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Intervention de Gérard Longuet

Réunion du 12 avril 2011 à 15h00
Contrôle des importations et des exportations de matériels de guerre — Discussion générale

Gérard Longuet, ministre de la défense et des anciens combattants :

Je commencerai par répondre à Mme Adam, et par la féliciter pour la grande qualité de son intervention. Il faut néanmoins reconnaître que la France, avec un budget effectivement très inférieur à celui des États-Unis, représente 7,5 % du marché mondial de l'armement, contre 50 % pour les États-Unis : c'est sept fois plus, pour un effort dix fois supérieur. En termes de productivité, nous nous situons donc à un niveau tout à fait convenable. Sur les études amont, les chiffres que vous avez cités sont exacts, mais je peux vous dire que l'année 2011 sera parfaitement satisfaisante. Cet effort – qui n'est, c'est vrai, que de 700 millions – est toutefois supérieur de 100 millions à celui de la Grande-Bretagne, pays comparable, et représente près du double de celui de l'Allemagne fédérale, dont les moyens financiers sont très largement supérieurs aux nôtres. Certes, les sommes ne sont jamais suffisantes mais, à proportion de nos richesses, elles sont importantes et significatives.

Comme d'autres intervenants, vous souhaitez une coopération européenne renforcée. Dans un climat budgétaire difficile pour l'ensemble des pays européens, et alors que, pendant plus de dix ans, les dividendes de la chute du mur de Berlin ont conduit à la contraction des investissements de défense, force est de reconnaître que les conditions financières ne sont pas favorables aux coopérations, chacun se repliant sur ses propres installations. Pour autant, très récemment, la France a pris l'initiative de relancer une coopération avec la Grande-Bretagne, principal pays qui investit dans le domaine de la défense en Europe, avec les accords de Lancaster House. Nous sommes parfaitement déterminés à poursuivre, autant que cela est possible et réaliste, des coopérations et des regroupements européens.

J'indique à M. de Rugy que les grands pays principaux producteurs d'armement en Europe – la France, l'Allemagne, l'Espagne, l'Italie, le Royaume-Uni et la Suède – sont engagés dans une coopération solide en matière de contrôle de certification. Ces pays ont décidé, par une lettre d'intention du 6 juillet 1998, de mettre en place des agents habilités à contrôler la certification et la mise en oeuvre a posteriori de la réglementation européenne, avec des sanctions particulièrement lourdes. Que M. de Rugy soit convaincu de la volonté de contrôle des grands pays exportateurs : c'est notre devoir autant que notre intérêt.

Bernard Cazeneuve, vous êtes intervenu dans un sens favorable au projet de loi, et je ne peux que vous en remercier. Vous avez posé une question que vous aviez d'ailleurs déjà soulevée en commission : sur quelle base pouvons-nous avoir la certitude que la Cour de justice de l'Union européenne ne remettra pas en cause non pas une préférence communautaire, mais la possibilité d'exclure des compétiteurs non communautaires dès lors qu'un certain nombre de restrictions pertinentes peuvent être mises en avant par un État à raison même de l'équipement qu'il souhaite acheter ?

Il y a, en effet, le considérant 18 de l'exposé des motifs. Or vous avez rappelé à juste raison que, entre les considérants et le dispositif d'une directive, la Cour de justice choisissait le deuxième. Cependant, les juristes éminents qui me conseillent m'ont indiqué que les articles 40 et suivants de la directive du 13 juillet 2009 ont fourni les restrictions permettant aux présidents des commissions des affaires étrangères et de la défense du Sénat d'élaborer l'amendement qui sert de charte à l'exclusion non communautaire en cas de besoin et non pas la préférence communautaire par principe. Il y a donc bien une base juridique, qui n'est pas simplement le considérant 18, mais les articles 40 et suivants de la directive.

Vous avez également formulé des voeux, que je partage totalement, monsieur Cazeneuve. D'abord, que le règlement ne vienne pas compliquer les choses : j'en prends l'engagement publiquement devant vous et devant les commissaires du Gouvernement qui auront à suivre ces sujets.

Le suivi informatique, ensuite, est un sujet que j'avais retenu en commission. Les performances de notre système spécifique, le SIEX, ont des limites dont nous avons conscience. Nous avions le choix entre retarder la mise en oeuvre de la directive en la subordonnant à celle d'un nouveau système informatique ou accepter, pour rendre service aux entreprises, le risque d'une coexistence entre un texte nouveau et un système informatique ancien qui, en tout état de cause, sera rénové pour 2014. Nous prenons ce risque. Soyons lucides : la loi sera opérationnelle en 2012 et la situation d'incongruité informatique durera dix-huit mois. La CIEEMG, qui vit sur les mêmes principes depuis 1955, devrait pouvoir supporter une année supplémentaire.

Oui, nous sommes les rois de l'eurocompatibilité. Ce perfectionnisme français, nous en souffrons, les uns et les autres, lorsque nous sommes usagers, mais nous sommes demandeurs de cette eurocompatibilité lorsqu'elle nous est favorable. Au fond, nous sommes à cheval sur deux cultures, celle de la construction européenne et celle des intérêts de base. Mme Adam serait partisane d'une préférence communautaire lorsqu'elle défend les intérêts de sa circonscription, mais partisane de la construction européenne lorsqu'elle défend des principes généraux. Il m'arrive aussi, comme nous tous, et c'est la raison pour laquelle je ne lui jetterai pas la pierre, d'être partagé de la même façon.

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