Je souhaite interroger M. le Premier président et M. le ministre sur le Fonds de réserve pour les retraites.
Il est singulier de constater que l'on discute aujourd'hui d'une éventuelle règle constitutionnelle d'orientation des finances publiques, alors que l'une des règles qui avait été fixée concernant la durée de vie de la CADES a été allégrement bafouée par ce même gouvernement, qui l'a allongée en même temps qu'il a décidé de siphonner, neuf ans avant la date prévue, c'est-à-dire en 2011 au lieu de 2020, le Fonds de réserve pour les retraites.
Comme l'a souligné la Cour, ce fonds avait été créé par le gouvernement de Lionel Jospin. Cet instrument nouveau, qui visait une politique de long terme, devait permettre de pallier les déficits à venir, après 2020, des régimes de retraite, par l'intermédiaire d'un fonds d'investissement public. Cet élément de solidarité intergénérationnelle devait constituer un outil de politique publique favorable aux jeunes générations pour amortir le choc démographique que nous allons vivre en 2018-2020 et qui n'est remis en cause ni par la crise économique, ni par la réforme des retraites votée l'an passé.
Le bilan dressé par la Cour est assez sévère puisque, depuis sa mise en place par l'actuel Premier ministre, alors ministre des affaires sociales, ce fonds n'a pas été abondé comme il aurait dû l'être. Désormais, il devra même fournir chaque année 2,1 milliards d'euros à la CADES, ce qui diminuera d'autant ses capacités d'investissement.
L'anticipation de neuf ans de ces décaissements conduit à déstabiliser ce fonds, qui ne peut plus remplir son rôle d'investisseur de long terme. Ses investissements seront donc désordonnés et remis en cause.
Le Gouvernement siphonne le Fonds de réserve des retraites parce qu'il n'a pas eu le courage de préserver les générations futures, par exemple en augmentant la CRDS. Il suit donc une politique à très court terme et indique, en réponse aux observations de la Cour, que le Fonds est conforté dans sa mission initiale par la perspective du retour à l'équilibre, prévu en 2018, du système de retraite par répartition. Or, tous les travaux du COR et toutes les projections montrent qu'un effort massif sera nécessaire à partir de 2020.
Aussi souhaiterais-je, monsieur le Premier président de la Cour des comptes, connaître votre sentiment sur cette réponse du Gouvernement et sur la crédibilité que vous accordez à la perspective d'un retour à l'équilibre en 2018.
Par ailleurs, à combien estimez-vous, à terme, le niveau de rentabilité d'un fonds qui disposait tout de même de plus de 35 milliards d'euros d'actifs à la fin de 2010 ? On risque d'aboutir à une gigantesque gabegie, sa rentabilité étant, du fait de la crise, inférieure à celle des emprunts d'État.