Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, chers collègues, ce projet de loi projet de loi de rattrapage intervient après la censure du Conseil constitutionnel sur le tableau des effectifs des conseillers territoriaux.
La funeste réforme des collectivités territoriales, en portant la réduction drastique du nombre d'élus dans nos territoires, fixait une répartition totalement hasardeuse des nouveaux effectifs. Ceux-ci semblaient plus dictés par des considérations de stratégie politicienne que par l'intérêt général. Le juge constitutionnel a donc utilement rappelé que les effectifs retenus pour six départements méconnaissaient le principe d'égalité devant le suffrage, du fait des écarts disproportionnés de représentation qu'ils entraînaient pour les conseillers régionaux de leur région respective.
Dans le tableau qui nous est aujourd'hui proposé, aucun département ne présente un écart de représentation de plus de 20 % par rapport à la moyenne régionale, à l'exception de quatre départements comptant quinze sièges. Des écarts de moins de 20 %, cela veut dire qu'il existe tout de même toujours de fortes disparités.
Fondamentalement, la création du conseiller territorial, loin d'être une avancée, constitue une régression politique majeure pour le développement de nos territoires. En rayant d'un trait de plume plus de 2 000 mandats d'élus locaux, la majorité et le Gouvernement ont porté un coup à la démocratie locale. Moins d'élus, c'est moins de proximité entre les citoyens et leurs représentants. C'est aussi le risque d'une professionnalisation et d'une bureaucratisation de la fonction.
Cette purge, prétendument motivée par des impératifs budgétaires, n'entraînera aucune économie, bien au contraire : le coût estimé de la nécessaire restructuration des hémicycles pour convenir aux nouveaux effectifs atteint un milliard d'euros.
Par ailleurs, le mode de scrutin retenu est injuste. Il favorise le bipartisme et porte un coup d'arrêt aux efforts faits pour instaurer la parité dans notre pays.
En outre, le relèvement du seuil de qualification pour le deuxième tour à 12,5 %, totalement opportuniste et électoraliste, ne manquera pas d'assécher le pluralisme qui vivifie notre démocratie.
Quant à la question des nouveaux effectifs que nous examinons aujourd'hui, elle appelle plusieurs remarques.
D'une part, le seuil minimal retenu de quinze élus pour les départements les moins peuplés, s'il a été validé par le Conseil constitutionnel, n'est pas sans poser des problèmes de représentativité des élus. Si une proportionnalité stricte était appliquée, il faudrait des hémicycles véritablement pléthoriques pour les zones très denses ! Comme ce n'est pas possible, les distorsions entre zones denses et zones faiblement peuplées sont reconduites.
D'autre part, le choix qui a été fait est celui d'une cohérence au sein des régions, mais pas d'une proportionnalité entre les régions. Ainsi, l'écart de représentation entre les départements d'une même région ne peut être de 20 % par rapport à la moyenne régionale, mais deux régions ou deux départements aux populations proches peuvent avoir un nombre de conseillers territoriaux totalement différent.
Comment expliquer ces différences de traitement ? Comment ont été réalisés ces arbitrages et sur quels critères ? La représentation nationale n'en a pas été suffisamment informée. Nous sommes priés de valider un tableau rédigé dans les bureaux des ministères.
Aux termes de la répartition totalement illogique qui nous est imposée, le département du Val-de-Marne perd quatorze cantons et se trouve limité à trente-cinq conseillers territoriaux alors que celui du Bas-Rhin, de 30 % moins peuplé, disposera de quarante-trois conseillers territoriaux ! Qu'est-ce qui peut bien justifier que les citoyens, d'un département à un autre, ne bénéficient pas du même maillage démocratique ? Sur ce sujet comme sur tant d'autres, c'est l'arbitraire qui règne.
Comme les députés communistes, républicains et du parti de gauche l'ont toujours dit, la réforme des collectivités territoriales constitue un recul démocratique insupportable. Loin de simplifier les choses, elle ne manquera pas de donner lieu à une véritable pagaille administrative dont ce projet de loi est le premier exemple. Cette application des vieilles recettes libérales à nos territoires va renforcer les logiques de concurrence et raboter l'intervention publique pour ouvrir des parts de marché aux grands groupes privés.
La réforme territoriale, en cohérence avec les autres attaques menées par le Gouvernement et la majorité contre notre système social, participe au vaste plan d'appauvrissement de la France, de l'État et des collectivités, que vous avez mis en place.
Pour l'ensemble de ces raisons, les députés communistes, républicains et du parti de gauche voteront contre ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)