Monsieur le président, je suis sensible au fait que vous ayez souhaité organiser ce débat pour permettre à l'exécutif et aux parlementaires de donner une suite au rapport du comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques.
Christian Vanneste ayant présenté l'esprit de ce rapport, je voudrais simplement rappeler nos préconisations sur deux points. La principale proposition consiste à créer une Haute autorité de la vie politique qui aurait compétence sur les divers aspects de la vie politique, qu'il s'agisse du financement des campagnes et des partis politiques, du patrimoine, de la déontologie au regard des conflits d'intérêts, des élections, des sondages, voire du découpage des circonscriptions électorales.
Cela implique, pas nécessairement la fusion, mais le regroupement des diverses autorités qui exercent des attributions, voire de celles que l'on envisage de créer, dans une autorité unique à l'instar de ce que nous avons pu constater au Canada et au Québec. Pour que cette autorité dispose de la légitimité et de l'indépendance indispensables s'agissant de la vie politique, pour qu'elle soit incontestée, nous pensons que son responsable doit être nommé par le Parlement – le Parlement lui-même et non pas même les commissions concernées – à la majorité des trois cinquièmes.
Les conditions d'exercice de la démocratie impliquent un consensus entre les divers partis politiques représentés au Parlement. La nomination dans ce domaine ne peut dépendre du seul pouvoir exécutif qui, par construction, est issu de la seule majorité. Force est d'ailleurs de reconnaître que les autorités actuelles, qui fonctionnent bien et qui font bien leur travail, n'ont toutefois pas l'autorité suffisante pour faire progresser la législation – on l'a bien vu avec la Commission pour la transparence financière de la vie politique, qui a mis une décennie avant d'obtenir les modifications indispensables qu'elle réclamait.
Le deuxième point sur lequel je voudrais insister, c'est le fait que les autorités administratives indépendantes ne doivent pas se soustraire aux disciplines budgétaires suivies par les autres administrations de l'État.
Les dépenses des AAl ont été évaluées, en 2009, à 387 millions d'euros par le ministère du budget, mais nos propres travaux aboutissent à un chiffre supérieur à 600 millions d'euros, si l'on inclut les coûts supportés par d'autres administrations résultant de personnels mis à disposition. L'écart entre les deux chiffres n'est pas mince : on se situe, dans le premier cas, en deçà du budget de l'Assemblée nationale, mais, dans le second, sensiblement au-delà.
Autre différence notable : le budget global des AAI a augmenté d'environ 27 % au cours des trois dernières années et leurs effectifs, environ 3 650 emplois, ont progressé de 17 % au cours de la même période, alors que, par comparaison, le budget de l'Assemblée nationale est resté stable et que ses effectifs ont même légèrement diminué. Nous avons calculé qu'entre 2009 et 2010, l'augmentation des dépenses des AAI a été supérieure à 11 %, alors que l'ensemble des administrations ministérielles est soumis à la norme « zéro valeur ».
Le manque de transparence des budgets et des effectifs des AAI cache une forte croissance tendancielle. Plusieurs AAI ne présentent pas de budget consolidé ; certaines ne connaissent même pas leur coût global. Nous nous sommes en effet aperçus que l'Autorité de sûreté nucléaire, qui dépend de quatre programmes budgétaires, ne connaissait pas globalement son budget !
De manière générale, les rémunérations, tant des membres des collèges que des services administratifs, manquent de cohérence au regard de leurs responsabilités. Nous estimons donc que, sauf missions nouvelles, les AAI devraient être astreintes aux mêmes disciplines que les autres administrations d'État, en particulier en matière de personnels.
L'immobilier constitue le point noir de la gestion des AAI, à cause non seulement des superficies dont elles disposent, mais surtout du montant excessif de leurs loyers, qui s'explique par leur implantation dans le périmètre géographique le plus cher de Paris. Il conviendrait de procéder immédiatement à un réexamen de tous les baux conclus par les AAI ou conclus par les ministères. Je rappelle tout de même, même si celle-ci n'existe plus formellement, que le loyer de la HALDE, qui a été tant critiqué, n'a pas été déterminé par l'autorité elle-même mais par le ministère qui a permis sa création.
Pour améliorer ce contrôle, nous souhaitons que la loi organique relative aux lois de finances soit déclinée à l'égard des AAI, sous réserve naturellement des aménagements imposés par leur indépendance. Cela signifie la définition d'une stratégie de performance avec des objectifs et des indicateurs dans les documents budgétaires et surtout dans leur rapport annuel.
Enfin, nous souhaitons que les autorités publiques indépendantes qui disposent de ressources propres soient intégrées dans les documents budgétaires, sous le contrôle d'un rapporteur spécial de la commission des finances qui, aujourd'hui, les ignore. Par ailleurs, leurs effectifs doivent être soumis à un plafond d'autorisation d'emplois.
Voilà quelques-unes des préconisations du comité. J'insiste sur la nécessité de faire en sorte que l'Autorité de sûreté nucléaire dépende d'un seul programme et qu'elle puisse gérer correctement son budget. D'après les témoignages de son président que nous avons auditionné, elle passe beaucoup trop de temps à régler des problèmes administratifs alors que sa tâche est de veiller à notre sûreté nucléaire.