…et dont je suis la rapporteure.
Comme vous le savez, cette mission est en cours. Nous avons publié un prérapport fin janvier, afin de recueillir les avis de la centaine de personnes que nous avons auditionnées.
Vous savez aussi que la Commission européenne a lancé une consultation fin septembre sur la neutralité d'internet et qu'elle a l'intention de publier un livre blanc sans doute d'ici à la fin du mois de février.
Nous avons toujours dit, avec Corinne Erhel, que nous prendrions en compte les travaux de la Commission européenne, avant la publication de notre rapport, tant nous savons que la réglementation concernant les réseaux et Internet est issue du contexte européen. Il nous semble donc indispensable d'en tenir compte en termes de calendrier.
Pour ces deux raisons, nous pouvons regretter que l'examen de ce texte ait lieu aujourd'hui, plutôt que dans quelques semaines.
Sur le fond, votre proposition de loi contient des dispositions sur lesquelles nous sommes en phase, comme l'a souligné M. Dionis du Séjour au titre du Nouveau Centre.
En premier lieu, il nous paraît indispensable d'inscrire dans la loi le principe de neutralité. La définition de la neutralité d'internet en termes de non-discrimination à l'égard de la source, de la destination ou du contenu de l'information transmise sur internet est consensuelle.
Je veux aussi rappeler qu'hier soir les membres de la CMP sur le projet de loi autorisant le Gouvernement à transposer le troisième paquet Télécom par voie d'ordonnances ont validé l'inscription dans la loi du principe de non-discrimination comme objectif du régulateur. Encore faut-il, à notre avis, définir plus précisément ce que l'on entend par non-discrimination. Elle peut, en effet, être interprétée de différentes manières, ce qui rend nécessaire d'en préciser le contenu.
C'est la raison pour laquelle la mission a proposé de définir le principe de neutralité comme l'absence de filtrage, hors mesures techniques nécessaires ou mesures obligatoires prononcées par un juge, la garantie d'une qualité de service suffisante sur internet, l'absence de mesures ciblées de dégradation de la qualité de service, l'accès non discriminatoire aux différents niveaux de qualité de service, la garantie de conditions techniques et tarifaires d'interconnexion équitables.
En second lieu, nous sommes parfaitement en phase sur la nécessité de l'encadrement des pratiques de filtrage qui doivent clairement être une exception. Sauf obligation de bloquer décidée par un juge, ou encore sauf obligation technique nécessaire et réalisée de façon transparente, l'accès à internet doit permettre d'accéder à tout l'internet. Le filtrage doit se faire à l'initiative de l'internaute par des dispositifs de type contrôle parental.
En dépit de ces points d'accord, nous avons aussi quelques doutes concernant la proposition de loi.
Si elle protège l'internet d'aujourd'hui, c'est-à-dire d'hier tant les évolutions sont rapides, elle entrave le développement de celui de demain, notamment des services gérés, comme il en existe déjà avec la téléphonie ou la télévision sur IP. Pourquoi les condamner ? Ils ont répondu à des attentes des consommateurs. Reconnaissons que c'est ce qui a permis à tous les Français de bénéficier de la téléphonie illimitée.
Comme l'a souligné Jean Dionis du Séjour, votre texte est aussi trop centré sur les fournisseurs d'accès à internet. Aujourd'hui, internet dépend également d'une multitude d'intermédiaires techniques – opérateurs de transit, services de type content delivery network – qui vendent notamment de la qualité de service et, précisément, la différenciation que vous semblez souhaiter interdire. Imposer ces obligations nouvelles aux seuls fournisseurs d'accès à internet les défavoriserait et ne permettrait pas d'atteindre l'objectif de neutralité recherché.