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Intervention de Xavier Breton

Réunion du 10 février 2011 à 15h00
Bioéthique — Article 19 a, amendement 54

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaXavier Breton :

La commission spéciale a adopté un amendement visant à ouvrir le don d'ovocytes aux femmes n'ayant pas encore procréé. Cette disposition pose, à notre avis, deux problèmes majeurs, que nous ne pouvons balayer d'un revers de main.

Premièrement, il faut souligner que, si notre législation a retenu l'exigence d'avoir au moins un enfant pour pouvoir donner des gamètes, c'est pour s'assurer que ce don ne reste pas abstrait et que le consentement du donneur est bien éclairé. Il est indispensable que le donneur mesure la signification de son don, mais aussi qu'il puisse donner un sens à son don par rapport à ses enfants. Si l'exigence d'avoir déjà procréé est supprimée, le donneur ne pourra pas mesurer comment ce don pourra interférer dans sa relation avec ses enfants.

De plus, si la donneuse n'a finalement pas d'enfants pour telle ou telle raison, comment vivra-t-elle cette maternité biologique ? Ne risque-t-elle pas de rechercher à tout prix l'enfant issu de ses gamètes ? Après les enfants conçus par don de gamètes qui recherchent aujourd'hui l'identité de leurs parents biologiques – nous venons d'en parler –, n'allons-nous pas créer un nouveau problème, avec des adultes cherchant l'enfant issu de leurs gamètes ? En laissant le texte de la commission en l'état, nous créerions une nouvelle impasse éthique.

Le deuxième grand problème est la contrepartie qui serait accordée à la femme donneuse, à laquelle il serait offert de conserver à son profit certains de ses ovocytes pour le cas où elle deviendrait ultérieurement stérile et aurait besoin d'une assistance médicale à la procréation. Outre l'entorse à la gratuité du don que constituerait cette « compensation », nous pouvons nous demander si nous ne serons pas très vite confrontés à des demandes diverses et variées qui viseront à faire élargir les possibilités d'utilisation de ces ovocytes conservés. J'en veux pour preuve les débats de la commission spéciale. Notre collègue Philipe Nauche a ainsi indiqué que « la compensation proposée soulèvera inévitablement le problème de l'accès aux techniques d'assistance médicale à la procréation pour des raisons et dans des conditions autres que celles prévues par la loi », ce à quoi notre président Alain Claeys a répondu : « L'honnêteté intellectuelle exige de le souligner ».

Citons également Mme Jacqueline Mandelbaum, chef du service d'histologie et de biologie de la reproduction et responsable du CECOS de l'hôpital Tenon, membre du comité national consultatif d'éthique, que nous avons entendue dans le cadre de la mission d'information le 11 février 2009 : « En ce qui concerne les donneuses d'ovocytes, il ne serait pas du tout raisonnable d'autoriser le don par des femmes qui n'ont pas eu d'enfants, en dépit de tous les avantages qu'offrirait la disposition d'ovocytes de femmes de vingt ans. Mais on ne peut négliger les risques, mêmes faibles, que la ponction d'ovocytes et les traitements afférents font peser sur la fécondité de la donneuse. Il y a aussi le risque psychologique encouru par ces femmes si d'aventure elles n'avaient pas d'enfant par la suite. »

C'est pour l'ensemble de ces raisons que nous vous proposons de supprimer l'article 19 A qui vise à abandonner l'exigence que les donneuses d'ovocytes aient déjà procréé.

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