…et Michel Herbillon – honneur aux auteurs – lors de la discussion de la loi de finances pour 2011, amendement qui permettra une application de la TVA réduite au 1er janvier 2012.
Le Gouvernement a, par ailleurs, confié à Jacques Toubon une mission d'ambassadeur auprès de la Commission et des États membres pour aller plaider ce dossier. J'ai eu, pour ma part, il y a quelques jours, un échange très encourageant avec trois commissaires européens, Mme Vassiliou, Mme Kroes et Michel Barnier. J'ai trouvé chez eux une grande qualité d'écoute et même un soutien clair.
Un autre chantier essentiel que j'entends mener concerne l'adaptation de la librairie traditionnelle au numérique.
La librairie traditionnelle a pris du retard sur le marché du commerce électronique du livre physique. Le marché du livre électronique, encore balbutiant, peut lui permettre de prendre des positions non négligeables.
Le site 1001libraires. com, qui entend fédérer sur internet l'offre du plus grand nombre de libraires, doit être fortement encouragé. Le Centre national du livre accompagne ce projet avec un prêt de 500 000 euros, aux côtés de l'Association pour le développement de la librairie de création et du Cercle de la librairie. Je ferai également en sorte de soutenir l'examen de ce projet très avancé dans le cadre des investissements d'avenir de l'emprunt national.
La poursuite d'une politique ambitieuse de numérisation de livres constitue, bien entendu, un axe majeur de l'action de mon ministère.
Le développement de l'offre légale est soutenu principalement par la mise sur le marché des nouveautés publiées sous la forme de livre numérique. Je suis cependant convaincu que la numérisation des corpus plus anciens et du patrimoine littéraire y contribuera également de manière remarquable. Vous le savez, la France est le seul pays d'Europe à avoir mis en place un système de financement ambitieux de numérisation des livres, à travers les taxes affectées perçues par le CNL.
Opérationnel depuis 2007, ce dispositif a permis de numériser les fonds patrimoniaux libres de droit d'auteur de la Bibliothèque nationale de France pour un total de 300 000 documents à ce jour et plus de 22 millions de dépenses. Il a également permis de numériser les catalogues papier « vivants » des éditeurs, lesquels représentent un total de 600 000 titres.
Ce schéma mixte, associant aides patrimoniales et aide au secteur marchand, constitue une véritable originalité enviée par les acteurs étrangers. Le dispositif reste pleinement d'actualité, et le CNL souhaite renforcer ses aides aux catalogues d'éditeurs, en les orientant de préférence vers les petites maisons.
Je m'attache enfin à promouvoir une adaptation innovante et maîtrisée du droit d'auteur à l'univers numérique.
Entre les livres patrimoniaux du domaine public et la production actuelle de nouveautés sous format digital, le XXe siècle représente un territoire largement inexploré par le numérique. Une grande partie des titres publiés au XXe, toujours protégés par le droit d'auteur, sont aujourd'hui indisponibles dans les librairies et les lieux de diffusion du livre, compte tenu notamment de la difficulté de réactualiser les contrats de manière simple et commode pour les éditeurs.
Au terme d'une année de préparation, j'ai eu la joie de signer il y a quelques jours, avec René Ricol, commissaire général à l'investissement, Antoine Gallimard, président du Syndicat national de l'édition, Jean-Claude Bologne, président de la Société des gens de lettres, et Bruno Racine, président de la Bibliothèque nationale de France, un accord-cadre de portée historique sur la numérisation de ces livres indisponibles. Cet accord permettra de donner une nouvelle vie, sous forme numérique, à un corpus de 500 000 livres, qui pourra être proposé à la vente au cours des prochaines années. Ce projet a une portée considérable : au regard de la stratégie de Google, cette initiative est une réponse, une voie française sur le terrain de la numérisation des oeuvres écrites. Il marque une étape essentielle dans la mesure où il traduit la capacité des ayants droit à mieux se faire entendre et ouvre la voie à un règlement sur ce terrain.
Ces livres seront en effet exploités dans le cadre d'une gestion collective assurant aux éditeurs et aux auteurs, représentés à parité, une rémunération équitable dans le strict respect des droits moraux et patrimoniaux. Parce qu'il nécessite aujourd'hui un aménagement du code de la propriété intellectuelle, cet accord manifeste notre capacité à favoriser la numérisation des oeuvres grâce à des solutions juridiques innovantes tout en étant respectueuses du droit d'auteur.
Est-il objet culturel plus précieux que le livre, « la plus sacrée, la plus inattaquable et la plus personnelle de toutes les propriétés », pour reprendre les mots de Beaumarchais ? La préservation et la diffusion de ces oeuvres de l'esprit à l'heure numérique relèvent de notre responsabilité. C'est une responsabilité considérable à l'heure où les moyens électroniques de communication démultiplient les possibilités de l'outil mis en place par Gutenberg il y a plus de cinq siècles.
Compte tenu de l'ensemble des éléments qui ont été rappelés et des principaux axes de la politique que je mène en faveur du livre numérique, je suis, vous l'aurez compris, très favorable à la proposition de loi dont nous allons débattre aujourd'hui.
Je suis persuadé que cette loi constitue un accompagnement efficace des acteurs du livre vers le numérique. Elle crée les conditions d'une évolution équilibrée de l'ensemble de la filière, notamment au bénéfice des consommateurs, que je préfère pour ma part appeler lecteurs, ceux à qui l'écrivain permet de « comprendre le monde comme une question », pour citer Milan Kundera. Pour l'invention des modèles économiques de demain, le législateur se doit d'être non seulement présent mais également le plus clairvoyant possible. Dans le domaine de la numérisation de l'écrit, anticiper, c'est se donner les moyens de choisir entre ce que nous désirons et ce que nous ne devons et ne pouvons pas subir. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)