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Intervention de Philippe Lucas

Réunion du 9 mars 2011 à 10h00
Commission des affaires économiques

Philippe Lucas, directeur de la normalisation et du développement d'écosystèmes de France Télécom Orange :

Je suis en charge, au sein de France Télécom Orange, de la normalisation et du développement d'écosystèmes, dans une entité appelée Études stratégiques et partenariats.

Le smart grid peut, selon nous, relever de trois grands secteurs : l'amont du compteur intelligent, où les questions relèvent plutôt d'acteurs comme Alstom et Schneider Electric ; le compteur intelligent lui-même, dont se préoccupe la CRE et où les approches sont différentes selon les pays européens ; enfin, l'aval du compteur, où ce qui peut être fait dans les foyers de consommateurs intéresse plus particulièrement France Télécom Orange pour une gestion intelligente des réseaux électriques.

Nous n'avons pas l'ambition de concurrencer quiconque en amont. Nous savons très bien compter des octets et des bits, mais pas du tout des kilowattheures. Nous n'avons donc pas l'intention d'intervenir dans ce domaine. En revanche, en aval, nous pouvons peut-être proposer des choses.

À cet égard, deux sujets nous semblent intéressants : la gestion des pics de consommation et la gestion de l'énergie au sein du foyer. Nous y voyons un important gisement d'économies d'énergie potentielles si l'on peut apporter au client final des éléments nouveaux de visualisation de sa gestion électrique. Ce thème émerge à peine car les divers acteurs de la filière électrique, disposant de systèmes dits propriétaires, cherchent à se développer séparément. Il est donc difficile de fédérer les différents opérateurs autour de la gestion électrique du foyer afin de mettre en place des innovations communes. Or les opérateurs de télécommunications peuvent apporter ici une valeur ajoutée, compte tenu de la nécessité de bâtir des écosystèmes associant plusieurs types d'intervenants dans les équipements et services au sein du foyer.

La gestion du pic de consommation peut être en partie traitée par la mise en place de compteurs intelligents, qui permettront de définir des paliers tarifaires optimisant la consommation. Mais on reste là dans une approche générale alors que l'on pourrait encore progresser dans cette voie en individualisant mieux les consommations électriques au moyen de ce que l'on appelle, chez Orange-France Télécom, la « porte numérique ». Je m'explique.

Un foyer comporte aujourd'hui plusieurs portes : la première, classique et physique, permet d'entrer dans la maison ou dans l'appartement ; la deuxième, électrique, se situe au niveau du compteur – il en existe d'autres du même type, pour l'eau et pour le gaz ; une dernière, numérique, fait entrer dans le foyer les réseaux de télécommunications et ADSL. Si, demain, cette dernière porte peut être utilisée à titre complémentaire pour mieux gérer la consommation d'énergie, il faut qu'elle soit sécurisée, afin que les données transitant par elle ne soient pas dévoyées. Les opérateurs de télécommunications peuvent apporter leur contribution en la matière.

France Télécom estime que l'intervention des différents acteurs doit être complémentaire et non concurrente. La question est donc de savoir ce que chacun apporte.

Derrière la porte numérique, on peut fixer une « énergie box ». En plus de la connexion ADSL, et intégrable à terme, cette boîte remplirait des tâches que l'on peut juxtaposer en trois couches.

Elle pourrait d'abord être connectée à certains équipements électriques, comme une chaudière, une machine à laver ou des appareils électroniques. Nous appelons cela la « couche de connectivité locale », aujourd'hui presque exclusivement dépendante de systèmes propriétaires, ce qui empêche les industriels de développer certains produits et services qui exigent un système ouvert. Il faut donc la définir, ce qui entraînera probablement la fixation de normes, sur lesquelles les industriels devront s'accorder. La plupart des acteurs concernés sont ceux de l'énergie et de la domotique. C'est pourquoi, la Fédération française des télécoms (FFT) a commencé à travailler sur ce thème avec celle des industries électriques, électroniques et de communication (FIEEC).

La deuxième couche est celle du middle ware car elle permet de télécharger des applications supplémentaires, proposées par des « développeurs », exactement comme on le fait sur un iPhone. De la même façon, il faut qu'elle soit commune aux différents intervenants, permettant ainsi une gestion locale de l'énergie.

La troisième couche, celle des services, c'est-à-dire des applications choisies par les consommateurs, échappe à nos discussions, car elle relève de la concurrence des initiatives privées, dont, naturellement, les « développeurs » parlent peu entre eux.

Nous avons décidé, au sein de la Fédération française des télécoms, de travailler ensemble sur ce projet de normes, car le monde dans lequel un opérateur imposait ses propres choix est maintenant révolu. Nous nous situons aujourd'hui dans une perspective d'ouverture et donc de normalisation. Notre objectif consiste à décrire un cadre normatif dans lequel l'écosystème se développera afin de mettre en place les conditions nécessaires à la gestion locale de l'énergie.

Mais la boîte dont nous parlons peut faire bien davantage que gérer la consommation d'énergie du foyer : par exemple gérer la domotique et d'autres services à venir, ce qui fera sa valeur ajoutée. On pourra donc mutualiser un outil, c'est-à-dire le rendre utilisable par un certain nombre d'acteurs, ce qui n'était pas le cas jusqu'à présent dans notre système vertical.

Elle devrait aussi contribuer à la gestion du pic de consommation. Afin de supporter une gestion plus statistique en aidant à lisser la consommation énergétique des foyers, il nous faut la maîtriser de manière dynamique.

Notre objectif est donc bien de développer un écosystème intégrant une forte valeur ajoutée dans la gestion du pic.

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