Je tiens, tout d'abord, à vous remercier, messieurs les présidents de commission, d'avoir pris l'initiative de ce débat sur l'Europe et la Méditerranée. Au-delà de la crise libyenne, nous devons, en effet, réfléchir à l'avenir des relations euro-méditerranéennes dans leur ensemble. C'est pour la France, pour l'Europe, pour les pays du sud de la Méditerranée, un enjeu majeur.
Depuis 1995, l'Union européenne a fait de ses relations avec la Méditerranée une priorité, en engageant, dans le cadre du processus de Barcelone, une politique d'association et d'ouverture commerciale en direction de ses voisins du Sud. Cette politique, pour diverses raisons que je n'analyserai pas ici, n'a pas donné les résultats souhaités. C'est la raison pour laquelle, en 2008, le Président de la République a lancé le projet d'Union pour la Méditerranée, avec pour objectif de créer un partenariat équilibré, d'égal à égal, entre les rives Nord et Sud, reposant sur des projets concrets. Malheureusement, l'Union pour la Méditerranée s'est heurtée – et j'y reviendrai – au blocage du processus de paix au Proche-Orient.
Aujourd'hui, les bouleversements en cours sur la rive Sud montrent à quel point cette initiative était prémonitoire. Ils montrent à quel point nous partageons une communauté de destin avec nos voisins méditerranéens. Si la démarche de partenariat qui sous-tend l'Union pour la Méditerranée prend tout son sens, c'est bien aujourd'hui, au moment où nous allons avoir pour interlocuteurs de nouveaux gouvernements responsables et incarnant une volonté de changement démocratique.
En Tunisie, avec la « révolution du jasmin », en Égypte, avec la journée du 25 janvier, la jeunesse arabe – dont le président Poniatowski a souligné le rôle décisif – a, en effet, exprimé son aspiration à la démocratie et à l'État de droit. À travers son courage, sa maturité et son esprit de responsabilité, elle a donné l'exemple. De proche en proche, c'est un grand vent de liberté qui se propage dans l'ensemble de la région. Chacun à son rythme, les peuples sont en train d'écrire une nouvelle page de leur histoire. Chacun avec ses spécificités, ils sont en train de créer leur propre modèle.
Cette nouvelle donne qui se dessine au sud de la Méditerranée, l'Europe doit l'accompagner. Elle doit d'abord l'accompagner, sans paternalisme ni idée préconçue, pour que la transition démocratique puisse être menée à bien. C'est dans cet esprit que l'Union européenne a proposé son appui au processus électoral, pour l'organisation des élections ou l'envoi de missions d'observation, aux pays qui le souhaitent. C'est également dans cet esprit que le Conseil européen a salué le discours du roi du Maroc annonçant des réformes institutionnelles ouvrant la voie à une monarchie constitutionnelle et confirmé le soutien de l'Union européenne à la transition démocratique en Égypte.
C'est aussi la raison pour laquelle le Conseil européen a réaffirmé son soutien à la Tunisie, y compris au moyen d'un statut avancé Union européenne-Tunisie, en vue de l'élection d'une assemblée constituante le 24 juillet. La Tunisie a donné le signal de la « nouvelle renaissance arabe ». Elle doit être demain un État démocratique, laïc et moderne, point d'ancrage majeur de la démocratie sur la rive sud de la Méditerranée. J'ai été très intéressé, monsieur Poniatowski, par l'évocation de votre récent voyage en Tunisie. J'envisage, moi-même, de m'y rendre, dans un délai aussi rapproché que possible.
C'est enfin la raison pour laquelle l'Union européenne entend jouer tout son rôle pour trouver une issue à la crise en Libye : d'abord, en continuant à accentuer la pression par des sanctions pour obtenir le départ de Kadhafi ; ensuite, en marquant sa disponibilité à soutenir le peuple libyen dans la transition qu'il lui appartient de conduire vers la démocratie, dans le respect de la souveraineté et de l'intégrité territoriale de la Libye ; enfin, en appuyant des opérations humanitaires et de protection civile, y compris par des moyens maritimes.
Je ne reviens pas sur l'affaire libyenne, que j'ai eu l'occasion d'évoquer tout à l'heure, en réponse à une question d'actualité, notamment après le sommet de Londres. Mais je vais quand même vous donner, monsieur le président de la commission des affaires étrangères, quelques éléments de réponse à la question que vous vous posiez sur les sanctions de l'Union européenne vis-à-vis de ceux qui ont détourné des fonds au détriment des peuples du Sud.
En ce qui concerne la Tunisie, l'Union européenne a procédé au gel des fonds de Ben Ali et de sa femme le 31 janvier 2011, et quarante-six individus supplémentaires ont été visés par l'Union européenne le 4 février.
En ce qui concerne l'Égypte, l'Union européenne a gelé, le 21 mars, les fonds de Hosni Moubarak, de sa femme et de dix-sept de ses proches.