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Intervention de Hervé de Charette

Réunion du 16 mars 2011 à 15h00
Déclaration du gouvernement préalable au conseil européen et débat sur cette déclaration

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHervé de Charette :

Nous avons une consolation, monsieur le ministre d'État : vous êtes là ; j'ai cru un moment que vous ne le seriez pas.

Je voudrais d'abord faire quelques observations sur l'état financier de l'Europe, car force est bien de reconnaître que l'Europe a failli, au cours des dernières années, à ses devoirs concernant le respect des règles et des normes fixées par le pacte de stabilité et de croissance, qui engageait pourtant tous les pays de la zone euro.

Certains pays ont triché, beaucoup ont fait preuve de laxisme – c'est le cas de la France – et les institutions européennes, qu'il s'agisse de la Commission ou du Conseil européen, n'ont pas pu, pas su ou pas voulu assumer leurs responsabilités. Ce sont ces erreurs accumulées qui se paient aujourd'hui, en pleine crise économique, au prix fort.

Le Nouveau Centre plaide donc pour que les pays de la zone euro soient astreints à plus de rigueur. Vouloir l'Europe, c'est vouloir l'euro ; vouloir l'euro, c'est en accepter la discipline. Je tiens à dire au passage que les critiques si souvent adressées à la Banque centrale européenne, accusée d'excès de rigueur, me paraissent totalement injustifiées. Tant que le gouvernement économique européen restera à l'état de projet, tant qu'il n'y aura donc ni politique économique, ni politique budgétaire, ni politique sociale européenne, la seule clef d'accès à la politique européenne restera la politique monétaire, c'est-à-dire l'euro et la Banque centrale européenne.

Monsieur le ministre d'État, vous nous trouverez à vos côtés pour soutenir les décisions à prendre concernant la crise des dettes souveraines. Cela concerne la décision déjà prise lors du précédent Conseil européen, concernant la capacité effective de prêt du Fonds européen de stabilité financière ; cela concerne le Mécanisme européen de stabilité que vous allez, on peut l'espérer, adopter au prochain conseil et qui est appelé à devenir permanent à partir de 2013, avec un montant de crédits disponibles de 500 milliards d'euros.

Enfin, notre soutien concerne aussi la refonte du pacte de stabilité et de croissance, qui doit obliger les États membres, au prix de sanctions plus ou moins automatiques, à revenir progressivement au niveau d'endettement budgétaire initialement prévu.

En la matière, la volonté de construire un mécanisme stable et permanent de soutien des États confrontés à la crise des dettes souveraine doit inspirer la politique européenne de la France. Toutefois, ce doit être à la stricte condition que l'ensemble des pays de la zone reviennent progressivement dans les clous des règles fixées par le pacte de stabilité et de croissance.

Ce principe de rigueur s'applique évidemment, et en premier lieu, à la France. Monsieur le ministre d'État, nous attendons que le gouvernement auquel vous appartenez rappelle clairement son engagement en ce sens, et qu'il prenne les dispositions pour s'y tenir.

J'en viens enfin à un sujet plus difficile. L'initiative franco-allemande d'un pacte de compétitivité, devenu pacte pour l'euro, est, à mon sens, mal engagée. Je ne vous cache pas que ce projet suscite de notre part un certain nombre de réserves.

Nous sommes partisans de la rigueur financière ; par le passé, nous nous sommes souvent plaints que les gouvernements français, de droite ou de gauche, aient pris d'inutiles et malheureuses libertés avec la règle d'or de la rigueur. Néanmoins, l'Europe n'est pas simplement financière : elle est aussi une Europe des peuples. Si nous voulons exiger des gouvernements qu'ils règlent les questions des retraites ou des salaires au nom de la compétitivité de l'économie européenne, il faut aussi que la compétitivité soit au service des hommes et de l'emploi. Elle ne doit pas seulement se traduire par des règles rigoureuses appliquées par tous ; elle est aussi la mise en valeur de la richesse humaine de nos nations.

Monsieur le ministre d'État, qu'est devenu l'engagement pris à Lisbonne de faire de l'Europe le champion du monde de la connaissance ? Qu'est-ce qu'un pacte de compétitivité dans lequel on ne parlerait ni de l'accès des jeunes à la formation dans une Europe où le taux de chômage de ces derniers est supérieur à 20 %, ni de l'emploi des seniors, ni de l'accroissement des inégalités sociales, ni du désarroi qui prévaut dans certaines de nos grandes cités urbaines. Monsieur le ministre d'État, je vous avoue que, sur ce point, nous comprenons le mécontentement syndical qui nous paraît légitime.

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