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Intervention de Philippe Folliot

Réunion du 12 avril 2011 à 15h00
Contrôle des importations et des exportations de matériels de guerre — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Folliot :

Cela signifie que ces marchés d'exportation sont importants. Si notre pays représente 1 % de la population mondiale et 5 % du PIB mondial, ses exportations d'armement représentent 7,5 %, il faut le souligner.

Mes chers collègues, la transposition du « paquet défense » renvoie à un enjeu bien précis : la préservation et le développement de notre base industrielle et technologique de défense. Pour y parvenir, il est nécessaire d'établir un juste équilibre entre la mise en concurrence des industries de défense au sein de l'espace européen et la volonté d'éviter d'ouvrir ce marché à des opérateurs qui ne respecteraient pas les règles de l'Union européenne. Le projet de loi, après son passage au Sénat, respecte cet équilibre fondamental.

S'agissant de la transposition de la directive relative aux transferts intracommunautaires, il faut rappeler que la base industrielle et technologique de défense tant européenne que nationale concentre un nombre important d'emplois civils et militaires – 160 000 emplois directs en France. Préserver cette base permet donc de garantir à terme ces emplois.

Dans le même temps, il est nécessaire d'ouvrir des perspectives d'exportation, ne serait-ce que pour parvenir à des équilibres économiques où le coût de revient unitaire soit acceptable. C'est un élément important à prendre en considération, car, si nous n'agissons pas en ce domaine, les seules perspectives que nous aurons, au-delà du risque de brader des pans importants de notre industrie de défense et donc d'affecter notre indépendance nationale, seront les achats dits « sur étagère » de matériels auprès de fournisseurs étrangers.

Le principe qui sous-tend le droit en vigueur en matière de fabrication et de commerce de matériels de guerre, armes et munitions, remonte à 1939. C'est un principe général de prohibition qui prévoit des possibilités de dérogation sous forme d'autorisations. Et il faut souligner que la transposition de la directive à laquelle procède le texte en préserve l'esprit.

À cet égard, il est important de rappeler la nécessité d'établir des exceptions pour certains matériels devant faire l'objet d'interdictions d'exportation. Je pense plus particulièrement aux sous-marins nucléaires lanceurs d'engins qui font la fierté de la France : ce type d'équipement est l'un des plus compliqués à construire au monde et nous sommes l'un des rares pays à en maîtriser la technologie. C'est une véritable prouesse qui mérite d'être soulignée.

La transposition de la directive relative aux transferts intracommunautaires satisfait pour l'essentiel l'ensemble des acteurs du secteur de la défense. Les industriels de la défense regroupés au sein du GICAN, du GIFAS, du GICAT ont été étroitement associés aux concertations en amont et je tiens à saluer cet esprit de compromis, comme la nature des arbitrages préalables effectués avec la Commission européenne.

En outre, les activités d'importation et d'exportation des matériels de guerre et assimilés doivent être rigoureusement encadrées par des procédures garantissant la sécurité à tous les niveaux. Le texte issu de la commission répond à cet objectif de façon réaliste.

La deuxième partie du projet de loi est consacrée aux marchés de défense et de sécurité. L'essentiel de la transposition reviendra au pouvoir réglementaire à travers la modification du code des marchés publics. Le législateur est toutefois habilité à ajuster certaines dispositions, notamment celles contenues dans l'ordonnance du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes non soumises au code des marchés publics.

Le « paquet défense » participe d'une stratégie communautaire amorcée par la Commission européenne en 2007. L'objectif est à terme une réduction des freins à la circulation des produits de défense sur le territoire de l'Union européenne, qu'il s'agisse des munitions, des véhicules ou des matériels électroniques.

Je tiens à me féliciter de l'inscription noir sur blanc dans le texte du principe de préférence communautaire que nous devons à une initiative du président de la commission des affaires étrangères du Sénat, Josselin de Rohan. C'est parce que la France est dotée d'une industrie de défense de qualité, innovante, au savoir-faire reconnu internationalement, que nous devons clairement privilégier les choix franco-français, je le dis sans aucun tabou. Je pense tout particulièrement à nos industries aéronautiques, navales ou terrestres, sans oublier la filière nucléaire dans laquelle nous excellons.

Jusqu'à présent, seule une certaine lecture de l'article 346 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne autorisait les États à déroger aux règles régissant le marché commun. La Commission a toutefois donné à plusieurs reprises une interprétation restrictive de la disposition de cet article qui prévoit que « tout État membre peut prendre les mesures qu'il estime nécessaires à la protection des intérêts essentiels de sa sécurité et qui se rapportent à la production ou au commerce d'armes, de munitions et de matériel de guerre ».

Sans contourner les règles communautaires, il était important d'inscrire dans notre droit interne le principe de préférence communautaire. J'aurais même tendance, vous l'aurez compris, à militer en faveur d'une préférence donnée aux industries nationales.

En conclusion, j'aimerais exprimer le souhait que, à l'avenir, la représentation nationale soit tenue informée suffisamment en amont de la préparation du prochain paquet de défense, nouvel ensemble de textes communautaires relatifs à la recherche et au développement, au contrôle des investissements, aux industries stratégiques ainsi qu'au traitement des informations classifiées.

Je profite de l'occasion qui m'est donnée pour souligner que nos industries de défense ont consenti des efforts très significatifs afin d'être particulièrement vertueuses, notamment à la suite de la ratification par notre Parlement des conventions de l'OCDE relatives à la lutte contre la corruption. En certains domaines, nous avons tendance à laver plus blanc que blanc. C'est tout à notre honneur, mais cela peut constituer un handicap pour nos industriels, compte tenu de la concurrence à laquelle ils doivent faire face.

Pour finir, je précise que le groupe Nouveau Centre votera en faveur de ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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