… s'est intéressée très tôt à cette question. En organisant des tables rondes, par exemple en novembre 2009, sur la numérisation du patrimoine écrit, ou encore le 2 juin 2010, lors de l'audition de Christine Albanel à propos de son rapport au Premier ministre intitulé « Pour un livre numérique créateur de valeurs », les commissaires ont ainsi pu cerner les problèmes dont la vente de contenus numériques est porteuse lorsqu'il s'agit du livre. Tous ces travaux s'accordent à reconnaître la nécessité de mieux encadrer la révolution numérique que connaît aujourd'hui le monde de l'édition.
Dans un contexte de relatif consensus et de travail collectif avec les acteurs du secteur du livre, le Gouvernement et la Haute assemblée ont choisi de défendre deux mesures : d'une part, l'instauration d'une TVA à 5,5 % sur le livre numérique ; d'autre part, l'adaptation des dispositions de la loi relative au prix du livre votée en 1981.
La première mesure a été inscrite dans la loi de finances pour 2011 ; c'est la seconde attente, très forte, que la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui permet de satisfaire.
Le principe de la fixation d'un tarif unique du livre par l'éditeur a été salué à maintes reprises, notamment parce qu'il a permis de maintenir un réseau de libraires indépendants, ce qui encourage la diversité de la création littéraire. Cependant, ces acteurs essentiels devront s'adapter à un secteur numérique complexe, mais doté d'un très fort potentiel de croissance : entre 2008 et 2010, le chiffre d'affaires des éditeurs a été multiplié par dix pour ce qui est de la vente des livres numériques.
Toutefois, nous le savons, légiférer sur des sujets liés à internet et aux technologies de l'information et de la communication pose plusieurs problèmes, sur lesquels nous devons travailler.
Le premier est celui de la territorialité. Je me suis personnellement demandé quel peut être l'effet de cette loi alors qu'il est possible d'acheter des ouvrages numériques sur des plates-formes internet basées à l'étranger. Mais l'arsenal juridique existe, même s'il est difficile à appliquer.
L'évolution des technologies de l'information et de la communication doit elle aussi être au coeur de nos préoccupations. Nous connaissons régulièrement de grandes révolutions technologiques qui accélèrent le rythme auquel obéissent certains secteurs économiques. Cela a été le cas pour la musique et le film, dont les opérateurs principaux n'ont pas été capables de suivre les attentes des consommateurs. Nous allons connaître le même phénomène pour le plus vieux support, le livre. Mais le livre homothétique n'est qu'une étape dans la diffusion du livre numérique. Progressivement, les contenus s'enrichiront et le livre deviendra multimédia.
Légiférer sur internet et l'usage des technologies pose le problème du rôle du législateur et de sa méthode. Cette proposition de loi montre combien il est important d'adopter une démarche caractérisée par l'humilité. Les décisions d'aujourd'hui ne seront peut-être plus les bonnes dans un an ou deux. Tel est le sens de l'article 7, qui instaure une clause de rendez-vous absolument indispensable au législateur. Il faut aussi tout simplement intégrer l'idée que la loi peut, et parfois doit, laisser les acteurs eux-mêmes se déterminer.