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Intervention de George Pau-Langevin

Réunion du 6 avril 2011 à 11h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGeorge Pau-Langevin, rapporteure :

Philippe Gosselin et moi-même avons en effet travaillé en bonne intelligence. Je tiens aussi à saluer le travail effectué par les administrateurs, qui se sont pleinement investis sur ces sujets parfois un peu arides.

Le dispositif très complet mis en place par la loi du 10 juillet 1991 pour assurer aux plus démunis l'accès au droit et à la justice visait à respecter un droit fondamental de toute personne, celui de pouvoir être assistée et faire valoir ses droits, dans le cadre d'un procès équitable. Mais depuis 1991, la société s'est beaucoup complexifiée. L'inflation des textes et l'explosion des contentieux ont accentué le besoin de justice et d'information juridique.

Première observation : le dispositif actuel ne répond plus aux besoins et aux attentes d'une large frange de la population, les plafonds de ressources fixés pour obtenir l'aide juridictionnelle étant très bas – 929 euros de revenus nets mensuels pour l'aide juridictionnelle (AJ) totale, 1393 euros de revenus nets mensuels pour l'aide juridictionnelle partielle. De surcroît, l'AJ partielle est un échec, notamment faute d'accord avec les professionnels : les personnes concernées restent dans l'ignorance du montant des honoraires qui restera à leur charge.

Deuxième observation : les bureaux d'aide juridictionnelle ne fonctionnent pas tous de la même façon. En particulier, ils n'appliquent pas tous les mêmes critères d'appréciation des ressources.

Quant à l'assurance de protection juridique, supposée prendre le relais – et dont il faut même vérifier, avant attribution d'une aide juridictionnelle, que la personne ne peut pas bénéficier –, elle ne fonctionne pas comme il convient : beaucoup de gens ignorent qu'une clause d'assurance de protection juridique est incluse dans leur contrat d'assurance automobile ou multirisques habitation, ou encore dans leur contrat de carte bancaire, et ne sont pas en mesure de s'en prévaloir en cas de besoin. Il est clair qu'en ce domaine, les particuliers sont très mal informés.

Un autre problème concerne la rétribution des avocats qui assurent des missions d'aide juridictionnelle. Assez inégale et parfois beaucoup trop modique, elle ne garantit pas un service de qualité. De surcroît, un « ticket modérateur » a été introduit cette année. Il faudrait revoir tout le système, notamment celui des unités de valeur, car il ne correspond plus aux procédures complexes qu'il s'agit de prendre en charge.

Le montant des crédits que notre pays consacre à l'aide juridictionnelle est très insuffisant, comme le confirme notre classement par rapport aux autres pays européens. C'est d'autant plus vrai que la réforme de la garde à vue entraîne de nouveaux besoins, de même que le développement du contentieux des questions prioritaires de constitutionnalité et l'explosion des contentieux administratifs, notamment au sujet du droit au logement opposable (DALO). Par ailleurs, l'aide juridique devrait concerner également la rédaction d'actes, conformément à la loi de 1991 ; or pour l'instant, aucun budget ne permet d'assurer cette mission.

S'agissant de l'aide juridictionnelle, des économies sont possibles : le remboursement d'une partie des sommes exposées par l'État peut être demandé à la partie condamnée aux dépens ou la partie perdante qui ne bénéficie pas de l'aide juridictionnelle ; l'AJ peut être retirée en tout ou partie en cas de fausse déclaration ou en cas de retour à meilleure fortune du bénéficiaire. Mais tout cela se pratique peu. Sans doute faudrait-il utiliser davantage ces possibilités, afin d'utiliser les crédits de l'aide juridictionnelle à meilleures fins ; je ne crois pas, cependant, qu'on puisse en attendre beaucoup. Des recettes complémentaires sont donc nécessaires.

En ce qui concerne l'accès au droit, nous avons constaté une situation très inégale. La fermeture de tribunaux d'instance devrait conduire les maisons de la justice et du droit (MJD) à jouer un rôle essentiel ; or le maillage du territoire est très insuffisant.

Les conseils départementaux de l'accès au droit et à la justice (CDAD) peinent à imprimer leur marque ; leurs rapports avec les maisons de la justice et du droit ne sont pas assez clairement établis. Là aussi, une rationalisation serait nécessaire, notamment pour mieux mettre à profit l'enthousiasme des bénévoles.

Ce bilan comporte donc un ensemble d'éléments positifs, mais on est bien loin de ce qui serait nécessaire pour répondre aux besoins.

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