Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Bruno Sandras

Réunion du 23 mars 2011 à 15h00
Statut général des fonctionnaires de polynésie française — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBruno Sandras :

…et pour remercier Mme la ministre Marie-Luce Penchard pour son engagement. Il s'agit notamment, cette année, d'affirmer que les outre-mer, dont fait partie la Polynésie française avec ses quarante-huit communes, sont aussi « des lieux de solutions et de propositions », pour reprendre les propos du commissaire Daniel Maximin.

C'est dans cette perspective que la Polynésie française bénéficiera de la mise en application d'une réforme importante, celle de la fonction publique communale. En tant que député et en tant que maire, je veux vous dire que cette réforme est attendue depuis longtemps en Polynésie française, même si elle sera difficile à mettre en oeuvre pour les élus, compte tenu de tous les chantiers communaux qu'il faudra conduire en même temps. Cette réforme du fonctionnement de l'institution communale au travers d'un statut public de ses personnels est une belle et nécessaire ambition.

Pourtant, je veux à présent esquisser une mise en perspective de cette réforme, car celle-ci dépasse largement le seul aspect de modernisation juridique de la gestion des personnels. Cette réforme porte en elle quatre particularités qu'il faut, à mon sens, souligner pour mieux cerner l'importance de cette proposition de loi que j'ai déposée, mais également pour contribuer à éclairer les débats et les décisions que nous allons prendre.

Première particularité : nous devons garder à l'esprit que nous ne nous prononçons pas aujourd'hui sur une modernisation supplémentaire de la fonction publique territoriale en métropole et dans les départements de l'outre-mer, statut qui a fêté récemment ses vingt-cinq ans – c'est dire sa maturité. Il est question, en effet, de tout autre chose, à savoir de la création d'un statut des personnels dans les communes polynésiennes. Précisons que le personnel communal relevait auparavant du seul droit privé – ce qui doit certainement choquer mes collègues, mais c'est ainsi –, avec des contrats de travail négociés par le maire, au même titre qu'une entreprise commerciale, à ce détail près, ne l'oublions pas, qu'il s'agissait de leur confier l'exercice des missions de service public, y compris des missions de sécurité publique. L'instauration de la fonction publique communale permettra, en premier lieu, de corriger cela. Dès lors, c'est un changement considérable qui s'amorce.

Cette réforme vise à modifier radicalement les règles de droit et de fonctionnement du personnel communal, pour basculer vers une situation statutaire de droit public : les missions de service public seront désormais exercées par des fonctionnaires, c'est-à-dire des agents soumis à des droits et des obligations réglementaires.

Deuxième particularité : une ordonnance est par nature un texte de portée générale, mais ici la portée générale est « réduite », car cela vient intéresser seulement un périmètre circonscrit, et ce à double titre. Cette limitation est géographique et institutionnelle. D'une part, il s'agit d'une portion des outre-mer français, et, qui plus est, dans un espace régi par l'article 74 de la Constitution. D'autre part, la Polynésie française est, comme vous le savez, largement autonome, même si la fonction publique communale reste de la compétence de l'État, comme le précise la loi organique portant statut d'autonomie de la Polynésie française du 27 février 2004.

Cette réforme s'applique en conséquence, ni plus ni moins, aux seules communes de Polynésie française, y compris à leurs établissements publics. Il n'est pas question, dès lors, d'envisager l'examen des modalités d'extension de la fonction publique territoriale à la Polynésie française. Cette extension simple serait contraire aux principes et à l'esprit de l'autonomie de la Polynésie. Ce texte crée bel et bien une fonction publique à part entière, dotée de lieux de gouvernance et de gestion paritaire propres, à partir de règles de droit spécifiques. Il est donc normal que le texte soit à la confluence du droit commun et de spécificités locales fortes et reconnues.

