Monsieur le président, monsieur le ministre d'État, messieurs les présidents des commissions, mes chers collègues, ce débat « Europe et Méditerranée » se doit de prendre en considération l'ampleur des bouleversements qui agitent les pays du sud de la Méditerranée et qui agiteront peut-être demain les pays du Proche et du Moyen-Orient.
Avec pour seule arme leur courage et la force du désespoir, les peuples des pays arabes – car c'est bien des peuples qu'il s'agit – s'affranchissent les uns après les autres du joug des régimes autoritaires qui les opprimaient depuis des décennies. Ce printemps des peuples arabes, qui n'est pas sans rappeler ce que nombre de pays européens, dont la France, ont vécu au milieu du XIXe siècle, constitue un défi pour l'avenir, une merveilleuse promesse d'instauration d'une véritable démocratie.
C'est l'Histoire qui s'écrit sous nos yeux, l'Histoire avec un grand « H », celle qui fait que plus rien ne peut être comme avant. C'est tellement vrai qu'il eût été on ne peut plus légitime d'espérer que nous aurions pris toute la mesure de l'événement et que la représentation nationale aurait été appelée à participer à un véritable débat au cours duquel eussent été posées les grandes questions de fond. Ce véritable débat sera nécessaire, et ce très rapidement. Dans vos propos, monsieur le ministre d'État, j'ai cru comprendre que vous y étiez favorable.
Ce qui nous est proposé aujourd'hui n'a en effet de débat que le nom et peine à rendre compte de notre perception des mutations profondes qui s'opèrent depuis quelques mois sous nos yeux. Tout comme il paraît difficile d'évoquer notre vision de l'avenir, de notre avenir commun fondé sur une véritable politique partenariale avec les pays riverains de la Méditerranée et, au-delà, avec l'ensemble des pays africains et des pays du Proche et du Moyen-Orient. Car – faut-il le rappeler ? – tout un pan de l'avenir de l'humanité s'articulera demain autour de ce bassin méditerranéen ; cela concerne aussi l'Europe et l'ensemble du continent africain.
Un tel enjeu mérite un plus long développement que ne le permet ce qui est accordé aujourd'hui. Il faut considérer cette séance comme une première approche qui doit susciter une réflexion de fond en vue d'un véritable débat autour des grandes problématiques de l'instauration d'une vie politique démocratique respectueuse des droits de l'homme, de la sécurité, de l'économie et de l'emploi, de l'énergie – à laquelle vous avez fait allusion, monsieur le ministre d'État ; je pense notamment au développement du solaire, du photovoltaïque, de l'éolien –, de l'environnement et des infrastructures de transport qui jouent un rôle essentiel dans le développement de tout pays – transport maritime, aéronautique, ferroviaire et routier –, sans oublier, bien sûr, l'éducation, la formation, la protection sociale et la santé.
Tout cela sans perdre de vue que ces questions concerneront demain la vie de deux milliards d'individus, soit un bon quart de l'humanité, et que l'avenir de l'Europe sera méditerranéen ou ne sera pas. L'Europe est aujourd'hui à la croisée des chemins : soit elle fait le choix de la marginalisation, en s'abritant et en s'enfermant derrière ses frontières, se condamnant inexorablement au déclin, soit elle choisit l'ouverture adossée à une véritable politique de co-développement tournée vers ses partenaires naturels du pourtour méditerranéen et, au-delà, de toute l'Afrique et même de l'Asie mineure.
Le printemps des peuples arabes est porteur d'espoir en ce sens. Sachons saisir l'opportunité que cela représente, soyons au rendez-vous de l'histoire. Cela doit être pour nous un devoir, au nom des générations futures.