Cette proposition de loi est en effet complémentaire de la mission d'information de la commission des affaires économiques.
Nous ne doutons pas que l'ensemble de ces initiatives convergera prochainement vers une loi fondatrice du nouvel internet du XXIe siècle.
Justement, quel est-il cet internet du XXIe siècle ?
Le débat de la neutralité du net apparaît aux États-Unis au début des années 2000 à la suite de conflits opposant des FAI à des câblo-opérateurs en situation de monopoles locaux.
Cependant, tout autre est le contexte européen. Le déclencheur du débat en Europe est clairement l'explosion de l'internet mobile et les perspectives de saturation sur ce réseau. L'une des critiques positives que nous adressons à la proposition de loi de notre collègue, c'est de ne pas avoir clairement analysé ce déséquilibre, ni proposé des réponses législatives adaptées.
Aujourd'hui, l'internet qui se dessine est un réseau qui va devoir répondre à un déséquilibre entre offre et demande, au moins sur 1'internet mobile.
Nous, centristes, souhaitons un texte qui prenne acte de ce besoin de gestion éclairé.
Si cette question est de plus en plus présente, c'est que le débat autour de la neutralité du net tient pour beaucoup à l'augmentation constante des besoins de capacité, notamment du fait de la croissance exponentielle de la consommation d'images vidéo et de la multiplication des interfaces consommateurs : liseuses, smartphones.
L'amélioration des techniques de transmission ne nous exemptera pas de ce débat. Le débat est urgent car il s'agit d'une question économique mais aussi sociétale.
Dans cette perspective incontournable, votre texte s'attache surtout aux fournisseurs d'accès.
Or, on ne saurait réduire la neutralité de l'internet au fait que les FAI ne pratiquent pas de discrimination dans l'acheminement du trafic sur le réseau internet public. En effet, cette notion est plus large et doit inclure les pratiques des moteurs de recherche, des éditeurs et des intermédiaires techniques.
Nous ne voyons pas dans ce texte se dessiner l'architecture d'avenir qui doit se décomposer, d'une part, en un internet public, service universel, reconnu comme utilité essentielle et d'autre part, en des services gérés et commercialisés par chacun des prestataires techniques de l'internet. Plus que des contraintes à imposer aux FAI, c'est de cette architecture qu'il convient de parler. Un certain nombre de principes essentiels pour la neutralité du net ne sont pas affirmés dans la proposition de loi, à savoir le refus de la différenciation des flux, que ce soit par le contenu, par le destinataire ou par l'émetteur. Comment définir la qualité de service minimal pour l'internet public ? Quelle réglementation imposer pour éviter que les services gérés ne procèdent à des discriminations inacceptables ? Voilà le débat central.
Or il est absent de votre proposition de loi. C'est la raison essentielle pour laquelle nous ne la soutiendrons pas, alors même que les centristes font de la définition d'un internet public un objectif majeur pour les années à venir.
Comme cela a été rappelé par certains collègues, ce n'est pas au moment où les révolutions des peuples arabes nous rappellent tous les jours à quel point internet peut être mobilisé au service de la démocratie qu'il faut baisser la garde dans ce domaine.
Enfin, votre proposition de loi est muette sur les enjeux de financement du déploiement des capacités nécessaires pour répondre à la demande croissante de bande passante. Comment doit être partagée la valeur ajoutée à un moment où celle-ci est captée de manière prépondérante par les services ?
Enfin, la proposition de loi pose la question des dispositifs de blocage et de filtrage de certains contenus. Nous sommes heureux de saluer sur ce point le consensus qui s'établit sur tous les bancs de notre assemblée.
Les centristes seront des militants de la neutralité du net jusqu'à ce qu'elle trouve une traduction législative forte.
La question posée par Christian Paul est bonne, mais la réponse est partielle et hâtive. En conséquence, nous ne voterons pas cette proposition de loi. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR.)