Cela promet en effet. Accrochez-vous aux branches ou attachez votre ceinture !
Issue d'un texte adopté à l'unanimité par le Sénat le 27 janvier dernier, la proposition de loi intervient six ans après l'adoption de l'ordonnance du 4 janvier 2005 portant statut général des fonctionnaires des communes et groupements de communes de Polynésie française. Que fait donc notre vibrionnant Président de la République, qui nous fait légiférer sans cesse et laisse dans les tiroirs, mangés par les mites, des textes pourtant écrits il y a si longtemps ? Il est vrai que, maintenant qu'il est promu au rang de maréchal trois étoiles, il aura encore moins de temps pour s'occuper de ces lointains territoires.
Les décrets d'application de cette ordonnance n'ont jamais été publiés, alors que le principe d'un statut des agents communaux « adapté à la situation particulière des communes du territoire, et notamment à leurs capacités budgétaires » avait été posé par le législateur dès 1994, dans la loi d'orientation pour le développement économique, social et culturel de la Polynésie française.
Nous ne pouvons que déplorer le peu de diligence dont nous faisons preuve collectivement dès lors qu'il est question des collectivités d'outre-mer. Ce n'est pas une spécialité qu'il faut abandonner à nos collègues d'outre-mer, aussi compétents soient-ils. C'est une compétence qui doit vraiment être assumée par nous tous. Il est invraisemblable que l'outre-mer soit à ce point considéré comme secondaire qu'il faille plus de quinze ans entre l'affirmation de principes et une proposition visant à les mettre en oeuvre concrètement. Nous ne pouvons donc que saluer l'initiative de nos collègues et le travail mené en amont par les élus polynésiens et le syndicat pour la promotion des communes de Polynésie.
Cette initiative nous offre l'opportunité de franchir une étape décisive dans la mise en oeuvre et la consolidation du principe de libre administration des collectivités locales. L'instauration d'une fonction publique communale représente un préalable indispensable, même si le manque d'autonomie fiscale des collectivités considérées demeure un handicap sérieux. N'oublions pas en effet que l'une des spécificités polynésiennes est le manque d'indépendance des communes, tant par rapport à l'État, puisqu'elles sont soumises à sa tutelle administrative, que par rapport à la collectivité du pays, puisqu'elles sont soumises à sa tutelle financière.
Nous ne pouvons non plus ignorer la question des pratiques observées en Polynésie. J'y reviens sur un autre plan. La mise en examen, la semaine dernière, à Tahiti, du président de la Polynésie française, Gaston Tong Sang, pour complicité de favoritisme dans le dossier « Honotua », alors que la justice soupçonne un appel à concurrence faussé portant atteinte à l'égalité d'accès aux marchés publics, est là pour nous rappeler que l'éloignement insulaire et le bricolage institutionnel peuvent être les leviers de développement de pratiques un peu bizarres, pour employer un euphémisme.
C'est dire que nous accueillons avec bienveillance la proposition formulée par nos collègues d'actualiser l'ordonnance du 4 janvier 2005, afin de permettre la création d'une fonction publique communale obéissant aux principes républicains, sans que soient pour autant perdus de vue les spécificités et les besoins locaux.
Si nous sommes bien évidemment en accord sur le principe, nous retrouvons toutefois les divergences qui nous opposent déjà s'agissant de la fonction publique en métropole.
Il en va ainsi de l'application du service minimum dans les communes polynésiennes, ou encore de l'expérimentation de l'entretien annuel d'évaluation pour apprécier le travail accompli par l'agent public, lequel nous fait craindre que l'on ne promeuve ainsi une démarche de management par la performance, qui obligerait les agents à atteindre des objectifs individuels. Nous nous interrogeons aussi sur les recours offerts aux agents en cas de désaccord avec l'administration au sujet du résultat de cet entretien annuel.
Nous partageons par ailleurs les préventions exprimées en commission par René Dosière sur l'encadrement du recrutement discrétionnaire de collaborateurs de cabinet. Nous estimons nous aussi que les habitudes prises sous le gouvernement de M. Flosse soulèvent des interrogations. Il s'agissait de vos amis politiques, madame la ministre ! Rappelons que M. Flosse, dont le procès devrait débuter en avril, est mis en examen dans une affaire de quatre-vingt-quatre emplois présumés fictifs, et qu'il est par ailleurs sous la menace d'une année d'inéligibilité dans le procès en appel dit des « sushis de la Présidence », pour avoir fait régler sur fonds publics une soirée somptueuse où étaient surtout conviés les fidèles de son parti.