Dans le même esprit, j'ai déposé, avec de nombreux collègues, plusieurs amendements sur des points majeurs du texte.
Je souhaite, notamment, que l'on revienne sur le délai de carence des deux heures fixé par le texte pour débuter l'audition et permettre à l'avocat de venir. Ce délai, même si l'on peut y déroger dans des cas extrêmes, va être très compliqué à mettre en oeuvre. Que va-t-on faire du gardé à vue pendant ce délai ? Cela ne constitue-t-il pas une inégalité entre territoires urbains et ruraux ? Ne va-t-on pas, de fait, augmenter la garde à vue de deux heures, puisque le gardé à vue devra nécessairement rester à proximité des locaux d'audition ? Sollicité par les syndicats de police sur ce point, je demande également que le régime de la garde à vue prononcée à l'extérieur des locaux, notamment lors de perquisitions, soit clarifié, afin de reporter automatiquement la présence de l'avocat dans ce cas.
Enfin, il me semble indispensable de réfléchir, afin de la clarifier, à la question des moyens matériels et financiers engendrés par cette réforme. À l'heure où nous cherchons à mutualiser et à rationaliser toujours plus nos moyens, l'intervention accrue des avocats va nécessiter un coût important qui ne sera pas, de mon point de vue, totalement compensé par la baisse du nombre de gardes à vue et l'augmentation budgétaire de l'aide juridictionnelle. Le général d'armée, Jacques Mignaux, a d'ailleurs alerté la représentation nationale par un courrier en date du 18 janvier sur ce sujet.
Monsieur le garde des sceaux, je suis certain que ce texte va rendre encore plus difficile le travail quotidien des forces de l'ordre, accroître considérablement leurs formalités administratives et attiser les incompréhensions entre policiers et avocats. Si le texte est voté en l'état, je ne nous donne que quelques semaines pour nous rendre compte qu'il n'est pas suffisamment équilibré.
Sauf à ce que des modifications profondes soient adoptées et à ce que vous nous apportiez la garantie que la Cour de cassation ne mettra pas en oeuvre ses intentions en contrepartie d'un vote conforme, je m'abstiendrai de voter ce texte. Je ne souhaite pas, pour les victimes comme pour les policiers, que nous nous engagions dans une voie qui ne pourrait éviter la double peine. (Applaudissements sur divers bancs du groupe UMP.)