Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, de Rousseau à Voltaire en passant par Victor Hugo, la contrefaçon a toujours été dans notre pays vivement condamnée. N'est-ce pas Diderot qui déclarait : « La contrefaçon, ce n'est rien d'autre que du vol » ? Les premières lois protectrices remontent d'ailleurs en France à 1791.
Plus récemment, les lois du 5 février 1994, du 18 mars 2003 et du 9 mars 2004 ont permis d'apporter une réponse adaptée à la contrefaçon du xxe siècle.
Cependant, comme le disait James Moody, ancien chef de la division de la criminalité du FBI, « la contrefaçon deviendra l'activité criminelle du xxie siècle ». En réponse à cette affirmation, je me félicite, monsieur le secrétaire d'État, de ce projet de loi qui poursuit l'effort de protection de la propriété intellectuelle. En effet, en transposant une directive européenne du 29 avril 2004, ce texte renforce les outils juridiques mis à disposition pour défendre la création et l'innovation.
À l'heure de la mondialisation et des échanges transnationaux, nous assistons à une massification de la contrefaçon. Elle ne concerne plus seulement les produits de luxe comme jadis, mais essentiellement des biens de consommations classiques : jouets, boissons alcoolisées, vêtements, médicaments, DVD, jeux vidéos. Ainsi, 91 % des produits saisis sont des produits de consommation quotidienne.
Grâce notamment à Internet, la contrefaçon est passée du stade artisanal et très localisé à un phénomène planétaire et industriel. Le grand banditisme y joue d'ailleurs, vraisemblablement, un rôle très important.
Qui, dans cet hémicycle, ne s'est-il pas déjà vu proposer une « bonne affaire » comme on les appelle, un vêtement de marque ou une montre peu chère ? À Dakar ou à Vintimille, à New-York ou à Manille, la contrefaçon dépasse les frontières. Elle représente 10 % du commerce mondial et génère plus de 500 milliards d'euros par an.
Au premier semestre 2007, les saisies des douanes françaises se sont élevées à 1,7 million d'articles, en augmentation de 70 % par rapport au premier semestre 2006. Cette concurrence déloyale détruit chaque année plus de 30 000 emplois dans l'Hexagone et concerne une entreprise française sur deux. Ces statistiques ne portent pourtant que sur 5 % des flux d'entrée.
Mes chers collègues, sur 100 médicaments consommés dans un pays développé aujourd'hui, 6 sont des contrefaçons : 6 sur 100 ce n'est pas normal.
En France, grâce à notre système de distribution et à son organisation, la contrefaçon médicamenteuse est moins présente. Cependant, la France reste une des principales zones de transit où 600 000 faux médicaments ont été saisis en 2006.
En tant qu'ancien président du groupe d'études des professions de santé et ancien rapporteur spécial sur la sécurité sanitaire, je ne peux que m'inquiéter de cette réalité. D'une réalité où les saisies de faux médicaments en Europe ont augmenté en 2006 de 380 % par rapport à 2005. D'une réalité où le manque à gagner pour les laboratoires pharmaceutiques français s'élève à plus de 10 % de leur chiffre d'affaires.
Même si la majorité des médicaments saisis concerne des produits de confort comme les coupe-faim ou le Viagra, ces produits peuvent porter gravement atteinte à la santé et à la sécurité des consommateurs, souvent par la toxicité des excipients entourant la molécule princeps.
Aussi, ce projet de loi apporte une réponse adaptée conformément à trois volontés :
Tout d'abord, faciliter le recours au juge en cas d'urgence en simplifiant les procédures et en accélérant la saisine du juge civil ;
Ensuite, instaurer un droit d'information afin d'améliorer l'identification des réseaux de contrefaçon. En effet, il est nécessaire de pouvoir contraindre les personnes en possession de contrefaçons à fournir des informations sur leur origine ;
Enfin, améliorer le calcul des dédommagements et la réparation du préjudice. Il faut que la réalité pécuniaire ait un effet dissuasif sur les contrefacteurs.
Tout en respectant l'esprit qui a conduit à l'élaboration du texte européen, ce projet de loi va au-delà car il comporte des dispositions nouvelles comme l'harmonisation des délais de prescription.
De plus, je ne peux que me réjouir des amendements adoptés au Sénat, qui améliorent le texte initial, que ce soit pour durcir les sanctions des contrefaçons dangereuses pour la santé ou pour spécialiser certains de nos tribunaux de commerce.
Mes chers collègues, ce projet de loi apporte une réponse cohérente à la contrefaçon, fléau moderne qui s'attaque à quelque chose qui n'a pas de prix : la création et l'innovation. C'est pourquoi je le voterai, et même des deux mains, si je le pouvais. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)