiendraient pas compte des dentistes qui emploient des prothésistes. Mais il en existe très peu et, ce faisant, en exerçant le métier de fabricant, ils seraient en infraction avec le code de la santé publique.

II serait aussi impossible de détailler le prix d'achat de chacun des éléments d'appareillage, tels que les orthèses et les orthoprothèses qui peuvent comporter un grand nombre de petites pièces. En fait, le prix de chaque élément ne signifie pas celui de chaque pièce. Les orthoprothèses contiennent un grand nombre de petites pièces assemblées en un seul élément relié, vendues et facturées comme un seul dispositif. Il n'y a donc pas de difficulté de facturation.

Les obligations de la loi HPST inciteraient aussi les praticiens à contourner les règles en négociant des marges arrière ou en constituant des sociétés entre professionnels qui permettraient de fournir le matériel à un prix de convenance, les bénéfices étant remontés au niveau de la société. Mais il faut rappeler que les marges arrière sont prohibées par le code de la santé publique et que la constitution de sociétés serait faite en violation de ce même code.

Aussi, et pour apporter une solution à tous ces problèmes, les sénateurs ont proposé de remplacer l'obligation de faire figurer le prix d'achat par celle de faire figurer le prix de vente des matériels.

Or le fait de remplacer le prix d'achat par le prix de vente du dispositif médical modifie la qualification de l'acte qui constitue de ce fait une activité commerciale contraire, je le répète, au code de la santé publique. Je rappelle que la profession dentaire ne doit pas être pratiquée comme un commerce.

Alors, pourquoi modifier la loi HPST, parfaitement applicable, en créant un aménagement remplaçant le prix d'achat par le prix de vente, contraire au code de la santé ? Selon une enquête IFOP réalisée au mois de novembre 2010, il semblerait en effet que la loi soit techniquement applicable : 44 % des dentistes procèdent déjà ainsi totalement ou partiellement, et 77 % des praticiens dentistes sont matériellement en mesure d'appliquer cette disposition.

Si la loi pose un problème, c'est au plan psychologique.

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