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Intervention de Augustin de Romanet

Réunion du 9 février 2011 à 17h00
Commission des affaires économiques

Augustin de Romanet, directeur général de la Caisse des dépôts et consignations :

Je suis très heureux d'être ici parmi vous car c'est votre commission, la commission des affaires économiques, qui est compétente au fond sur la LME et c'est la LME qui a établi cette clé de répartition de ce fonds d'épargne. En une brève formule, disons qu'il y a récemment eu une bataille entre les banques et l'État pour gérer une ressource dont la Caisse n'est que l'intendant. Avec le projet de décret actuellement présenté, il apparaît que l'État reconnaît l'impératif d'un financement durable du logement social, qu'il préserve ainsi l'avenir mais que, pour autant, il ne laisse que peu de marges de manoeuvre pour de nouveaux emplois. Si le Parlement le souhaite, il peut tout simplement modifier le taux de centralisation minimum du fonds d'épargne sans que le pouvoir réglementaire ne puisse, en aucune manière, s'y opposer. En vérité, dans cette affaire, les banques ont eu un raisonnement en trois temps :

- en 2006, elles ont souhaité une banalisation de la distribution car, celle-ci étant auparavant réservée à seulement quelques acteurs, elles estimaient subir un désavantage compétitif ; en échange, elles s'étaient engagées à centraliser l'ensemble auprès de la Caisse des dépôts et consignations ;

- la LME, en août 2008, a ensuite prévu que le taux agrégé de centralisation soit de 70 % ce qui, par contrecoup, confiait au réseau bancaire environ 30 % des sommes collectées.

- les banques ont ainsi espéré bénéficier par la suite de nouvelles ressources mais, peut-être en raison de la crise également, 90 % des dépôts viennent de comptes qui étaient déjà ouverts dans ces banques : il y a donc eu une sorte de « cannibalisation », de « bancophagie » qui n'ont pas véritablement créé de nouvelles ressources. C'est la raison pour laquelle les banques réclament aujourd'hui un taux de centralisation de seulement 50 %.

L'État est naturellement libre de faire ce qu'il souhaite de son argent mais il doit avoir conscience qu'il peut avoir besoin de ces sommes (pour diverses opérations comme le financement du Grand Paris par exemple). Une récente étude du cabinet McKinsey, Farewell to cheap capital (décembre 2010), a montré que les demandes en investissements dans le monde allaient considérablement augmenter au cours des prochaines années en raison du développement des pays émergents (le capital moyen par habitant en Chine est actuellement de 5 000 dollars par habitant quand il est de 50 000 dollars en Union européenne) et du rattrapage de la part des pays développés, qui ont vu leurs investissements baisser depuis une trentaine d'années (ceux-ci représentaient 25 % du PIB au début des années 1960 contre 20 % seulement aujourd'hui). En outre, les banques ne consentent plus de prêts au-delà de 12 ou 13 ans : il faut, pour passer outre cet obstacle, élaborer des « project bonds » à l'échelle de l'Union européenne comme cela existe aux Etats-Unis mais la réflexion n'en est pas du tout à ce stade. Il convient donc de faire attention à ce que fait l'État !

Très rapidement, je vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à regarder le document qui vous a été distribué.

En page 2, vous verrez quels sont les quatre objectifs que doit poursuivre la Caisse à travers son fonds d'épargne : attirer une épargne suffisante, rémunérer les réseaux bancaires, prêter dans les meilleures conditions pour l'intérêt général et rémunérer l'État pour sa garantie.

En page 3, vous trouverez la description du fonctionnement de cette machine, pour reprendre l'expression de François Bloch-Lainé, consistant à « transformer des liquidités en HLM ».

La page 4 vous donnera un large éventail des nouveaux emplois qui peuvent être faits des fonds centralisés par la Caisse, qui vont bien au-delà du seul financement du logement social : financement d'infrastructures de transport, des Universités, de la mise en conformité de stations d'assainissement avec la réglementation applicable à l'Union européenne (qui a tout de même mobilisé 1,5 milliards d'euros)…

En page 5, vous verrez quelle est la structure du financement du logement social en France et, notamment, la part prépondérante de la Caisse des dépôts dans cet ensemble (soit 72 % du total).

Page 6, vous voyez que le monde du livret A en 2010, avec des signatures de prêts sur fonds d'épargne s'élevant à 16 milliards d'euros, n'a plus grand-chose à voir avec celui de 2004, date à laquelle ils s'élevaient à seulement 4 milliards d'euros. Nous anticipons d'ailleurs la poursuite de cette tendance, avec des prévisions de signatures de l'ordre de 20 milliards d'euros pour 2011. Le système est très dynamique, et c'est cette dynamique que le président Bouvard et moi-même avons du mal à faire comprendre ce point au ministère de l'économie et des finances, qui continuait de considérer le livret A comme une réserve d'argent essentiellement dormante. Au cours de la crise, et notamment en 2009, le secteur du logement social a eu un rôle contra-cyclique important.

Page 7, nous exposons les raisons pour lesquelles les dépenses financées par le livret A vont continuer à croître à l'avenir.

Les données présentées page 8 permettent quant à elles d'illustrer ce que j'ai dit tout à l'heure, avec un stock de prêts sur fonds d'épargne qui devrait atteindre 176 milliards d'euros en 2016, en croissance de 59 % par rapport à 2009, et près de 200 milliards en 2020. Et avec ce financement, nous ne faisons que rester sur le rythme élevé prévu par le plan de cohésion sociale.

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