Monsieur le président, cette intervention me permettra d'évoquer mes différents amendements et d'aller plus vite lors de leur présentation.
Mes chers collègues, cet article va, je l'espère, nous donner l'occasion de définir très clairement l'objectif de diminution du stock d'embryons surnuméraires. Nous savons que ce stock traduit l'impasse éthique dans laquelle se trouvent les couples engagés dans une assistance médicale à la procréation. Nous savons également qu'il attise la convoitise de la recherche, notamment pharmaceutique. En commission spéciale, nous avons adopté des amendements tendant à inscrire dans la loi un objectif de limitation en donnant les moyens d'atteindre ce résultat. Ce seraient de réelles avancées que nous allons, je l'espère, concrétiser.
Avec cet article, nous allons également débattre de l'inscription dans la loi d'une nouvelle technique : la vitrification ovocytaire. Certains collègues sont particulièrement impatients à ce sujet, mais différentes auditions auxquelles notre mission d'information a procédé nous appellent à une réflexion approfondie avant toute reconnaissance précipitée de cette technique. Je vais citer des extraits du compte rendu de trois auditions.
La première est celle de Jacques Testard, le 12 janvier dernier : « Il faut, me semble-t-il, anticiper les problèmes éthiques que peuvent soulever les nouvelles techniques et s'interroger, à chaque feu vert donné sur le plan législatif ou réglementaire, sur ce à quoi il peut conduire. Prenons l'exemple de la congélation des ovocytes : cette technique n'a aucune chance d'améliorer le taux de réussite de l'AMP – bien au contraire – par rapport à la congélation des embryons. Elle permettra en revanche la multiplication des dons d'ovocytes, plus ou moins contrôlés, le développement de grossesses chez des femmes ménopausées et, plus grave, rendra possible la création d'embryons clandestins, échappant à tout contrôle. En effet, les gamètes ne sont pas individuellement répertoriés et ne font pas l'objet de la même traçabilité rigoureuse que les embryons. “Il existe des parades”, me rétorquera-t-on. Sans doute, mais il conviendrait d'y réfléchir avant d'autoriser la technique. »
Je vais maintenant citer le docteur Pierre Boyer qui, bien que promoteur de cette technique, faisait remarquer devant la mission d'information, le 10 juin 2009, qu'« il faut toutefois être conscient que certaines dérives sont à craindre. Le développement de la vitrification pourrait ainsi relancer des programmes de transfert nucléaire ou bien stimuler la demande de conservation des ovocytes dans la perspective d'une utilisation ultérieure sans indication médicale ».
Dernier exemple : l'audition de Mme Jacqueline Mandelbaum, chef de service d'histologie et de biologie de la reproduction, responsable du CECOS de l'hôpital Tenon, à Paris, et membre du Comité consultatif national d'éthique ; voici ce qu'elle nous disait le 11 février 2009 : « La vitrification est une technique de congélation ultrarapide des ovocytes, qui semble la plus propre à préserver l'ovocyte. Elle ne saurait être cependant une alternative à la production d'embryons surnuméraires. […] La congélation d'ovocytes permet de conserver des ovocytes non fécondés afin de les utiliser en cas d'échec d'une première tentative. Si on ne met en fécondation qu'un seul ovocyte, le taux de succès risque d'être extrêmement faible. Si on en insémine deux ou trois, il va y avoir des embryons surnuméraires, qu'il faudra congeler à leur tour pour éviter le risque de grossesses multiples. […] De plus, la question se pose du sort des ovocytes congelés : faudra-t-il les garder, et si oui jusqu'à quand ? [Cette technique ] a en outre le défaut d'introduire une inégalité dans le couple : pourquoi ne pas conserver également les spermatozoïdes ? ». Elle concluait : « Quoi qu'il en soit, je ne vois pas dans la congélation d'ovocytes une alternative à la congélation d'embryons. »
Ce sont des propos de scientifiques qui nous invitent à la prudence en la matière. Nous verrons s'ils sont suivis lors de l'examen de nos amendements.