Madame la présidente, madame la secrétaire d'État chargée de la santé, monsieur le rapporteur de la commission des affaires sociales, mes chers collègues, le projet de loi que nous examinons touche un sujet sensible : la privation de liberté, même pour raisons médicales, est une question que nous devons traiter avec la plus grande prudence et la plus grande équité.
Les avancées contenues dans le texte, en particulier la nouvelle terminologie autour de la notion de soins, sont intéressantes. Plus qu'une nouvelle définition des soins psychiatriques, ce texte impulse une nouvelle culture de la prise en charge des patients en hôpital psychiatrique.
En substance, c'est un projet de loi équilibré : il répond aux inquiétudes de nos concitoyens qui réclament à juste titre des garanties contre les risques que la liberté de certains malades psychiques fait peser sur l'ordre public et il répond aux intérêts du malade.
Il se conforme au nécessaire respect du droit des patients et le renforce même en instaurant un contrôle judiciaire par le juge des libertés et de la détention en cas de maintien d'une personne en hospitalisation complète sans son consentement au-delà de quinze jours. La procédure d'admission en soins sans consentement sera globalement simplifiée, ce qui constitue une mesure de bon sens, car les familles rencontrent aujourd'hui des difficultés pour faire hospitaliser un proche quand celui-ci ne représente pas une menace directe pour l'ordre public. C'est souvent au moment d'une crise ou d'un événement grave qu'elles se tournent, désespérées, vers l'hospitalisation d'office.
C'est avant tout en tant qu'élue de terrain que j'ai souhaité m'exprimer. Élue d'un territoire rural, maire d'une commune du Loiret de 4 000 habitants, de 2001 à 2008, je tiens à souligner la complexité du dispositif actuel de l'hospitalisation d'office en milieu rural. Heureusement peu fréquente, l'hospitalisation sous contrainte constitue une charge très lourde à gérer pour les élus de ces territoires. Et si le projet de loi va dans le bon sens pour ce qui est des patients, on peut se demander s'il sera applicable dans de bonnes conditions sur tout le territoire.
Quel maire de petite commune ne se heurte pas à des difficultés pour appliquer les mesures d'hospitalisation sous contrainte ? Cette procédure lourde et chronophage nécessite en effet la mobilisation pendant plusieurs heures des élus, des médecins, des forces de gendarmerie – deux gendarmes au minimum, qui doivent parfois suivre l'ambulance jusqu'à l'hôpital psychiatrique pour éviter tout incident. Ajoutons que toutes ces difficultés sont accentuées la nuit lorsque les effectifs sont réduits. Un cas particulièrement douloureux a ainsi nécessité de mobiliser durant cinq heures quatre gendarmes, soit le tiers des effectifs d'une communauté de brigade, et un médecin. Or, en milieu rural, du fait de leur emploi du temps surchargé, les médecins ne sont pas toujours disponibles immédiatement et leur raréfaction va alourdir le processus.
Toutes les personnes impliquées dans la procédure de l'hospitalisation sans consentement sont aux prises avec la complexité de la marche à suivre. Élus ruraux, médecins, gendarmes sont confrontés à une évolution permanente des textes qui réclame d'être certain de disposer de la dernière version pour ne pas risquer de rendre la procédure caduque.
De surcroît, en milieu rural le placement d'office requiert de tels efforts matériels et humains qu'on a souvent l'impression qu'ils sont inutiles. Ce sentiment fait place au découragement lorsque le patient concerné sort rapidement du centre hospitalier.
Désormais, les préfets devront donner une autorisation explicite pour la sortie du patient. Le projet renforce également les conditions de sortie en obligeant dans certains cas les patients à prolonger les soins à leur domicile, ce qui, je l'espère, soulagera les familles souvent démunies face à leurs proches malades et réduira le temps et l'énergie qu'il faut leur consacrer.
Le dispositif mis en place pose toutefois la question du contrôle des soins ambulatoires. Les déplacements de professionnels et l'accès au domicile de la personne suivie sont deux éléments incontournables à prendre en compte dans l'application de cette mesure.
Pourrons-nous répondre à ces attentes avec des moyens efficaces, tant humains que financiers ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)