Nous abordons là un point extrêmement sensible, qui touche à l'identité même de la SNCF, si légitimement fière de sa « conscience cheminote ». Je ne saurai trop vous prévenir contre les assauts maladroits, qui, à chaque fois, ont généré plus de problèmes qu'ils ne voulaient en résoudre. Je ne nie pas la nécessité d'avancer, pour enfin promouvoir le fret dans notre pays ; et la route est longue quand on voit, par exemple, que la SNCF fait transiter l'armature de ses voies par… camions. Il faut avancer vers un « rail unique » européen sans doute aussi nécessaire que le « ciel unique », et peut être inéluctable, dès lors que notre opérateur historique lui-même s'est désormais solidement implanté chez nos voisins par une acquisition ambitieuse de filiales, et pour moderniser notre réseau, qui donne de sérieux signes d'essoufflement. Mais doit-on le faire au détriment du social ? Je suis convaincu du contraire. D'abord, parce que l'alignement des coûts vers les moins-disants socialement est une aberration, et nous serions inévitablement les victimes expiatoires d'une harmonisation sociale qui ne se ferait pas par le haut. Ensuite, parce qu'à la SNCF plus qu'ailleurs, le dialogue social est l'unique voie du progrès, hors de laquelle nous risquons forts de nous condamner à l'immobilisme et à l'impuissance.