J'ai la conviction que la loi HPST restera dans notre histoire politique comme l'une des grandes lois de réforme structurelle mises en oeuvre par cette majorité. L'objet de la proposition de loi dite « proposition Fourcade » n'est bien sûr pas d'en remettre en cause les grands principes. Il s'agit simplement de corriger certaines dispositions dont l'application s'est révélée trop complexe et de revenir sur certains dispositifs excessivement lourds sur le plan administratif et très mal perçus par les professionnels de santé, sans qui aucune grande réforme sanitaire ne peut être menée.
L'article 1er vise à créer un nouveau type de société civile, la société interprofessionnelle de soins ambulatoires, la SISA, qui permette le développement de nouveaux modes de rémunération et encourage ainsi l'exercice regroupé. Il s'agit de combler un véritable vide juridique dénoncé par tous les professionnels que nous avons rencontrés, et qui hypothéquait le développement des maisons et des pôles de santé. Le texte a déjà été amélioré par le Sénat, et nous proposerons des amendements visant à conforter encore cette innovation.
L'article 2 est un grand progrès en ce qu'il renforce le statut juridique des maisons de santé. Je sais que nous sommes tous ici attachés au développement de ces structures interprofessionnelles comme réponse efficace aux déserts médicaux et à la désaffection des jeunes vis-à-vis de la médecine libérale. Je vous proposerai donc un certain nombre d'amendements pour sécuriser leur activité, pour préciser leur champ d'action et pour garantir une certaine souplesse de leur fonctionnement afin que les professionnels restent au coeur de chaque projet.
Sur le sujet du partage des données au sein des maisons de santé, enjeu majeur de leur développement et objet de longs débats au Sénat, je proposerai un amendement qui permettra de garantir à la fois la continuité des soins et le respect de la vie privée du patient.
L'article 3 supprime le volet coercitif du contrat de santé-solidarité et prévoit l'élaboration d'un contrat type défini par l'Union nationale des caisses d'assurance maladie, l'UNCAM, et par au moins une organisation représentative de médecins. Nous avons préféré la négociation à l'option coercitive, mal comprise par les médecins et finalement contre-productive. Il est évident que nous ne résoudrons pas les problèmes de démographie médicale sans les professionnels. C'est pourquoi le contrat santé-solidarité a été inscrit au programme des futures négociations conventionnelles, dont le champ comprend les problèmes de démographie médicale.
L'article 3 bis vise à préciser les conditions d'indemnisation des médecins libéraux participant à la permanence des soins dans les établissements de santé, publics ou privés. Une indemnisation commune évitera de favoriser un secteur par rapport à un autre et permettra d'uniformiser l'encadrement de la permanence des soins.
Je proposerai par ailleurs le rétablissement de l'article 4, qui supprime l'obligation de déclaration d'absence pour les médecins, afin de leur laisser la responsabilité, collective, d'organiser la continuité des soins.
L'article 5 propose de rétablir la base juridique des contrats de bonne pratique et des contrats de santé publique, abrogée par l'ordonnance de coordination avec la loi HPST du 23 février 2010, au bénéfice des nouveaux contrats instaurés par la loi HPST. En l'attente de nouveaux outils contractuels, il importe en effet que les professionnels de santé s'étant engagés individuellement dans ces dispositifs puissent continuer à exercer dans des conditions juridiques solides.
L'article 6 revient sur l'article 57 de la loi HPST, qui prévoyait que lorsqu'un acte médical comprend la pose d'un dispositif médical, le praticien doit détailler au patient le prix d'achat de chaque élément de l'appareil, ainsi que le prix de toutes les prestations associées. Cet article a donné lieu à de nombreux débats. Nous avons recherché avec les professionnels et les associations de consommateurs une solution de compromis. Je vous proposerai donc un amendement qui prévoit une information dissociée sur le prix de la prothèse et sur celui de la prestation du professionnel et, surtout, une information relative à la provenance du dispositif médical utilisé. Cette transparence ne pourra certainement qu'être appréciée par les patients comme par les professionnels de santé, qui ne souhaitent pas être soupçonnés de tirer des profits indus de l'importation de prothèses.
S'agissant des établissements de santé, le titre I de la loi HPST a profondément modifié leur statut, leur gouvernance et leurs missions. Si les nouveaux outils de la gouvernance se sont mis en place sans difficulté, il est encore trop tôt à mon sens pour y apporter d'éventuels aménagements : il convient d'abord de laisser aux acteurs le temps de s'approprier pleinement ce nouveau cadre. La proposition de loi initiale ne concernait donc pas ce titre, dont les conditions de mise en oeuvre sont d'ailleurs encore en cours d'examen par le comité chargé « du suivi de la réforme de la gouvernance des établissements », qui doit remettre, au plus tard le 21 juillet, un rapport au Parlement susceptible de servir de base à d'éventuels ajustements.
La proposition comporte néanmoins quelques exceptions à cette règle. En premier lieu, l'article 9 a pour objet d'assouplir et d'adapter le statut des fondations hospitalières pour permettre à celles-ci de s'affranchir des règles applicables aux fondations reconnues d'utilité publique, dont la procédure de création est particulièrement complexe et dont la gouvernance est inadaptée au but recherché.
