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Intervention de François Godement

Réunion du 9 février 2011 à 10h30
Commission des affaires étrangères

François Godement, professeur des universités à l'Institut d'études politiques de Paris :

Madame Bourragué, la grave question des paradis fiscaux doit être élargie aux dysfonctionnements d'ensemble du système financier international. En tenant compte de ce qui n'apparaît pas dans les statistiques officielles, les réserves de la Chine s'élèvent à 3 500 milliards de dollars, et de 60 à 70% des flux transitent par des places off shore. Les Chinois tirent de cette opacité un avantage politique considérable : ils valorisent eux-mêmes ce qu'ils font. Ainsi, en 2010, les achats par la Chine de bons du Trésor américains ont, nominalement, très légèrement baissé ; mais, dans le même temps, les investissements (pas tous d'origine chinoise, bien sûr), qui ont transité par Londres ont augmenté en un an de 120 à 456 milliards de dollars, ce qui est considérable. La Chine pourra agir indirectement, ce qui pose un problème réel.

M. Dupré s'est inquiété des visées chinoises en Afrique. Là, la Chine joue la synergie avec les pays en développement, et c'est là qu'elle est engagée dans la concurrence la plus vive avec les entreprises européennes et américaines : les consommateurs africains veulent les produits chinois bon marché. On nous rebat les oreilles des 5 ou 6 milliards que la Chine va prêter au Portugal ou à la Grèce, mais elle a prêté de 15 à 20 milliards de dollars à la République démocratique du Congo en contrepartie de concessions minières.

Quant à l'immigration chinoise, elle est constante, et plus forte qu'on ne le dit. Les évaluations ont évoqué 300 000, puis 600 000, et enfin un million d'émigrants. Je ne serais pas surpris que ce soit deux millions, et le mouvement continue.

Pour ce qui est des tensions politiques récentes, la Chine a l'habileté de choisir pour partenaires les gouvernements en place, avec lesquels elle traite à la seconde où ils accèdent au pouvoir, pas une minute avant ni une minute après. Qui aurait pu prédire, il y a cinq ans, la partition du Soudan ? Or la Chine, le plus grand allié du Président Omar el Béchir, s'est adaptée en souplesse à la nouvelle situation. Donc, hormis soulèvement populaire local – mais même en ce cas les ressortissants chinois ne seraient pas forcément les plus exposés - je pense qu'en Afrique la Chine gagne.

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