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Intervention de Bérengère Poletti

Réunion du 17 mai 2011 à 16h00
Délégation aux droits des femmes et l’égalité des chances entre les hommes et les femmes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBérengère Poletti, rapporteure :

70 % d'entre eux en possèdent un. Cela peut paraître peu mais c'est déjà cela.

Certes, les principes d'anonymat et de gratuité existent déjà dans les centres de planification et d'éducation familiale. Mais il faut que les jeunes filles puissent et osent s'y rendre en jonglant entre les horaires de leur temps libre et ceux de l'ouverture des centres. Il leur faut le plus souvent prendre des transports en commun et dans certaines régions, l'accès à ces centres est difficile. Je propose donc un dispositif plus lisible, plus facile d'accès et valable auprès de tous les médecins.

Je ne suis pas sortie satisfaite de l'entretien que j'ai eu avec les services du ministère de la Santé sur ce sujet. Mme Nora Berra, secrétaire d'État chargée de la Santé n'a pu me consacrer qu'une demi-heure. M. Xavier Bertrand a été plus sensible à cette question mais le Gouvernement ne semble pas prêt à reprendre ma proposition. Si aucune décision n'est prise avant l'automne, je déposerai une proposition de loi que je proposerai pour cosignature à mes collègues de la Délégation aux droits des femmes.

L'augmentation du nombre d'IVG chez les mineures, même si les chiffres paraissent se stabiliser depuis deux ans, montre qu'il y existe un problème d'accès à l'information. Aux Pays-Bas, ces questions sont abordées beaucoup plus tôt qu'en France à l'occasion d'une « semaine papillon », organisée chaque année pour les enfants, depuis leur plus jeune âge - 4 ans - jusqu'au collège. Il faut apprendre le plus tôt possible à respecter le corps, le sien et celui des autres.

L'audition de M. Luc Chatel, ministre de l'Éducation nationale a été plus positive. Le ministre a reconnu que la loi du 4 juillet 2001 posait une obligation d'information à la sexualité. Si cette information ne se fait pas correctement dans tous les établissements scolaires, c'est qu'elle dépend de la façon dont le chef d'établissement et le conseil d'administration choisissent d'inscrire cette thématique dans le projet d'établissement. Les thèmes retenus portent plus souvent sur l'alcoolisme et le tabagisme que sur la contraception ; lorsque le chef d'établissement est une femme, l'information semble cependant être mieux diffusée.

Dans mon département des Ardennes, d'excellentes initiatives ont été prises en ce sens ; le but de ma démarche est que toutes les bonnes initiatives menées sur le territoire soient généralisées et rendues obligatoires.

Il faut en outre que des réseaux se constituent autour de ces actions en réunissant des gynécologues, des associations, des enseignants et des conseillères conjugales, et que des outils pédagogiques nouveaux soient conçus.

Au sujet des expériences d'accès des mineurs à une contraception gratuite et anonyme qui ont été lancées dans les régions Poitou-Charentes et Île de France, il me semble que ces initiatives ne constituent pas une mauvaise idée, faute de mieux. Mais, je considère qu'il serait préférable de se battre pour que soit proposée une réponse nationale unifiée sur l'ensemble du territoire. Une telle politique relève de la compétence du ministre de la Santé.

Concernant la formation des professionnels de santé, on constate qu'il y a encore beaucoup d'idées reçues. Les médecins et les sages femmes doivent être mieux informés sur la diversité des moyens de contraception. En France, la pilule est prescrite en priorité et de façon prédominante ; mais toute femme, et surtout toute jeune fille, peut oublier de prendre ce médicament oral alors qu'il existe d'autres méthodes où ce risque n'est pas couru tels que les patchs, les anneaux vaginaux et les implants. Il est vrai que certaines de ces techniques sont assez onéreuses comme l'implant ou la pilule de troisième génération et qu'elles posent un problème de prise en charge par la sécurité sociale. Mais, en tout état de cause, il convient de proposer des solutions adaptées à la physiologie et au confort de la jeune fille.

Par ailleurs, nombre de professionnels de santé croient qu'un examen gynécologique est indispensable avant toute prescription contraceptive. Or, comme l'ont souligné les deux chefs des services de gynécologie obstétrique des hôpitaux hospitaliers universitaires de Nîmes et de Strasbourg, les professeurs Pierre Mares et Israël Nisand, imposer un tel examen à une jeune fille consultant pour une contraception peut être ressenti comme un véritable viol. De nombreuses mineures en ont peur et il faut, par conséquent, que les professionnels concernés en tiennent compte.

Une meilleure formation est donc nécessaire. Mais, comme l'a rappelé Mme Valérie Pécresse, ministre de l'Enseignement supérieur et de la recherche, on ne peut pas compter sur un levier national en matière de formation médicale en raison de l'autonomie des universités. Diverses améliorations pourraient néanmoins être envisagées en première année et au cours de l'internat. Se pose cependant, le problème des étudiants ayant choisi la spécialité de médecine générale qui, ayant à effectuer un stage obligatoire soit en pédiatrie, soit en gynécologie, choisissent le premier domaine et non le second : ils n'acquièrent donc aucune pratique en gynécologie. Je souhaite qu'on puisse avancer sur cette question.

Des diplômes universitaires (DU) de gynécologie mis en place par certaines universités peuvent permettre aux différents prescripteurs de moyens contraceptifs de perfectionner et de mettre à jour leurs connaissances que ce soit au cours de leur formation initiale ou par le biais d'une formation continue.

Il me paraît enfin nécessaire de lancer de grandes campagnes d'information en direction des parents afin qu'ils comprennent la nécessité d'avoir un dialogue ouvert et respectueux avec leurs enfants. Et, en toute hypothèse, les parents des familles où tout va bien, doivent comprendre qu'ils ne sont pas représentatifs de l'ensemble des familles et que dans certaines d'entre elles, des jeunes filles sont laissées à l'abandon. En outre, dans toute famille, le souci qu'un mineur peut avoir de préserver sa sphère d'intimité face à ses parents ne doit pas constituer un obstacle pour accéder à la contraception.

Je compte sur l'action du Gouvernement, de la Délégation aux droits des femmes ainsi que de la presse pour faire passer un certain nombre de ces messages.

En conclusion, j'évoquerai mon déplacement en Guadeloupe qui, comme la Guyane, connaît des taux catastrophiques en matière d'IVG des mineures. Alors que depuis la métropole, le rapport des îliens à leur corps semble être mieux accepté, la réalité est que les attitudes moralisantes de la majeure partie de la société posent de nombreuses difficultés aux adolescents. En outre, les pharmaciens ne jouent pas le jeu ; ils sont nombreux à refuser de délivrer la contraception d'urgence. Et quand j'ai souhaité m'entretenir de ce problème avec le conseil de l'Ordre des pharmaciens, j'ai de fait été reçue non pas par un pharmacien d'officine mais par un biologiste !

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