De la même façon, je vous proposerai de rétablir l'article 12, supprimé dès l'examen en commission des affaires sociales du Sénat, qui vise à remédier aux difficultés qu'éprouvent de nombreux établissements de santé, pour des raisons de place, à conserver les dossiers médicaux sur support papier. Il conviendrait de les doter d'un dispositif plus moderne permettant le transfert de ces données auprès d'un tiers agréé.
S'agissant des coopérations hospitalières, la commission du Sénat avait souhaité, pour répondre aux inquiétudes suscitées par les groupements de coopération sanitaire (GCS) érigés en établissements de santé, introduire un article additionnel 14 A abrogeant les articles du code de la santé publique qui précisent leur régime juridique. Je me félicite de l'adoption en séance publique d'un amendement du Gouvernement réécrivant cet article de manière, d'une part, à rétablir la catégorie des GCS érigés en établissements de santé pour ne pas compromettre un certain nombre de projets de recomposition de l'offre de soins sur un territoire, et, d'autre part, à rétablir la possibilité pour les membres d'un GCS de moyens public-privé de choisir librement la nature juridique de leur groupement. Je sais que plusieurs d'entre vous ont encore de fortes réserves quant au caractère opérationnel du recours au GCS-établissement de santé dans le cadre de coopérations entre partenaires publics et privés, et ont déposé des amendements visant à redonner aux membres d'un GCS la possibilité d'exploiter une autorisation d'activité de soins restant détenue par l'un d'entre eux sans que le GCS soit pour autant titulaire de l'autorisation et érigé en établissement de santé. Je vous invite donc à examiner à nouveau cette question, car je ne pourrai pas être favorable à ces amendements qui ne sont pas conformes au droit des autorisations sanitaires, ne garantissent pas les règles de qualité et de sécurité des soins et posent de graves questions de responsabilité, s'agissant de la prise en charge des patients comme du circuit de facturation. La rédaction proposée par le Gouvernement est une avancée saluée comme telle par les acteurs que nous avons rencontrés. Il convient d'en rester là pour le moment : les GCS sont un outil important dans l'esprit de la loi HPST et il faut les conserver.
L'article 7 bis précise utilement le champ de compétence respectif des commissaires aux comptes et de la Cour des comptes en matière de certification des comptes des établissements publics de santé et l'article 19 favorise une meilleure synergie des hôpitaux d'instruction des armées avec les autorités sanitaires civiles, en ouvrant la possibilité pour le service sanitaire des armées (SSA) de participer aux réseaux de santé et aux groupements de coopération sanitaire.
Certains articles additionnels reprennent des dispositions déjà adoptées par le Parlement, mais censurées comme cavaliers sociaux : ainsi l'article 9 bis A étend le rôle de la CNAMTS en la chargeant de publier annuellement un bilan national et comparatif par région de la prévalence des actes et interventions chirurgicales réalisés par les établissements de santé. Je vous proposerai toutefois d'élargir ce bilan aux séjours effectués dans ces mêmes établissements et d'en confier la responsabilité aux ARS.
L'article 17 dispose quant à lui que le schéma régional d'organisation des soins (SROS) favorise le développement des alternatives à l'hospitalisation et des activités de dialyse à domicile. Je vous proposerai de le supprimer, si intéressant soit-il, car on ne peut consacrer un article à chaque activité.
Dans le secteur sanitaire encore, l'article 14 bis, issu d'un amendement déposé en séance par le Gouvernement, vise à proroger la durée de validité des SROS en attendant l'élaboration des nouveaux schémas régionaux, dans le cadre des programmes régionaux de santé. Il faudra aussi simplifier la procédure d'élaboration de ces documents, en particulier pour la phase de consultation des collectivités locales. Il est inutile en effet d'échanger des tonnes de papier.
À la demande du Gouvernement, nous débattrons de deux sujets. Sur la réforme de la biologie médicale, il conviendra que la ratification de l'ordonnance intervienne dans les meilleurs délais, afin de prendre en considération les inquiétudes du secteur. Par ailleurs, nous ne pouvons pas, à propos d'un texte consacré aux professionnels libéraux, ne pas évoquer la responsabilité civile personnelle. Sur ce sujet très important, je vous proposerai une première série de mesures visant à mettre en oeuvre le rapport Johanet, qui me semble faire consensus.
Toujours dans le secteur sanitaire, l'article 18 reprend un dispositif déjà adopté en PLFSS, mais censuré par le Conseil constitutionnel, qui clarifie les modalités de regroupement des officines de pharmacie.
L'article 10 modifie les conditions de mise en oeuvre de la réserve sanitaire à la lumière de l'expérience de la grippe A(H1N1) et l'article 11 modifie le dispositif relatif à la lutte contre la propagation internationale des maladies.
L'article 9 bis représente la première mise en oeuvre d'un « sunshine act » à la française. Il n'épuise cependant pas le sujet, qui fera l'objet d'un texte spécifique à l'issue des Assises du médicament et des travaux parlementaires en cours. Des amendements vous seront soumis à ce propos.