Dans le cadre de l'élaboration du budget triennal 2011-2013, le ministère de la Défense a été amené à prendre des mesures d'ajustement physique de plusieurs opérations d'armement. Les paiements ayant été réduits d'environ deux milliards, le programme MRTT a, pour sa part, été décalé de deux ans, la première livraison étant maintenant prévue en 2017. Nous bénéficions donc d'un délai supplémentaire pour choisir entre l'acquisition patrimoniale ou le partenariat public-privé.
Dans ce contexte, j'évoquerai trois développements récents.
Tout d'abord, la situation économique générale : le renchérissement du loyer de l'argent et l'augmentation de l'aversion au risque ne vont pas dans un sens favorable au PPP, même si cette option reste, je le répète, à l'étude.
Ensuite, le choix américain. Dans l'option patrimoniale notamment, nous ne pouvons plus compter sur les retombées des acquisitions américaines. Celles-ci auraient pu assurer des conditions financières d'autant plus favorables qu'EADS avait envisagé de mettre en place une production directe de ces avions ravitailleurs. N'ayant pas enlevé le marché américain, l'industriel va se trouver contraint, avec une production limitée à quelques dizaines d'avions, de transformer des A330 standards.
Enfin, le retour d'expérience des Britanniques. Le temps passant, ceux-ci perçoivent des inconvénients liés à l'application des contrats FSTA (Future strategic tanker aircarft), d'acquisition de services. J'en citerai deux.
D'une part, afin de sécuriser économiquement cette opération, les Britanniques ont dû convenir d'un minimum d'heures ou de redevances à verser au consortium mais, en raison de leur situation financière actuelle, les voici maintenant contraints d'examiner des scénarios capacitaires inférieurs aux planchers prévus, alors même qu'ils sont liés pour vingt ou trente ans par les contrats de services. Nous avons, quant à nous, identifié depuis quelque temps le risque d'une telle formule, ainsi que la nécessité de ménager la flexibilité indispensable sur de telles durées – nous sommes habitués, dans le domaine de la défense, aux visions de long terme, mais aussi à leurs ajustements quand c'est nécessaire ! Ainsi, alors que nous avons des projets d'acquisition de services assez avancés en ce qui concerne les bâtiments de soutien hauturiers, nous prévoyons une marge de flexibilité sur le nombre d'heures de mer qui seront nécessaires à échéance de dix ou quinze ans… La situation est encore plus délicate à gérer en ce qui concerne les MRTT ou les FSTA. Les Britanniques sont donc à la recherche de clients afin que l'industriel puisse vendre les heures dont il dispose. Nous examinons leurs offres, encore faudrait-il que leurs prix soient satisfaisants.
D'autre part, à l'issue des opérations que nous menons, les retours d'expérience conduisent en permanence à procéder à des modifications mineures de nos équipements – ainsi sur le Rafale ou le Félin. Si nous connaissons moins de ces « urgences opérations » que les Britanniques, qui y ont consacré jusqu'à environ 800 millions d'euros en un an, leur montant atteint tout de même 100 à 200 millions d'euros annuels. Même si nous devons nous réjouir que cette dépense ne soit pas si élevée que celle de nos voisins, il reste qu'il faut se réserver la possibilité d'effectuer ces aménagements. Or, alors que les Britanniques commencent à considérer qu'une évolution du FSTA serait nécessaire, ils se heurtent à la complexité des contrats de PPP, dont la révision s'apparenterait à l'ouverture de la boîte de Pandore ! Dans un cadre patrimonial, ils seraient sans doute mieux à même de s'adapter à leurs nouveaux besoins…
Cette expérience britannique, ajoutée à l'absence de revenu tiers avéré et à un contexte économique peu favorable aux PPP, contribue à assombrir le tableau. Cela étant, aucune décision n'est prise à ce jour. L'instruction se poursuit en vue de rassembler d'ici à 2012 l'ensemble des éléments techniques et économiques permettant de trancher la question.