Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la création du conseiller territorial est l'une des grandes innovations de la loi de réforme des collectivités territoriales. Ce nouvel élu remplacera en 2014 les 6 000 conseillers généraux et régionaux ; il siégera à la fois au département et à la région. Ainsi, les élections des conseillers régionaux en mars 2010 et des conseillers généraux les 20 et 27 mars derniers furent les dernières dans le mode actuel.
Le projet de loi examiné ce jour a pour but de corriger le nombre de conseillers territoriaux dans six départements, qui présentaient des écarts de plus de 20 % par rapport à la moyenne régionale. Nous aurons donc, à l'issue de cette validation législative, le tableau fixant le nombre de conseillers territoriaux, qui assurera une représentation moyenne des habitants par les conseillers territoriaux du département ne s'écartant pas de plus ou moins 20 % par rapport à la représentation moyenne des habitants par les conseillers territoriaux de la région. Dans nos régions respectives, le nombre de conseillers territoriaux et ceux déclinés dans chaque département sera ainsi défini.
Cette réforme, c'est déjà un débat d'élus, « un sujet dont on cause », comme on dit dans nos campagnes, et par lequel se sentent concernés au premier chef les élus municipaux et les élus cantonaux et régionaux.
Des points particuliers restent à traiter, qui le seront pour partie dans le projet de loi relatif à l'élection des conseillers territoriaux et au renforcement de la démocratie locale. Il en va ainsi du seuil à partir duquel le conseil municipal sera désigné au scrutin de liste. Autant vous dire que le seuil actuel, fixé à cinq cents habitants, est pour le moins incompris dans un département rural comme le mien, l'Aube.
Il est une autre question à trancher, c'est la prise en compte ou non de l'échelon intercommunal dans le cumul des mandats.
Vous le savez, ce sont nos concitoyens les plus ruraux, attachés à leur canton et à leur conseiller général, qui s'interrogent le plus sur cette réforme. En Champagne-Ardenne, pour analyser ce que je connais le mieux, il y aura 138 conseillers territoriaux – contre 49 conseillers régionaux actuellement – et 33 dans l'Aube, soit autant que de conseillers généraux actuels, dans un département où le canton le moins peuplé – deux mille habitants – représente neuf fois moins en population que le plus grand – près de vingt mille habitants. Chacun comprend donc aujourd'hui la nécessité de ce redécoupage, et nous devrions connaître par décret dans quelques mois la nouvelle carte administrative.
Ce n'est pas une mince tâche de définir une nouvelle carte, qui inscrira chaque département dans la logique nationale tout en relevant d'une approche pragmatique, approuvée au niveau local.
Il faut dire que, dans certaines circonstances, les nouveaux découpages ont fait l'objet de propositions mal comprises sur le terrain – je pense en particulier à certaines modifications de circonscription applicables lors des prochaines élections législatives.
Monsieur le ministre de l'intérieur, ministre des collectivités territoriales, était vendredi dernier dans l'Aube, à Méry-sur-Seine, pour inaugurer une nouvelle gendarmerie. Sa présence, son intervention, tout comme sa proximité ont été très appréciées. Mais, dans les discussions qui ont suivi la visite ministérielle, est revenue en débat l'incompréhension des élus et des habitants de ce canton concernant un autre découpage, celui de la circonscription.
Ce canton de Méry-sur-Seine va en effet être raccordé à une circonscription qui ne correspond ni aux habitudes de ses habitants, ni à leurs centres d'intérêt et encore moins à leur bassin de vie. Ce canton est naturellement tourné vers Romilly-sur-Seine, à une quinzaine de minutes, et non vers Bar-sur-Aube, distante de plus de cent kilomètres. Si ce sont les mêmes doigts qui tiennent les mêmes ciseaux en proposant les mêmes solutions avec autant d'incompréhension, on ne peut qu'être inquiet. (Approbations sur les bancs du groupe SRC.)
Le redécoupage doit être du « cousu main », qui prenne en compte les nécessaires exigences d'équilibre démographique de la réforme, mais aussi la réalité, les habitudes, le contexte local. En effet, dans une même circonscription, regrouper, redéfinir des cantons, c'est aussi supprimer des chefs-lieux qui, souvent dans ces bassins ruraux à faible population, sont autant de bourgs centres, de lieux de rencontre, où s'ancrent de habitudes de vie et où subsistent commerces, associations et services ; ce sont des lieux de réflexion où le conseiller général, les maires et les élus municipaux préparent l'avenir.
Mes chers collègues, monsieur le ministre, ce projet de loi est aussi l'occasion de pointer certains points qui sont autant d'interrogations dans la mise en oeuvre de cette réforme, partant du principe que tout projet dont on partage les grandes lignes peut toujours être amélioré et nécessite, dans sa phase de mise en place, beaucoup de soin.