Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, le 2 décembre 2008, le Président de la République prononçait, à l'hôpital psychiatrique d'Antony, un discours assassin pour la psychiatrie, se livrant à une exécution sans appel de la logique sanitaire des soins aux personnes en souffrance psychique, au profit d'une logique sécuritaire de contrôle social. À la suite de ce discours, de nombreuses voix se sont élevées pour rappeler que la psychiatrie française se bat depuis cinquante ans pour être reconnue comme un dispositif de soins au service des patients, et non pas comme un lieu de relégation sociale, et pour réclamer, comme a dit Marylise Lebranchu, une loi de santé, et non une loi de sûreté. Ainsi, l'« appel des trente-neuf contre la nuit sécuritaire » et l'« appel contre la politique de la peur » ont largement relayé les attentes de cette discipline en termes de perception des troubles mentaux, soulignant les politiques publiques à mettre en oeuvre, rappelant les réalités auxquelles sont confrontés ces acteurs et dénonçant les reculs de l'approche gouvernementale.
Au rebours de ces prises de position des professionnels, le Gouvernement a, depuis ce discours, augmenté le nombre de chambres d'isolement dans les services d'hospitalisation et créé de nouvelles unités pour malades difficiles – les UMD. Il a, de ce fait, ignoré que la psychiatrie manque moins de moyens de contention physique que de personnel et d'une refonte en profondeur de la manière de l'appréhender.
Le projet de loi que nous examinons est la traduction de cette esquive, pour ne pas dire de ce recul. Il vise principalement à réformer la loi sur les internements en banalisant le recours aux soins sous contrainte, y compris pour les soins ambulatoires. L'un des quatre objectifs affichés de ce projet de loi serait d'améliorer la qualité et la continuité des soins. Or pas un seul article de ce texte n'évoque ces questions pourtant cruciales, sauf en dehors du cadre des soins sous contrainte.
Les députés communistes défendent depuis au moins trente ans, notamment après le rapport Demay commandé par Jack Ralite en 1982, une vision progressiste de la psychiatrie pour la faire sortir de la camisole aliéniste avec laquelle elle est historiquement aux prises.
Nous affirmons, comme l'immense majorité des praticiens, que la psychiatrie n'a pas pour vocation de traiter des maladies ou des troubles. Elle ne saurait se limiter à l'éradication de symptômes, à la normalisation de conduites ou au contrôle social. L'objet de la psychiatrie – n'en déplaise aux tenants de l'aliénisme – est de soigner des patients souffrant psychiquement. Or il apparaît que votre projet ne prend absolument pas la mesure de cette finalité.