Troisième particularité : cette réforme s'applique dans des communes jeunes. La majeure partie des communes de la Polynésie française ont vu le jour, en effet, par application de la loi du 24 décembre 1971 relative à la création et à l'organisation des communes dans le territoire de la Polynésie française. La fonction publique communale est une étape dans l'affirmation de cette institution de proximité par excellence. En Polynésie, la commune tient un rôle spécifique, si l'on considère la situation nationale.

Les maires polynésiens doivent assumer cette géographie unique que constitue l'insularité avec 118 îles dans un espace qui s'étend sur neuf fois la superficie de la métropole, qui comprend deux fuseaux horaires, où se répartissent près de 260 000 habitants, et ce à 18 000 kilomètres de l'hexagone. La commune est l'échelon institutionnel et administratif premier, en charge des infrastructures et des services essentiels, pour garantir notamment le ravitaillement des populations. Dans ce contexte vous comprendrez aisément que les 1000 élus communaux, dont les quarante-huit maires, ont des responsabilités toutes particulières. De même, le rôle des personnels est bien particulier.

Quatrième particularité, enfin : Nous avons, depuis 2005, une fonction publique communale. Mais il s'agit d'une fonction publique sans contenu, puisque dépourvue de statut. Ce statut deviendra réalité dès la publication des textes d'application. C'est la raison pour laquelle, au gré des jurisprudences nouvelles du tribunal administratif de Papeete, les élus communaux en Polynésie française sont, d'ores et déjà, dans l'obligation d'appliquer quelques articles de l'ordonnance en matière de recrutement, notamment. Cette situation intermédiaire provisoire entre un droit privé et une future fonction publique dure depuis six années, ce qui, vous en conviendrez, n'est pas satisfaisant. Le calendrier de cette réforme est aussi une originalité en soi et je formule de nouveau le voeu que 2011 soit, en Polynésie française, l'année de la mise en oeuvre de la fonction publique communale.

En gardant à l'esprit l'ensemble des particularités que je viens d'évoquer, nous voyons bien que nous allons nous prononcer sur un texte fondateur, de portée locale qui constitue une source d'innovations majeures.

L'enjeu est considérable, aussi bien pour les élus communaux que pour les personnels. Il est donc nécessaire de veiller à la construction collective et consensuelle de la réforme. Les élus communaux de Polynésie française l'ont compris dès 2004. Il s'agit bien, avant tout, d'une réforme répondant à un enjeu d'intérêt général. C'est la raison pour laquelle, avec mon collègue sénateur polynésien Richard Tuheiava et grâce à l'appui technique du syndicat pour la promotion des communes de la Polynésie française qui réunit les quarante-huit communes, nous avons déposé cette proposition de loi dans chaque assemblée. Ce travail, auquel j'ai personnellement eu l'honneur de participer avec les services de Mme la ministre, est, je tiens à le rappeler, le résultat d'une longue concertation entre les maires.

Pour toutes ces raisons, vous comprendrez qu'en Polynésie française, nous attendons le démarrage de cette réforme. Je ne parlerai par d'impatience, mais d'un besoin d'avancer dans ce mouvement de modernisation. À cet égard, les décrets d'application doivent être publiés dans quelques semaines.

Vous comprendrez également pourquoi il est nécessaire que 2011 soit l'année de la fonction publique dans les communes de Polynésie française. C'est, je l'espère, dans cet état d'esprit que nous allons étudier cette proposition de loi, votée, il est bon de le souligner, à l'unanimité au Sénat qui s'est inscrit pleinement dans cette démarche de consensus.

Je remercie pour son travail précis M. le rapporteur, Didier Quentin, toujours attentif aux évolutions de l'outre mer en général et de la Polynésie française en particulier. La commission des lois a souhaité, en effet, apporter quelques modifications, tout en respectant les objectifs de la réforme que j'ai rappelés. Pour ma part, j'ai déposé quelques amendements, et je remercie mon collègue Michel Buillard, ainsi que l'Assemblée de la Polynésie française, de leur soutien. Ces amendements ont pour finalité d'améliorer à la marge le texte sur quelques points très précis.

Pour terminer, j'espère, tout simplement, mes chers collègues, votre soutien à cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion