Dans le cadre de cette demande de renvoi en commission, Jacqueline Fraysse a eu raison d'exprimer la très grande déception de ceux qui attendaient une loi sur la santé mentale.
À présent, nous sommes tous très au fait de la situation des hôpitaux publics ; nous connaissons tous le nombre de services dans lesquels les postes de psychiatres et de psychologues ne sont pas pourvus. Pour l'avoir observé, nous savons tous aussi que la psychiatrie privée recule lorsque les hôpitaux ne sont plus capables de répondre : le psychiatre privé s'installe plus facilement à proximité d'un établissement où pourront être accueillis dans de bonnes conditions les malades qu'il ne pourra pas traiter en soins libéraux, à l'extérieur.
Toutes ces raisons nous conduisent à soutenir la motion présentée par Jacqueline Fraysse. On ne peut pas à la fois reporter sans cesse un plan de santé mentale et balayer d'un revers de main le fait que les hôpitaux publics manquent de postes et de candidats désireux de les occuper. Les personnels hospitaliers souffrent car ils ont l'impression d'être considérés comme les gardiens de gens qui seraient dangereux et qu'ils n'ont pas les moyens de soigner.
Tout à l'heure, je discutais avec l'un de ces psychiatres auxquels vous reprochez d'être en dehors de la réalité, pour ne pas dire autre chose. En France, nous n'avons pas besoin de travailler encore sur l'hospitalisation forcée quelle qu'en soit la nature, m'expliquait-il. En revanche, il posait cette question : combien de personnes vont-elles attenter à leurs jours ou commettre des actes difficiles à supporter pour leur famille ou pour les autres, faute d'avoir été admises dans un hôpital pour diverses raisons ?
La personne en souffrance a appelé un hôpital mais n'a pas pu obtenir un rendez-vous à temps. Un membre de la famille a tenté de prendre contact avec une clinique, sans trouver de lit. Une première demande de soins n'ayant pas abouti, on renonce la deuxième fois. C'est souvent parce que le malade n'a pas pu accéder à l'hôpital et aux soins psychiatriques que les choses se dégradent dans le cadre familial, ou à l'extérieur.
Jacqueline Fraysse l'a largement développé : faute de vraies interrogations sur la santé mentale dans notre pays, nous reculons. Du coup, sous prétexte de protection des droits, on s'intéresse aux malades qualifiés de dangereux envers eux-mêmes ou les autres. Dans le même temps, on renonce – et c'est ce qui est le plus difficile à supporter – à tout ce qui pourrait contribuer à la prévention et donc à la raréfaction des cas les plus difficiles, à l'espoir d'une meilleure vie pour beaucoup de malades et pour leurs familles.
Il est dommage que nous ne repartions pas en commission avec la ferme intention de revoir – comme le Conseil constitutionnel nous y a invités – les conditions de ce qu'on a appelé vulgairement les placements, mais surtout avec la volonté de réduire le nombre de personnes en déshérence dans la rue, dans leur travail ou dans leur famille, attendant vainement un rendez-vous, ce qui les conduit parfois à des actes brutaux envers eux-mêmes ou envers les autres. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)