Je crains que nous nous engagions dans une judiciarisation croissante de la société française. Nous entérinons la position de la Cour de cassation selon laquelle une demande d'aide juridictionnelle interrompt le délai de péremption. Il sera facile, pour une personne qui veut bénéficier d'un laps de temps supplémentaire, de faire une demande d'aide juridictionnelle… C'est une source d'instabilité juridique majeure.
Toute personne doit avoir accès au droit et à la justice, dites-vous ; mais toute personne doit aussi être justement rétribuée pour son travail. Or, pour avoir pratiqué l'aide juridictionnelle, je sais que le travail fourni par l'avocat est fort mal rétribué. On se plaint souvent de ce que son travail est incomplet, en oubliant qu'il ne fait parfois même pas l'objet d'un paiement partiel – car on ne sait pas, au moment où l'aide juridictionnelle est attribuée, quel va être le type de procès, s'il sera complexe et s'il nécessitera de nombreuses interventions de l'avocat. La proposition n° 15, « Ouvrir des discussions avec les représentants des avocats en vue de déterminer un nouveau mode de rétribution des missions d'aide juridictionnelle sur la base d'un tarif horaire », me paraît donc bienvenue. Ne pourrait-on pas dire que tel montant d'aide juridictionnelle correspond à tant d'heures de travail et que tout dépassement doit déclencher une procédure tarifaire ? Je ne vois pas pourquoi les avocats seraient les seuls professionnels à travailler gratuitement ! Puisque vous voulez introduire l'action de groupe, on pourrait même imaginer que les avocats utilisent ce moyen pour tenter d'obtenir satisfaction sur ce point…