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Intervention de Jean-Yves Le Déaut

Réunion du 10 février 2011 à 15h00
Bioéthique — Article 14, amendements 69 96

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Yves Le Déaut :

Si, à un moment donné, elle croit pouvoir trouver ce qu'elle cherche, elle ne le trouvera pas. On le voit malheureusement dans le cas des personnes nées sous X, même si c'est totalement différent. J'ai ainsi souvent reçu des personnes dans ce cas à ma permanence ; je les ai même aidées. Celles qui ont réussi à connaître leurs origines, parce que les règles dans cette matière sont différentes de celles que nous envisageons pour la connaissance des origines génétiques, n'ont pas toujours compris pourquoi elles avaient été abandonnées.

Un gamète, un ovule ou spermatozoïde, ce n'est pas un oeuf, ce n'est pas un embryon, ce n'est pas un enfant. Considérer qu'un gamète qui a été donné dans un acte d'amour, de responsabilité, est une partie de ses origines est, à mon avis, une erreur.

On vit, en France, sous le régime du double anonymat : l'anonymat du donneur et celui du receveur. On ne sait même pas si le spermatozoïde ou l'ovule qu'on a donné a été utilisé. Ouvrir la voie de la connaissance pour des données non identifiantes ou identifiantes provoquerait plusieurs problèmes. Jean-Louis Touraine vient d'évoquer celui de frères et soeurs qui n'auraient pas le même traitement, mais mettez-vous à la place des enfants de la personne qui a donné des spermatozoïdes vingt ou vingt-cinq ans plus tôt et qui vont voir arriver dans leur vie, parce que ce ne sera pas secret, un demi-frère ou une demi-soeur génétique ? Comment vont-ils accepter que ceux qui sont des demi-frères par le gène ne le soient pas effectivement au niveau de la famille et au niveau social ?

J'ai reçu un courrier assez poignant et un collègue qui est dans ce cas s'est également exprimé sur ce sujet. À la question de savoir si elle acceptait la transmission de données non identifiantes cette personne a répondu que ces informations ne regardaient pas le receveur et ses enfants. Il nous semble malsain qu'un inconnu puisse fantasmer sur notre prénom, notre profession, notre localisation géographique, comme cela aurait été le cas avec le texte initial.

Accorder à un enfant ayant bénéficié d'un don ces informations serait valider son obsession de rencontrer le donneur et l'encourager dans sa quête. Nous pensons que l'entourage de cet enfant lui rendrait plus service en lui apprenant à accepter qu'il est impossible de toujours tout savoir, même sur soi-même. De plus, en 2010, à l'ère d'Internet, nous ne voyons pas quelles informations peuvent réellement être qualifiées de non-identifiantes. Toute personne venant au monde doit accepter que sa naissance a un prix : la mort, les souffrances, les frustrations. En tant que parents, il ne nous viendrait pas à l'idée de maintenir nos enfants dans l'illusion qu'ils peuvent y échapper. C'est grâce à notre amour et à notre éducation que nos enfants apprennent à s'accommoder de l'inéluctabilité de la mort. Un enfant né d'un don anonyme doit de même apprendre à s'accommoder de ne jamais connaître l'identité du donneur. Si, bien sûr, cet anonymat était mis en cause, nous demanderions immédiatement au CECOS la destruction des gamètes restants.

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